Intemporel T3 & 4

Azylis (Chapitre 107)

-Tu as fait quoi ?

La rage m'empêche de parler et Gabriel me ceinture vigoureusement avant que je n'attaque Gaëtan. Nous sommes réunis dans le salon de notre appartement une fois de plus. Gabriel, Christian, Maly, Sarah, Gaëtan, Aevin, Thaïs et moi.

Je me débats avec force et Gabriel finit par me lâcher. Il prend cependant la parole en essayant de me calmer.

-Azylis ! Ce dragon a essayé de te tuer ! Et le chauffeur de l'aéronef... Tu crois qu'elle ne lui voulait que du bien ?

Je secoue la tête comme une hystérique tout en tentant de retrouver un minimum de cohérence dans mes pensées.

-Pour moi, je suis sûre que c'était un accident...

Gaëtan m'interrompt aussitôt sèchement.

-Un accident ? Tu l'as vue faire ?

-J'étais sur son dos !

Mais Thaïs s'approche de moi et me secoue vigoureusement en me prenant par les épaules.

-Ça suffit Azylis ! Il faut redescendre sur terre ! Tu ne vas pas sauver le monde entier... Nous avons tous pensé que ton choix d'acheter ces deux dragons était stupide. Nous en avons malheureusement maintenant la preuve. Ta dragonne s'est enfuie... N'est-il pas naturel d'alerter la police ? Un dragon récalcitrant est tué. Ils doivent déjà être à sa recherche... Mais elle le mérite. Laisserais tu un assassin en fuite ?

Je crache presque mes mots.

-Mais tu ne m'as même pas averti avant d'appeler la police ! Et puis, on fait appel aux officiels maintenant ? Je croyais qu'on voulait créer notre propre gouvernement !

-Azylis, ce n'est vraiment pas la même chose et...

-STOP !...

Le cri nous surprend tous et je me retourne la première vers l'auteur du bruit. Maly. Sentant le poids de nos regards, elle reprend pourtant calmement la parole.

-Asseyez vous tous dans vos sièges.

Chacun de nous s'exécute en silence, à contrecœur. Maly reprend la parole durement.

-Maintenant, on ne va pas commencer à se disputer bêtement. Gaëtan et Azylis, serrez-vous là main.

Je sers mes dents les unes contre les autres avec force et envisage de refuser la main que Gaëtan me tend avant de me résonner. Je sers calmement sa main. Maly reprend la parole tandis que tout le monde pousse un léger soupir de soulagement. L'atmosphère électrique ne plaisait à personne.

-Maintenant, résumons clairement la situation. Le dragon d'Azylis, passons sur le fait que tout le monde l'avait prévenu, a attaqué un humain qui s'en est heureusement sortit et a projeté sa cavalière sur une terrasse de pierres... Gaëtan a prévenu le service de police chargé des dragons qui échappent au contrôle de leur maître. Ils doivent à l'heure qu'il est être à sa poursuite... Pour l'exécuter.

Alors que je m'apprête à de nouveau répliquer, Maly se tourne brusquement vers moi. Je ne suis tout à coup pas certaine qu'elle soit mon alliée dans cette pièce.

-Eh bien vas-y Azylis. Expliques-nous ce que tu voudrais faire...

La question me prend de cours et j'écarte les bras dans une mimique désolée.

-Je... On ne peut pas laisser la dragonne se faire tuer comme ça, on peut faire quelque chose et...

C'est au tour de Thaïs de m'interroger calmement.

-Et que veux tu faire ? Un jugement pour un dragon fou ? On te l'a déjà dit. D'habitude, tu veux sauver des gens honnêtes. Là, un dragon combattant.

Christian hésite légèrement avant de se décider à prendre la parole.

-Malgré les années que tu as vécues parmi nous, tu ne connais pas encore tout Azylis... Les dragons combattants ne sont jamais des jouets. Ils ne ressembleront jamais à Dynamite...

Il hésite avant de poursuivre en me regardant droit dans les yeux :

-D'ailleurs, même si je n'ai pas d'ordre à te donner, je te conseillerai de ne pas monter l'autre. Il risque de se montrer tout aussi vicieux.

Je sens malgré moi qu'ils ont raison. Tous. Et qu'ils ne font que s'inquiéter. Mais une part de moi refuse inexplicablement de ne pas aller au secours de Rebelle. Peut-être qu'ils ont raison et que c'est dans ma nature...

Je me lève d'un bond de mon siège et attrape ma veste que j'avais posé sur l'accoudoir.

-Merci de vos conseils... Vous permettez que j'aille réfléchir ?

Personne ne répond mais tous acquiesce. Alors que je me dirige déjà vers la porte de la plateforme de dématérialisation au bout de l'appartement, Gabriel se lève et me rattrape par le bras. Mon regard croise le sien, inquiet et tourmenté.

-Azylis... Dis-moi que tu ne m'en veux pas... Mais je ne veux pas que tu risques bêtement ta vie...

Je regarde ses yeux troublés pendant quelques secondes puis dégage mon bras doucement.

-Laisse-moi s'il te plait. Je... On en reparlera tout à l'heure. Là... Je crois que je vous en veux un peu à tous.

Et, sans me retourner, j'ouvre la porte et entre sur la plateforme.

-A quel étage souhaitez-vous descendre ?

-Étage cinq-cent-cinquante-trois.

Deux minutes plus tard, je sors de la salle similaire. Je sens la colère qui bouillonne en moi contre le monde entier. Qu'est-ce-qui lui a pris aussi, à cette satanée Rebelle ?

J'ai eu tellement peur... Et je me refuse à la laisser tuer. Je suis complètement folle. Enfin, ce n'est pas la première fois que je le remarque. Je traverse l'étage des dragons et constate rapidement en passant que tous les travaux seront sûrement impeccablement terminés demain. Puis je change mes pensées de sujet en songeant que ce n'est vraiment pas le moment des observations.

J'arrive devant le box de Satan et pousse un léger soupir anxieux en jetant un coup d'œil autour de moi. Il n'y a heureusement personne. Tous les cavaliers ont quitté les lieux après s'être occupés des dragons. Derrière la porte, j'entends les grondements sourds du dragon et son piétinement continu. Je passe mon bras sous l'émetteur et la porte s'ouvre aussitôt.

Un gigantesque coup me balaie alors littéralement et je me retrouve expulsée à au moins cinq mètres. Je me redresse folle de rage et hurle :

-Bon sang, ce n'est pas bientôt fini ? J'en ai assez de passer ma vie par terre ! Ce n'est pas parce qu'on est une montagne de kilos qu'on doit se croire tout permis et...

Mais la voix de Satan résonne aussitôt dans mon esprit et m'empêche de poursuivre mes imprécations.

-Azylis ! Désolé pour le coup de queue, je ne t'avais pas vu... Ou est Rebelle ?

Il en oublie d'être méchant tant la panique dans sa voix est évidente. Je deviens tout à coup beaucoup plus méfiante et me redresse lentement.

-Tu sais quelque chose ?

Il ne répond pas et le silence devient pesant dans mon esprit.