Chapitre 17 : choix de vie ou destin

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~Boris~

La rue est vicieuse, la rue est rusée. La rue est une femme qu'on ne quitte pas, pas vivant du moins.

Je pensais pouvoir m'en sortir, tout recommencer à zéro. Utopie, désillusion. Avec pour seule source de revenue mon snack bar à Ibadan d'ailleurs géré par ma mère, je me suis rapidement retrouvé dépassé par la situation. Il y a l'école d'Ashley, ses besoins mais aussi ceux de ma mère. Les factures et imprévus. Après un séjour en prison, il est très difficile, je dirai même impossible de trouver du boulot. Tout le monde a droit à une seconde chance ? Foutaise ! On pèche tous mais celui qui se fait attraper est le diable. Alors est-ce que j'avais d'autres choix que de retourner vers la seule chose, le seul endroit que je connaisse ? Peut-être bien, mais sur le coup la négation était la réponse la plus évidente.

J'ai 21 ans. 21 putain d'année seulement. Mon acte de naissance actuel peut dire autre chose, mais je n'ai que 21 ans. Est-ce que c'est la vie que mènent les autres jeunes hommes de mon âge ? Certains vivent mieux mais d'autres vivent pire comme situation.

Et à quoi ça sert de se lamenter ? Les lamentations ont déjà fait évoluer une situation ?

J'arrive au centre car aujourd'hui je dois délivrer un speech en présence des médias. Je suis sensé donner un message d'espoir à ces jeunes gens qui ont emprunté les mêmes voies que moi. Un discours rédigé par mon manager et mon avocat.

Je monte sur l'estrade et salue le public. Je suis là pour une chose : leur promettre qu'ils peuvent sortir de la rue, pas le temps de tourner autour du pot. Je sais pertinemment bien que c'est faux mais c'est ce qu'il faut dire.

Et en même temps je dois essayer de laver mon honneur, crier aussi fort que possible que je ne suis plus un criminel et espéré que le vent porte ces mots à une oreille compatissante.

Moi : je sais qu'à la lumière de tout ceci, certains me diront "oui mais toi tu avais une carrière, des business, mais on t'a arrêté pour trafic de drogue".

C'est parce que je n'ai pas compris une chose, quitter la rue c'est aussi quitter les fréquentations qu'on y avait. J'ai commis des erreurs plus jeune, ce n'est pas un secret que j'ai vendu de la drogue. Mais dès l'instant où Dieu m'a béni avec un travail décent, j'ai tout arrêté. J'ai ouvert des boites de nuit, snack bars, bistrots, lounges bar, mais je n'y ai jamais vendu de drogue. Voilà pourquoi j'ai été innocenté. Car oui, le juge m'a déclaré non coupable.

Et ceci est une leçon pour vous. Vous vous êtes faits des frères dans la rue. Là-bas on doit être solidaires, loyaux les uns envers les autres. Si vous êtes toujours en vie c'est grâce à quelqu'un, vous lui en devez une. Et lorsque vous deviendrez quelqu'un de meilleur vous voudriez leur tendre la main. C'est exactement ce que j'ai fait et aujourd'hui j'ai presque tout perdu. Lorsque tu as déjà lavé tes mains, ne les replonge pas dans la boue.

La comédie dure une bonne heure peut-être même plus. La vérité est qu'on ne sort pas de ce monde vivant... sauf si le bonhomme en haut te fait grâce. Mais moi il ne m'a jamais connu. Donc je préfère parler de ce que je maîtrise.

Mon manager me félicite pour le discours. Ensemble on essaie de redémarrer ma carrière car être animateur télé, j'aime vraiment ça. La tâche est lourde mais pas impossible.

Lorsque tout le monde s'en va, je jette un coup d'œil à la comptabilité. Première page, premier nom "Nala Fashion". Soraya a été le premier donateur avec un mandat de $150.

Ce centre était son idée à la base. On l'a réalisé ensemble, donc ce don n'était que la suite logique. Un geste pour me dire "tu peux compter sur moi." C'est ce qu'elle dit aujourd'hui. Je dors au centre, je ne peux même pas la loger. L'amour et l'eau fraîche, même la plante a besoin de plus. Lorsque j'aurai retrouvé mon aisance financière pourquoi pas ? Mais pour le moment ce n'est pas ma priorité. L'argent ci.

Female 2 (ne pas spoil s'il vous plaît)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant