Chapitre 9 - Amélia

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— Avec ou sans alcool ?

En temps normal j'aurais dit sans, mais étant donné ce qui est en train de se passer, pour cette fois, je ne suis pas contre un petit verre.

— Avec, merci.

Il y a environ une heure que je suis tombée nez à nez avec cette jeune femme dans mon appartement. Ou plutôt ce que je croyais être mon appartement parce que d'après ce qu'elle en dit... L'endroit est habité.

Mais comment j'ai pu être aussi stupide ? Une affaire pareille... C'était évident que c'était trop beau pour être vrai.

Voilà pourquoi le type était nerveux et pourquoi les choses se sont réglées aussi vite.

Et dire que je viens de lui donner trois mois de loyer...

Stupide, stupide, stupide !

Je crois que j'en ai pour un moment avec ma séance d'autoflagellation.

— Tenez...

Millie me tend un verre dans lequel se mélangent les couleurs. Un cocktail. Parfait.

— Merci beaucoup.

Il est seize heures, mais honnêtement je m'en contrefiche. J'ai besoin d'un verre. Ou de deux.

Tout pour oublier.

Je dépose les papiers que j'ai signés un peu plus tôt dans la semaine sur la table. À cette heure-ci, il y a peu de monde et Millie s'installe face à moi avec son propre verre.

— Ça va aller, Zach est super. Ne vous en faites pas pour ça.

Elle a appelé le propriétaire de l'appartement. Le fameux Zach donc. Et il est en route pour venir essayer de comprendre ce qui se passe.

En plus d'après ce que j'ai compris, j'ai interrompu une fête d'anniversaire... Ce type va me détester.

— Je suis vraiment idiote.

Millie me sourit.

— Vous n'êtes pas idiote. D'après ce que je vois, tout ça fait très pro. Je me serais probablement fait avoir moi aussi.

Elle et moi avons passé en revue tous les documents, regardé les photos et vidéos de l'annonce sur internet... Maintenant que je sais que c'était bidon, je me rends bien compte que certaines choses ne vont pas. Mais avec le recul... C'est plus simple.

Dans l'ensemble, elle a raison.

C'est un travail de pro. Mais ça ne change rien.

— Comment c'est possible ?

La voix grave qui provient de derrière moi fait sursauter.

— Je me pose la même question.

Je me retourne tandis que Millie se lève pour faire les présentations.

— Te revoilà. Zach, je te présente Amélia. Amélia... Voici Zach. Le véritable propriétaire de l'appartement. Et de ce bar.

J'étais tellement occupée à me demander comment j'avais pu être aussi stupide pour me faire avoir que je n'ai pas pensé une seule seconde à ce à quoi pouvait ressembler le fameux Zach et je manque de tomber de ma chaise en me levant à mon tour.

Je viens de déjeuner, mais lui... j'en ferais bien mon dessert.

— Bonjour Amélia.

J'accepte la main qu'il me tend et range dans un coin de ma tête les pensées enivrantes qui se profilent. Ce n'est pas le moment, Amélia. On se reprend.

— Bonjour.

Je ne sais pas trop ce que nous sommes censés nous dire après ça. Peut-être quelque chose dans le genre « je suis désolée d'avoir gâché votre weekend » pour commencer. Oui, je vais commencer par ça. C'est une bonne idée.

— Je suis désolée. Pour... euh... Tout ça.

On pourrait s'attendre à ce qu'il soit en colère, mais ce n'est pas le cas.

Lui n'a peut-être pas perdu d'argent dans cette histoire, mais quelqu'un a tout de même subtilisé les clés de chez lui pour pouvoir louer son appartement.

Il m'offre un sourire charmeur et s'assied face à moi.

— Je prends le relais, Millie. Merci.

Elle me sourit et retourne rapidement vers le comptoir.

— Ne vous excusez pas. Vous n'y êtes pour rien.

— Mais votre amie m'a dit que vous étiez en plein weekend d'anniversaire et je n...

— Vous allez recommencer à vous excuser.

Il a raison. Comment pourrais-je faire autrement ?

— Je suis désolée.

Il secoue la tête en riant.

— Vous voyez !

Je ris à mon tour, un peu décontenancée par la tournure que prend cet échange, mais soulagée de ne pas me faire hurler dessus ou pire encore, d'être dans un bureau de police en train de me justifier sur ma présence dans l'appartement d'un autre.

— Écoutez, on s'est tous les deux fait avoir dans cette histoire. Mais vous sans doute plus que moi. Ce type... L'agent immobilier... Il vous a demandé de l'argent n'est-ce pas ?

Merci de me le rappeler...

— Oui.

— Je peux vous demander combien?

— Trois mois de loyers a mille cinq cents dollars... Et la caution.

Il semble sérieusement contrarié de m'entendre énoncer ce montant.

— Vous savez que cet endroit pourrait se louer au bas mot le double ?

Évidemment que je le sais. C'est pour ça que je pensais avoir fait une affaire en or...

Zach est d'une patience extrême et je ne saurais trop le remercier de se montrer si compréhensif. Mais il a raison. Évidemment que c'était trop beau pour être vrai.

J'ai tenu bon jusqu'ici, mais je sens désormais les larmes poindre et je ne suis pas certaine de pouvoir les retenir bien longtemps.

Je n'arrive pas à croire que ce soit vraiment en train de m'arriver.

Ce genre d'histoires n'existe que dans les magazines, merde. Il y a tellement de questions que je me pose et auxquelles lui et moi allons devoir répondre.

C'est invraisemblable.

Oui, invraisemblable...

Juste colocs?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant