II~Écho

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Où suis-je ?

Des liens de cuir me labourent la peau. La font saigner comme un ruisseau s'écoulant, tranquille, sur la terre. Ils provoquent des brûlures insoutenables qui me cisaillent la peau. Obstiné, j'ai voulu me libérer de ces liens. Mais tout ce que j'ai réussi à faire est de seulement empirer mes souffrances. À chaque poignet, chaque cheville, il y a des lanières pour poursuivre l'ascension de la douleur, de cette irritation urticante.

Ayant la vue extrêmement floue, j'ai préféré garder les yeux clos et ne pas avoir à contempler ce qui se passe autour de moi. Les liens que je possède me suffisent bien assez pour ne pas regarder ce qu'il se trouve dans la pièce où je suis. Alors je préfère écouter.Écouter et analyser de cette manière ce qu'il s'y trouve, dans cette pièce.

J'entends une voix lointaine et masculine chantonner dans un dialecte que je ne connais pas. La langue est plutôt mélodieuse et gracieuse mais cette voix grave la rend plus lourde, la mystifie. Cette voix je la connais, elle me dit quelque chose. Mais ce qu'elle entonne est incompréhensible. Moi qui ai les yeux fermés, elle me berce dans un rythme lent et suave, me séduisant presque. J'écoute attentivement nombre de pas traînant de gauche à droite ou de droite à gauche.Sans interruption. Soudain, j'entends des gonds grincer métalliquement.

Je ne sais pas si je dois ouvrir les yeux pour vérifier ce qui se passe.

J'essaie de prendre mon courage à deux mains et ouvre difficilement les yeux.Je vois aussi approximativement que lorsque j'ai voulu comprendre ce qu'il se passait. Il n'y a qu'une différence : je distingue une silhouette fluette noir et blanche toute proche de moi. Il me faut un grand effort de volonté pour réussir à voir plus clairement ce qu'il en retourne. À force de cligner des yeux, ma vue s'éclaircit et je découvre avec un saisissement étrange que la personne présente n'est autre que le ménechme.

 Les bras ballants, un énorme rictus sur le visage et une lueur calculatrice dans le regard, il m'observe sans un mot. Je ne sais pas pourquoi mais j'éprouve un certain malaise en le voyant me jauger ainsi. Il ne devrait pas être là, à me laisser dans une posture pareille. De toute façon, je ne veux pas qu'il soit là. Je ne veux pas.

Il se rapproche de moi et je la sens m'envahir. Dans le creux de mes veines, je sens l'angoisse poindre comme si sa présence imposante et vile me rendait à l'enfant terrifié. Le fait qu'il soit si proche de moi me rend vulnérable, fragile et je ne parviens pas à saisir le sens de cette situation. Je n'ai jamais eu ça, c'est tellement étrange.

Il se penche au-dessus de moi et se rapproche encore.

 Il arrive. Très près. Trop près. Nos visages se touchent presque. Il pose une main délicate sur une de mes joues. Ce contact m'effare, me mortifie. Je ne veux pas qu'il me touche. Pas lui. Pas lui... Il m'observe, ce même sourire toujours présent, attendant certainement une réaction de ma part. Elle ne viendra pas. La seule chose prouvant, éventuellement, que je suis encore vivant doit certainement être mon visage : horrifié, les yeux grands ouverts,les sourcils haussés et la respiration légèrement haletante.

Sa main descend sur mon cou, le griffant doucement.

«-Pourquoi faites... Fais-tu ça ? je demande d'une voix peu sure,tremblante. »

Il continue de me sonder, un éclat tendrement haineux dans ses prunelles d'une profondeur inégalée. Il soupire avant de se dégager brusquement.

«-Parce que tu es un déchet ! Mon déchet ! »

L'instant d'après, à la vitesse de l'éclair, il se remet sur moi. Une colère sans bornes dans les yeux, il dit :

MONSTER'S PROJECT : I. DovenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant