Allongé tout habillé sur son lit, Gabriel se sentait toujours étourdi. C'était fait, il avait dit adieu à Aislîn, au clan et à Charlotte. La tournure des évènements avait rendu cela mille fois plus difficile de la quitter sous cet arbre et de s'éloigner seul dans la neige.
À présent, il fallait parler à ses parents. Hermann devait venir le chercher dans quelques jours. Il valait mieux qu'ils se fassent à l'idée avant que Gabriel ne s'en aille, mais il ne voyait vraiment pas comment aborder le sujet avec eux. La tâche s'annonçait encore plus difficile qu'avec Charlotte.
Il attendit que Joseph, Hubert et Charles soient rentrés du travail pour descendre dans le salon. Les murs de la salle de séjour étaient recouverts d'un papier peint représentant des fleurs bleues décrépites. Un ancien téléviseur était placé sous la fenêtre, intégré dans un petit meuble en bois ; et un horrible canapé orange, vieux et défoncé, occupait l'angle du mur. Seule la table dans le coin de la pièce semblait neuve. La pièce était à l'image du reste de la maison : miteuse, mais conviviale.
Joseph et Hubert installaient les couverts tandis que Rose apportait une soupière de la cuisine. Charles, assis dans le canapé, le vit approcher.
— Tu tombes bien, on va passer à table, annonça-t-il en éteignant la télévision.
Gabriel s'éclaircit la gorge et prit son courage à deux mains.
— Écoutez tous, il faut que je vous dise quelque chose.
— Venez vous assoir, ordonna Rose. Tu diras ce que tu as à dire une fois que tout le monde sera servi.
Résigné, Gabriel s'assit à table avec les autres et Rose versa une généreuse portion de lentilles dans son assiette. Lorsque tout le monde fut servi, ils entamèrent le repas, et Gabriel répéta :
— Bon, j'aimerais vous parler de quelque chose.
Leurs regards se tournèrent vers lui. Gabriel sentit la pression monter encore d'un cran.
— Je sais que ça va vous paraître complètement fou, mais je vous jure que ce que je vais vous dire est vrai. Vous devez absolument me croire.
— Oh bon ça va, l'interrompit Charles, accouche ! Qu'est-ce qu'il y a ?
— En fait, je vais devoir arrêter l'école, annonça Gabriel.
Autant commencer par-là, puis monter crescendo dans les révélations. Sa déclaration fut accueillie par un long silence.
— Mais bien sûr, ironisa Joseph après avoir avalé la moitié de son assiette en une gorgée. Et en quel honneur ?
— Je...euh...dois intégrer une nouvelle formation. Et pour ça, je dois partir à l'étranger.
— Très drôle, Gabe, soupira Hubert en levant les yeux au ciel. Si tu as fini, est-ce que tu pourrais me passer le pain ?
— Je ne plaisante pas, s'énerva Gabriel. En fait, lors de la partie de chasse avec papa, je me suis rendu compte que j'avais des pouvoirs spéciaux.
— ...Des pouvoirs spéciaux ? répéta Rose, l'air inquiète. Tu es sûr que ça va Gabi ? Tu es tout pâle.
— Il a toujours été pâle, ricana Charles.
— Oui ça va ! Enfin non, ça ne va pas ! J'arrive à parler aux cerfs ! Voilà.
Il y eut un nouveau silence, mais à sa grande surprise, personne n'éclata de rire. Joseph laissa tomber ses couverts, l'air choqué. Rose jeta un éloquent à son mari, avant de soupirer longuement.
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Le Gardien des Cerfs - Tomes 1 & 2
FantasyGabriel, un ado de quinze ans, découvre qu'il a un lien particulier avec les cerfs. Ses pouvoirs étranges suscitent l'intérêt d'une organisation appelée "l'Ordre des Gardiens". Mais Gabriel ne sait pas quelles sont leurs réelles intentions. Il...