MONSTER'S PROJECT : I. Doven

XX.2

En acquiesçant, Takanori s'enfuit vers la chambre, heureux de pouvoir quitter la salle. Une atmosphère étrange le faisait suffoquer. Ce n'était pas qu'une tension émanant de ces quatre murs, mais quelque chose de plus profond, qui était indescriptible modifia l'ambiance si soudainement. En essayant d'oublier tous ces mots accompagnés de leurs maux, il réveilla Takashima tranquillement avant de l'accompagner à table. Sur la table trônaient des bols de nouilles aux odeurs diverses : poulet, porc et peut-être même d'autres choses, il y avait également d'autres choses qu'ils seraient incapables de tout manger tant il y en avait. Tout en appréciant leur dîner, ils contemplèrent assidument les deux équipe de seconde division se disputer la victoire. Heureusement, il se termina assez rapidement car bien entamé lorsque Takanori arriva. Lorsque les résultats tombèrent, il put constater sur les visages de ses amis des moues déçues, ce qui le fascina. L'équipe la plus proche d'Odawara avait perdu trois à un, et Takanori était loin d'être un expert mais le fait que toute la bande soit aussi triste montrait que l'équipe perdante aurait pu avoir plusieurs occasions de remporter des points et la victoire.   

Une petite discussions défaitiste s'ensuivit. Ils éteignirent la télévision en discutant des innombrables occasions pour l'équipe qu'ils soutenaient de faire des offensives. Des débats s'ouvrirent et se poursuivirent, ayant pour sujet des anecdotes les plus intéressantes aux moins pertinentes. Subjugué par l'ardeur de chaque débat, Takanori resta assister de manière totalement passive à chaque conversation sans prendre part ni position. Ce retour plus jovial le détendit, malgré la déception de la défaite, Takanori retrouva le même enthousiasme qu'il avait découvert lorsqu'il les avait rencontré, de nombreuses semaines auparavant. Cette familiarité agréable retrouvée le fit sourire longuement tandis qu'il scrutait les réactions plus habituelles de toute la bande. Il en était heureux. Il était rassuré. Il se sentait bien mieux. Déjà. Malheureusement, la fatigue des derniers jours s'étaient accumulée sur ses épaules, et il finit par se rendre compte qu'il serait incapable de tenir jusqu'au bout de leur discussion. Avec regret, il annonça qu'il allait se coucher. Tous lui sourirent gentiment lorsqu'il dit ça. Il partit se préparer rapidement avant de s'enfoncer sous les couvertures de son futon. Et malgré la fatigue, Takanori se retrouva immobile, les yeux grands ouverts dans la pénombre. Il dut attendre patiemment que Joyama dorme totalement avant de pouvoir éventuellement fermer les yeux.   

Il avait parfaitement conscience que ce n'était qu'un rêve. Un rêve sans couleur, sans chaleur ni froideur, ni aucune demeure où aller. Néant. Seulement le vide. Il n'était qu'un point infime dans le néant, un point insignifiant qui ne signifiait rien de plus qu'une molécule d'existence dans un tout mort et vivant. Il lui était rare d'avoir conscience dans ses rêves, mais il savait distinguer le fait qu'il ne soit rien alors qu'il n'était qu'humain. Ce qui revenait la même chose pour lui. Aucune sensation ne venait le tâter et lui permettre de comprendre ce qui lui arrivait dans cet univers alternatif.   

Il n'avait nulle part où aller. Il n'avait aucune destination dans ces choses sans fond ni forme. Il ne voulait aller nulle part. Dans ce vide aussi profond que plat, il ne pouvait en être autrement qu'il ne se répercute sur lui. C'était la déchéance des sentiments. Le silence à double sens se poursuivait sans qu'il ne puisse interférer, crier, hurler quoi que ce soit qui aurait pu tout changer. Il était privé de ses sens, de ses sentiments, et de sa conscience... Peu lui importait. Il pouvait être n'importe quoi, n'importe qui, tant qu'il vivait, il réaliserait l'invraisemblable dans quelque univers que ce fusse.

Puis consciemment, il eut envie de bouger, d'atteindre le potentiel plein de ce rêve. Il eut envie de voir bien plus de choses qu'un huit-clos vide qui n'avait aucun intérêt. Alors il s'obligea à se battre contre son lui rêvé pour espérer voyager. À force de persuasion, de volonté, de discours internes, de batailles et de coups, Takanori parvint à obliger son double de se bouger.