Silence lui parlait. Silence lui susurrait des mots étranges, des sentiments. Dans le vide existentiel de cet appartement, Silence se confessait à ses pensées. Lui n'avait pas bougé, il était tout ouïe à ce que lui dictait Silence. Les vibrations de ses sons jusqu'aux mots invisibles, il entendait tout. Trop concentré à vouloir décrypter ce qu'il entendait. Il s'était totalement coincé entre les quatre murs de sa chambre et s'était installé au fond de son futon pour prêter une attention toute particulière à ce qui faisait tant parler Silence. On s'était inquiété pour lui, il avait rassuré en recalibrant l'anxiété sur l'accidenté du moment ; ainsi il avait pu se recentrer sur son occupation première.
La journée avait été bien plus longue que prévue, et la nuit plus courte qu'espérée. Des obstacles imprévus, des nouvelles terrifiantes et des menaces planant au-dessus de l'ensemble de leurs têtes avaient fusé de toutes parts. Les personnes travaillant à ce bar, les clients atterrés et vengeurs. Tous sans exception s'étaient agglutinés sur eux, les harcelant dès leur arrivée sans qu'ils ne puissent rien faire d'autres que de se perdre dans le flot de paroles hargneuses. On avait craché sur leur ami –car ils avaient tous réussi à se déplacer-, on les avait provoqué, on avait expulsé Joyama sans pouvoir faire marche arrière. On les avait tous submergé de doléances et d'injures dans un flot agressif de mots énervés. La presse avait manqué de venir, car toutes ces esclandres s'étaient propagées comme le feu aux poudres... Heureusement, ils étaient intervenus à temps.
À force de patience, de persuasion et de temps, ils avaient calmé les mouvements de foule, défendant avec tactique l'inconscient qui avait été évacué en urgence. La police avait parlé et ils s'étaient entretenus avec eux et le propriétaire. Par chance, il fut convenu qu'aucune plainte n'allait engendrer de poursuite à cause de l'harcèlement vécu par Joyama, mais en compensation ils durent faire un marché et racheter par eux-mêmes le matériel mis en pièce, ce qui revenait à quelques tables et beaucoup de vaisselle. La faim, la fatigue et la lassitude les avait forcé à accepter tandis que l'incompréhension avait persisté. Peu après, ce couteau en partie retiré de leurs plaies, ils s'étaient décidé à aller voir leur ami transféré à l'hôpital. Ils l'avaient retrouvé encore inconscient, blessé, griffé, prostré dans son lit de fortune, dans une chambre où il allait peut-être passer plusieurs jours. Ils n'étaient pas restés longtemps, seulement le temps d'être rassurés que tout irait bien dans le meilleur des mondes possibles le temps de cette nuit agitée.
Rentrés chez eux, Takanori avait immédiatement appelé son patron pour le prévenir qu'il ne serait absolument pas en état de venir au travail à cause d'un accident dans sa famille proche. Lui au moins avait été généreux. Lui, attristé de la nouvelle, lui avait accordé quelques jours de repos si besoin. Takanori l'avait chaudement remercié de sa compréhension et sa compassion avant de le laisser retourner à son sommeil. Un peu plus tard, la bande se concerta, et décida de faire comme si de rien n'était pour l'instant, que dans les prochaines heures ils iraient travailler et Takanori se chargerait du reste. L'accord étant fait, ils allèrent tous se coucher.
Takanori n'avait pas fermé l'œil. Dans l'obscurité la plus totale, il avait deviné que son subconscient viendrait lui jouer des tours, et ça n'avait pas raté. Il n'avait su, et ne savait toujours pas, si c'était le choc de la nouvelle, la détonation de cet éclair ou seulement une hébétude hypnotisée qui le gardait encore immobile et muet dans son futon pendant que les autres faisaient face à leurs jobs. Lui ne bougeait pas, ne bougeait plus depuis un moment déjà, sans penser à rien d'autre qu'au néant. Néanmoins, et il le remarqua qu'après coup, il se rendit compte que son téléphone n'était pas au côté droit de son futon.
Il se rassit en soufflant. Il baissa la tête. Il ne voulait rien. Il n'avait envie de rien, et certainement pas de se mettre en quête de son téléphone. Ce ne fut qu'en se questionnant sur l'utilité actuelle de cette recherche qu'il se releva maladroitement, comme s'il avait trop bu. Il alla activer le moniteur près de sa porte et le volet remonta de lui-même jusqu'en haut de la fenêtre. Lorsque la luminosité fut suffisante, il balaya du regard la chambre, en vain. Il n'y avait que sa table à côté, ses vêtements sales parsemant le sol et les futons de Joyama et lui. Déjà lassé de ses recherches et cette vue déplorable, il s'en alla dans le couloir.
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MONSTER'S PROJECT : I. Doven
FanfictionCe fut un désespoir immense qui le submergea lorsqu'il comprit que son seul but n'avait été que la déchéance. Une décadence implacable, cruelle et abominable. La plénitude avait éclipsé toutes ses pensées. Enfin, il avait fait ce qui lui avait sem...