Eaduria TOME 1

Chapitre 13

Point de vue: Alaric.

Suite à notre dispute, je suis resté dans ma chambre le restant de la journée. Nakoa quant à elle n'a pas quitté la cellule, et je ne sais ce qu'elle fait mais je ne préfère pas savoir. On m'a appelé pour le dîner mais je n'y suis pas allé non plus, je n'ai pas envie de supporter un énième silence méprisant.

Des coups doux sur la porte se font entendre. Je soupire doucement, voulant rester seul. Mais en me retournant j'aperçois Agnar, ce qui me calme.

  - Désolé je n'ai pas attendu ton accord.
  - Ce n'est rien tu peux entrer.

Je reste allongé sur le lit, le regard face à la vitre. Il s'assoit au bord de celui-ci en posant son regard sur moi.

  - Comment tu te sens ?
  - J'en sais rien...J'ai l'impression que nous nous éloignons et j'ai horreur de ça. Je ne veux pas la perdre elle aussi...
  - Je te comprends.

Sa main vient caresser mon dos avec douceur et je glisse la mienne dans celle-ci, faisant entrelacer nos doigts.

  - Je suis désolé de ne pas prendre ton parti
  - C'est rien, je sais que tu es obligé d'être loyal envers la reine.
  - J'aimerais être loyal qu'envers toi.

Cette chaleur revient envahir mon visage, le fait de tenir sa main après ses mots me procure une douce sensation, comme si ce geste pouvait suffire à me détendre.

  - Agnar je...je suis perdu. J'avoue avoir hésité pendant le discours de Nakoa. Je ne sais pas si je dois la laisser faire pour venger notre mère ou suivre mes convictions...
  - Tu as un grand cœur Alaric, je sais que tu ne choisiras pas la vengeance.
  - Elle aurait sûrement voulu qu'on les attaque...
  - Mais tu n'es pas ta mère. Toi tu es rempli de bienveillance, et c'est une qualité.
  - Si tu le dis...

Sa main vient serrer doucement la mienne, incitant mes yeux à regarder ses pupilles brunes.

  - S'il te plaît ne te dévalorise pas, qu'est ce que te dit ton cœur ?

Je reste un moment silencieux, il est vrai que j'ai hésité à suivre Nakoa. Elles n'avaient aucun droit de nous prendre notre reine, de plus que c'était le seul parent qu'il nous restait et que j'avais connu. Mais la colère ne prend pas le dessus sur mes valeurs. Je ne veux pas d'une guerre, je ne veux pas devenir comme elles et répandre la violence. C'est décidé, je ne prendrais pas part à cette violence. Je me redresse et lui offre un sourire bienveillant.

  - Mon cœur me dit de suivre mes valeurs, et je sais ce que je vais faire.

Je relâche sa main pour quitter ma chambre ensuite d'un pas précipité, me dirigeant discrètement vers les cellules. Étant donné que la nuit est tombée, il y a moins de gardes présents ce qui me facilite l'accès. Nakoa semble avoir quitté les lieux tandis que la prisonnière est toujours attachée et bâillonnée, bien que son mollet ait été soigné. Je me saisis de la clé présente sur le mur et commence à la faire rentrer dans la serrure mais la main d'Agnar vient saisir mon poignet. Je tourne la tête vers lui, il affiche un air désolé.

  - Je ne peux pas te laisser faire ça..
  - Mais tu m'as dit de suivre mon cœur !
  - Je suis loyal à la reine Alaric, je ne peux pas te laisser libérer une prisonnière. Je suis désolé.

Je n'arrive pas à lui en vouloir, c'est plus fort que moi. Je lui rends ainsi la clé en restant silencieux.

  - Un problème ?

Agnar se retourne, nous retrouvant face à ma sœur ayant revêtue sa robe et sa couronne. Mon ami dissimule la clé sous sa tenue en secouant négativement la tête.

  - Non ma reine, aucun problème.
  - Bien.

Elle est accompagnée d'un soldat tenant avec lui plusieurs objets. Je reste en dehors de la cellule tandis que celui aux cheveux sombres vient ouvrir les portes pour faire entrer les arrivants avant de les rejoindre à l'intérieur. Nakoa retire le tissu de la bouche de la détenue, celle-ci semblant déshydratée.

  - Les règles sont simples, dis moi où se trouve votre cachette et tu auras la vie sauve. Qu'en penses-tu ?

L'enchanteresse reste silencieuse.

  - Étrange, vous avez la langue bien pendue d'habitude.

L'ennemi relève les yeux vers elle, d'un regard rempli d'amertume. La reine attrape ensuite une dague et vient faire une coupure à son bras, me faisant reculer en voyant le sang couler. Elle grimace simplement sans crier.

  - Je répète, où se trouve ton peuple ? 
  - Je ne vous dirais rien.

C'est la première fois que je les entends parler normalement.

  - C'est bien regrettable.

Elle vient entailler son visage, traçant un trait de son œil à son menton, la faisant crier de douleur cette fois.

  - Que tu parles ou non tu nous seras utile de toute manière.

La prisonnière finit par se tourner vers Agnar, elle murmure rapidement une phrase avant de se faire frapper par le deuxième soldat pour la faire taire. Soudainement, Agnar saisit l'épée de celui-ci et tente de s'en prendre à Nakoa mais elle esquive et utilise le revers d'une des armes pour l'assommer. Je me précipite à son chevet. L'enchanteresse se fait bâillonner de nouveau tandis que ma sœur se tourne vers elle.

  - Bien essayé, mais ceci ne marchera pas bien longtemps.

Je vérifie de mon côté que mon ami n'ait rien, ne voulant même pas adresser un regard aux responsables. La rousse pose sa main sur mon épaule que je bouge brusquement pour l'empêcher de me toucher.

  - Ne m'en veut pas, je l'ai fait pour me défendre.
  - Il est déjà assez amoché par l'embuscade, tu ne peux pas entraîner quelqu'un d'autre dans tes plans ?!

Son silence ne me choque même plus, je porte difficilement l'inconscient en commençant à l'emmener à l'extérieur. Je profite de voir Faye sur le chemin pour lui demander son aide, emmenant Agnar dans ma chambre. J'ai assez confiance en elle pour la laisser voir notre proximité.

  - Que s'est il passé ?
  - La prisonnière a hypnotisé Agnar pour qu'il s'en prenne à Nakoa. Mais elle l'a assommée avant. Peux-tu prévenir un médecin s'il te plaît ?
  - Oui bien sûr.

Elle s'exécute et je reste au chevet de mon ami, caressant doucement sa joue et remettant quelques mèches de ses cheveux en place. C'est aussi la première fois qu'il se fait hypnotiser. Cela me terrifie. Je ne suis pas d'accord avec les méthodes de Nakoa mais elle n'a peut être pas tort.