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-Lizzie.

Elle l'attend. Devant la porte de son immeuble, les mains dans les poches de son trench. Le temps est encore frais, même si l'orage s'est dissipée, les nuages se sont étiolés. L'air est saturé d'humidité et d'électricité, de cette puissance ténébreuse qui coule sur leur peau.

Face à face sous le clair de lune, ils savent que le moment des explications est arrivé. Il est en colère, tendu à l'extrême. Elle mime la joie, même si ses émotions sont perdus dans un flot de jalousie, d'agacement et de haine.

-Je peux savoir ce qu'il t'a pris ? interroge-t-il de son ton le plus glacial.

-Tu t'es épris d'elle.

-Tu racontes n'importe quoi !

-Je t'ai vu l'embrasser, Milo ! Ne me prends pas pour une conne !

-Je ne faisais que mon travail et j'y parvenais, avant que tu décides d'intervenir. Tu as agis sur un putain de coup de tête, et maintenant, tu as foutu mon avancée en l'air !

Il a plutôt envie de lui hurler dessus car elle a fait du mal à Maé. Mais il doit se retenir. Il doit jouer un jeu. Car il est désormais décidé à annuler sa mission, à sauver Maé. Il a cru que son coeur s'arrachait en la voyant pleurer, supplier que Cane survive. Il ne veut pas qu'elle ait mal, il ne veut pas qu'elle soit blessée. Il sait qu'il ne se remettra pas de la douleur de la perdre, même s'il ne comprend toujours pas pourquoi il est aussi attiré par elle. Il veut juste la sauver. Et pour ça, il doit mentir.

-Je suis intervenue car tu n'es plus toi-même, dit-elle en serrant les poings.

-Arrête ! Je suis tout à fait capable de réussir ma mission.

-Non. Non ! Je le sens, je te connais, Milo ! Tu as déjà tué, facilement, aisément. Mais avec elle, tu laisses passer les choses. Tu la scrutes, tu l'étudies. Tu n'agis pas. Tu restes en retrait !

-Tu n'arrêtes pas de te mettre en travers de mon chemin ! hurle-t-il en retour.

-PARCE QUE TU N'ES PLUS TOI-MÊME !

Elle est à bout de souffle, lui aussi. Il s'affronte, chacun oppressé, la respiration sifflante.

-Tu n'es plus toi-même, corrige-t-il enfin.

-Ne dis pas de...

-Tu es jalouse.

Il a deviné. Lizzie tressaille. Oui, elle est chargée de jalousie. Elle est jalouse de Maé, la jolie fille fragile qui a attiré Milo, elle est jalouse de l'amour que Cane lui porte, elle est jalouse de la façon dont Milo la regarde, elle est jalouse car elle n'a pas ce que Maé a. Elle est jalouse et a le permis de tuer. Elle ne va pas s'en priver.

-Je t'ai laissé jusqu'à demain soir... ce soir, désormais. Je te préviens, Milo, si à minuit elle n'est pas morte de ta main, je m'en charge.

Elle s'éloigne. Il la suit du regard.

-Je n'aime pas qu'on me pose des ultimatums ! crie-t-il.

-Et je n'aime pas que l'on tombe raide dingue de nos cibles, rétorque-t-elle par-dessus son épaule.

Elle s'arrête subitement. Et se tourne à demi vers lui.

-Oh, et si le garçon ne meurt pas cette nuit à l'hôpital, il faudra finir le travail. Je compte m'en charger, à moins que tu n'aies une objection ?

-Tu n'étais pas obligée de faire ça.

-Je t'ai aidé, Milo, tu t'embourbais, répond-elle avec ironie. Minuit !

Elle s'éloigne en roulant des hanches. Elle lui a laissé un ultimatum. Il ne sait pas qu'elle ne compte pas le tenir. Maé sera morte avant minuit. Elle va se faire le plaisir de s'en charger.


ÉtincelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant