XXI.2

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Une inspiration gutturale parvint à ses oreilles. Takanori ouvrit de grands yeux, éveillé, sorti de ce rêve dérangeant. Il essaya instinctivement de se repérer, totalement désorienté dans le noir le plus complet. Il passa ses mains autour de lui, à l'affût de quoi que ce fut. Une fièvre irradiait son corps paniqué et le parcourait par de grandes vagues de chaleur. L'humidité perlait sur son corps comme s'il venait de faire un grand effort. Il suffoquait dans ses draps. En essayant de calmer sa respiration désordonnée, Takanori s'assit et écarta ses couvertures. Exceptionnellement, le volet était fermé alors il ne voyait rien, mais ça ne l'empêcha pas de regarder autour de lui pour vérifier qu'il était bien dans la réalité.   

Quelques instants plus tard, déjà un peu plus calme, Takanori s'extirpa de son futon le plus discrètement possible et s'échappa de ces murs moites. Dans le couloir déjà, la fraîcheur se faisait déjà ressentir. Il en profita pour s'essuyer distraitement le front qui était trempé. Il fit glisser ses paumes autour de lui et arriva précautionneusement à la cuisine. Takanori alluma enfin une lumière dans la pièce. En voyant enfin distinctement ce qui l'entourait, Takanori soupira de soulagement. Il se posa contre le plan de travail de la cuisine et resta ainsi plusieurs minutes. Quand il se sentit totalement prêt, il alla prendre un grand verre qu'il remplit avec de l'eau. Il but à grandes goulées le liquide qui le glaça de l'intérieur. La sensation fut si agréable qu'il se laissa aller à boire un second verre qui fut moins percutant.   

Va falloir que j'aille voir un médecin... Je vais pas tenir longtemps avec des nuits pareilles... C'est pas la première fois que ça m'arrive ce genre de conneries en plus...   

Prit de curiosité, Takanori alla à la salle de bain, voulant savoir à quoi ressemblerait sa tête à ce moment. Outre les cernes de fatigue et le regard encore endormi, il avait le même faciès que celui qui ne voyait plus le soleil depuis des mois. Il semblait même avoir maigri. Il avait du mal à ingurgiter une quelconque forme de nourriture et se passait de plus en plus souvent d'un ou de plusieurs repas dans la journée et cela se voyait désormais. J'ai même pas besoin de contouring tellement j'ai les joues creuses bordel de merde. Qu'est-ce que c'est moche... Le dégoût vint progressivement en lui, un ressentiment vis-à-vis de cette apparence le força à se regarder de haut en bas avec scepticisme.    

En s'écartant de ce reflet peu amène, Takanori voulu trouver un moyen de s'occuper l'esprit en attendant de laisser passer ses cauchemars. Quoi de mieux que de reprendre des travaux inachevés dissous dans une passion dans laquelle il prenait de moins en moins le temps de s'exprimer ? Il décida d'aller à pas de loup jusqu'à son bureau. Il prépara le nécessaire des choses à avoir sur son bureau, ce qui consistait en un pot propre, une plume et un bloc de papier blanc vierge. Il s'assit et se concentra. En premier lieu, il chercha un thème digne d'intérêt, puis reprit d'anciens textes qu'il n'avait pas finit pour combiner les idées entre elles pour, avec un peu de chance, assembler des écrits potables qu'il serait heureux de relire plus tard.   

Il réfléchissait à une envolée lyrique sur les plumes quand des chuchotements assez proches se firent entendre. Intrigué, Takanori se retourna, pensant voir un ou plusieurs de ses amis au pas de la porte. Personne. Se disant qu'il devait avoir rêvé, il se remit face à son bureau et se perdit une seconde fois dans la contemplation de ce qu'il avait déjà accompli.   

Un trou avait commencé à opérer lorsque tout commença. D'abord des chuchotements incompréhensibles, infimes, qu'il pouvait à peine percevoir, puis ils devinrent de plus en plus proches. Takanori se retourna à plusieurs reprises. Encore. Les voix devinrent incohérentes, des paroles suppliantes, pleurant et fusant de toutes parts. Takanori commença à avoir légèrement peur, croyant au départ que ces voix venaient de la rue, sans aucune raison puisque sa fenêtre était fermée. Il essaya de deviner d'où provenaient ces chants malheureux. Il ne trouva pas de réponse. Cloué sur sa chaise par l'effroi, il n'osa pas bouger d'un pouce.

MONSTER'S PROJECT : I. DovenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant