Chapitre 57 - Amélia

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Je dois rencontrer Cooper d'ici quelques minutes à peine.

Après ma visite au commissariat, il a rapidement pris contact avec moi, m'expliquant qu'il faudrait qu'on se rencontre dans quelques jours pour faire le point sur mon affaire.

Zach lui a visiblement signifié que nous étions séparés, mais il a dit que cela ne changeait en rien le fait qu'il s'était engagé à me défendre et qu'il irait jusqu'au bout si c'était ce que je voulais.

Et j'ai évidemment dit oui, le remerciant de se montrer si honnête. C'est un type bien.

Je suis arrivée avec un peu d'avance alors je patiente sagement, levant les yeux de temps en temps en direction de la porte d'entrée, pour ne pas louper son arrivée.

Le café est calme aujourd'hui, ce qui n'est pas plus mal parce que j'ai toujours eu horreur du bruit et de l'agitation que traine parfois ce genre d'endroit. Oui, je sais, c'est assez paradoxal de venir dans ce genre d'endroit où nombre de gens se réunissent et d'espérer y trouver du silence.

— Bonjour.

Lorsque je relève le nez de mon bouquin, ce n'est pas Cooper qui m'attend, mais Zach.

— Qu'est-ce que tu fais ici ?

Je suis sur la défensive. Il m'a fallu un moment pour me remettre de notre rencontre impromptue au commissariat la dernière fois alors retomber sur lui comme ça, à nouveau... Je ne suis pas certaine de pouvoir le gérer.

— Je voudrais te parler.

— Oh, maintenant tu veux parler ? Il t'a fallu trois semaines pour en arriver à cette conclusion ?

Zach a l'air blessé. Mais je m'en fiche. Enfin... C'est ce dont j'essaie de me convaincre. Parce que je n'aime pas la version de moi-même que je suis en train de lui offrir.

— OK, je mérite ça, dit-il en s'asseyant face à moi, même si je ne lui ai pas donné mon accord.

— Mais je t'en prie, grogné-je, croisant les bras sur ma poitrine. Cooper va arriver d'une minute à l'autre.

— Je sais.

— Et tu le sais parce que ...?

— Parce que c'est lui qui a eu l'idée que je te rejoigne ici.

J'assimile lentement ce qu'il me dit.

— Cooper t'a dit qu'on devait se voir ici ?

— C'est exact.

— Mais... pourquoi ?

— Parce que je lui ai dit la vérité. Sur la raison de notre... rupture. Et je veux que tu la connaisses toi aussi.

Il marque une pause, me laissant visiblement une porte de sortie que je choisis néanmoins de ne pas prendre. Est-ce que je suis fâchée après lui ? Oui, bien sûr. Mais depuis le début, je suis convaincue qu'il ne m'a pas tout dit et qu'une partie de la vérité ne m'est pas parvenue.

— Je t'écoute.

Il y a des semaines que je cherche à comprendre comment les choses ont pu autant dégénérer en un temps si court. Des semaines que j'imagine toutes sortes de raisons. Alors même si je suis en colère contre lui, je ne veux pas me priver d'une chance d'obtenir des explications.

J'avais remarqué ses traits tirés au commissariat... C'est encore pire aujourd'hui.

D'autant que son œil droit, noir et gonflé, porte les traces d'un coup récent, comme s'il s'était battu, de toute évidence.

Je ne suis sans doute pas au mieux de ma forme moi non plus. Cette situation laisse des traces pour chacun d'entre nous visiblement.

— Je sais que rien de ce que je pourrais dire ou faire n'effacera le mal que je t'ai fait. J'en ai conscience. Et je ne suis pas venu ici dans le but d'obtenir ton pardon. Je ne le mérite pas.

J'apprécie qu'il commence par me dire ça, je dois bien le reconnaître.

— Comme tu le sais, j'ai perdu mes parents il y a quelques années maintenant. Mon père a fait tout ce qu'il a pu, mais les frais médicaux de ma mère étaient exorbitants. Alors quand c'est lui qui est tombé malade l'année suivante... Zoé et moi avons dû faire face. Elle a voulu jouer le rôle de la grande sœur à fond et continuer à prendre soin de moi, mais je la voyais jongler entre deux jobs pour tout juste réussir à vivre... Les dettes de l'hôpital laissées par mes parents étaient faramineuses et elle n'aurait jamais pu s'en sortir seule alors j'ai décidé de l'aider et moi aussi je me suis mis à travailler.

Je savais que ses parents étaient décédés coup sur coup, mais j'ignorais ce qui concerne la partie financière. Je le laisse poursuivre.

— Il y a eu ce type, qui m'a proposé du boulot... Ça payait bien et je pouvais enfin aider Zoé. Je pensais enfin voir le bout du tunnel, dit-il avant de marquer un temps d'arrêt. Je transportais de la drogue, Amélia. Je... J'ai mis du temps avant de réaliser de quoi il s'agissait, mais quand je l'ai fait, j'ai voulu partir. On m'a laissé faire, sans encombre. Zoé a rencontré Evan et les choses sont allées de mieux en mieux. J'ai ouvert le bar et... Je pensais sincèrement que j'avais mis tout ça derrière moi.

La révélation est brutale. Je me doutais bien que j'ignorais une partie de son passé, mais je ne savais pas avec exactitude de quoi il s'agissait... Je comprends maintenant pourquoi il ne voulait pas m'en parler.

— Alors... C'est pour ça que tu as fait tout ça ? Parce que tu avais peur que je le découvre et que je te juge ?

— Non, bien sûr que non. Je sais que tu n'es pas ce genre de personne. Ce type... Celui qui m'a embauché à l'époque, il m'a retrouvé. Je bosse à nouveau pour lui.

— Je te demande pardon ?!

— Je sais que dit comme ça, ça a l'air dingue, mais... Amélia, il a menacé de s'en prendre à toi pour m'obliger à recommencer...

— À moi ? Mais... pourquoi ?

Zach souffle longuement avant de saisir ma main, tremblante, sur la table.

— Parce qu'il sait à quel point je t'aime.

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