La rumeur qui résonnait dans le hall de l'Académie se tut brutalement lorsque, à la coursive, Lord Phrastos apparut au milieu de la foule, juste au-dessus de Calliopé.
Une poignée de jours s'était écoulée depuis sa discussion avec Alstair. Calliopé était incroyablement nerveuse. La teneur de l'épreuve changeait chaque année, les élèves des classes inférieures étaient en cours lorsqu'elle se déroulait, et Calliopé n'avait pas la moindre idée de ce en quoi elle consisterait. Aucune possibilité de s'y préparer. Les enseignants redoublaient de créativité chaque session et seule une chose était sûre : elle et ses camarades devraient faire l'étalage de leur Art.
Et ce n'était pas tout. Comme toujours à l'Académie, des invités triés sur le volet obtenaient le privilège de venir observer les étudiants, ainsi que les familles des élèves concernés. Calliopé, elle, n'avait personne, mais ce n'était pas cela qui la rongeait. Non. C'était le dai émeraude qui avait été disposé sur la coursive et que Calliopé avait aperçu en arrivant. À n'en pas douter, le Régent était là. Elle était déjà terrifiée à l'idée de devoir faire usage de son Art devant tant d'inconnus. Et devant le Régent en personne ? Elle allait perdre tous ses moyens.
Au moins, elle aurait une excuse toute trouvée pour s'éclipser à la fin de l'épreuve, et refermer le trou noir de la grand-place.
La voix de Lord Phrastos coupa ses pensées.
— Jeunes gens, chers invités. Bienvenue. Aujourd'hui est un grand jour. Chers élèves, nous avons déjà testé vos connaissances théoriques, vos savoir-faire de rédaction, de traduction et de déclamation, vos capacités de composition écrite. Le dernier volet des examens se constitue, comme vous le savez, d'une épreuve orale durant laquelle nous examinerons vos capacités à pratiquer l'Art en toute improvisation.
Calliopé balaya le hall du regard. Elle et ses camarades étaient disposés en cercle, et Alstair se trouvait de l'autre côté de la salle, son Chevalier derrière lui. Juchée sur un piédestal en leur centre, une étrange boule de verre. À n'en pas douter, c'était là un des éléments qui constitueraient leur épreuve. Calliopé la fixa tandis que Lord Phrastos reprenait.
— Le but de cet examen est simple. Vous et votre adversaire serez tirés au sort. Le premier qui parvient à se saisir de la sphère l'emporte. Vous ne pouvez qu'utiliser l'Art, dans le but d'empêcher votre adversaire de s'en saisir ou de façon à vous en emparer avant lui.
Calliopé sentit la panique monter en elle. Naïvement, elle avait toujours cru qu'on leur demanderait simplement d'enchanter quelques objets. Cette épreuve pratique était infiniment différente de tout ce qu'ils avaient appris en cours. Bien loin des exercices de stylistique ou de versification, c'était là une mise en pratique de leurs compétences. Ce n'était pas juste, cependant. La majorité de leurs cursus s'était concentré sur l'aspect théorique, et les cours d'Art étaient bien moins nombreux. Calliopé, inquiète à l'idée de faire de la Prose devant ses camarades, n'avait jamais excellé à ces exercices et avait toujours veillé à en réaliser le moins possible.
— Nous insistons sur le fait qu'il est interdit de blesser de quelque façon que ce soit votre adversaire. Il est interdit également de le priver de sa parole. Il va de soi que tous les sorts seront énoncés à voix haute, de façon claire et intelligible. Vous veillerez à ne pas laisser de phrases en suspens.
L'annonce jeta un froid sur les élèves.
— Cependant, nous en appelons à votre bon sens, tempéra Lord Innis. Vous emparer de la sphère importe moins dans la notation que votre capacité à réagir à la situation et que la qualité de vos formulations. Au vu des récents évènements, nous vous demandons d'être extrêmement prudents.
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Calliopé
FantasyÉlève de l'Académie qui forme les meilleurs auteurs du royaume, Calliopé refuse les règles des Muses : dans un monde où la magie tire son essence des mots, elle est trop à l'étroit dans le carcan des formules lisses et versifiées de l'Académie. Jugé...