CHAPITRE 13

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Chapitre 13

Ren

Chaque fois que je me replonge dans cette scène, je ressens un pincement d'amertume au fond de mon cœur. Je réalise que je franchis une limite, que je pousse les choses bien trop loin. Mais dans ma propre tourmente, je suis submergé par le besoin impérieux de me protéger, de trouver une échappatoire. Je prends la décision de la faire plonger dans la vérité à ma place. C'est un acte de désespoir teinté d'égoïsme.

Quand j'avais remarqué qu'elle avait oublié son carnet, un frisson d'excitation m'a parcouru. Sans hésiter, j'ai succombé à la tentation de percer ses secrets les plus intimes. J'ai ouvert ce carnet interdit, avide de pénétrer dans l'univers de ses pensées. Car je ne parvenais pas à lire en elle.

À l'intérieur, j'ai découvert des dessins d'une noirceur troublante, trop sombres. Des éclats de sa vie intérieure éparpillés sur les pages, des récits de ses émotions brutes et déchirantes. J'ai compris alors que son passé était marqué par la répression des larmes, qu'on lui avait trop souvent interdit de pleurer. Ces émotions refoulées avaient trouvé un exutoire dans des actes d'automutilation, des entailles discrètes sur sa peau, criant silencieusement sa douleur indicible.

Kaito, lui, n'a pas osé aborder le sujet qui pesait sur mes épaules, cette tension palpable qui nous éloignait l'un de l'autre. Il a préféré profiter du voyage en compagnie d'Amira. Je sais maintenant que je ne pourrai jamais me rattraper.

-« Le bus nous attend, tu viens », me lance-t-il avec une légère impatience dans la voix.

Je tourne la tête vers mon ami, ses paroles me tirant brusquement de mes pensées. Sans un mot, je me lève pour le suivre. Nous nous enfonçons dans le bus, dans un silence lourd.

À nos côtés, sa copine et elle sont assises côte à côte. Elle, enfouie dans un pull trop grand, semble presque se fondre dans l'obscurité de la nuit, lovée contre la fenêtre. Son regard est distant, perdu dans un horizon invisible, et sa présence est presque effacée, comme si elle cherchait à se dissimuler dans l'ombre.

-« Je suis fatigué, pourrais-tu me réveiller à la pause s'il te plaît ? » je demande à mon ami, sentant le poids de la fatigue s'abattre sur mes épaules.

-« Ouais, t'inquiète. » répond-il d'un ton assuré.

Nous avons pris la route alors que le soleil peinait encore à émerger à l'horizon. En réalité, je n'avais pas beaucoup dormi ces derniers jours. Mes nuits étaient hantées par les ombres du regret, occupant chaque recoin de mon esprit. La fatigue physique se mêlait à l'épuisement émotionnel, formant un poids lourd et oppressant.

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La pause sur l'aire d'autoroute nous offre l'occasion de nous ravitailler avant de reprendre la route. Alors que nous prenons pour un petit déjeuner rapide, Amira brise le silence pesant en posant une question.

-« Que s'est-il passé ? » demande-t-elle, ses yeux fixés sur moi avec une intensité troublante.

Je me retourne vers elle, surpris par sa demande directe.

-« Elle ne t'a rien dit alors ? » je demande, étonné.

-« Non, elle m'a seulement avoué qu'elle se sentait idiote. Je peine à la faire parler. » répond-elle, croisant les bras sur sa poitrine dans un geste de défense.

Mon regard se perd un instant sur le bus, où elle est restée enfermée, refusant de descendre. Je me tourne à nouveau vers Amira, tentant de minimiser la situation.

-« Je l'ai blessée, c'est tout. » répondis-je simplement.

-« C'est tout ? Arrête de lui parler, à chaque fois que tu le fais, tu la blesses. » s'exclame-t-elle, la colère perçant dans sa voix.

THE BROKEN NOTESOù les histoires vivent. Découvrez maintenant