Intemporel T3 & 4

Thaïs (Chapitre 174)

J'en ignore la raison mais sur le trajet du retour, dans l'aéronef qui nous reconduit à notre prison, les gardes ont pris cette fois-ci la précaution de nous attacher les mains à l'aide d'une fine cordelette métallique qui me scie les poignets.

Je ne regarde ni Aevin ni Gaëtan, et encore moins les deux gardes noirs armés à l'avant de l'aéronef ou le paysage qui défile et me contente de caresser du bout des doigts Cigarette roulé en boule sur mes genoux et de réfléchir rêveusement.

Je repense a notre étonnante rencontre avec Yves...

***
Quelques heures plus tôt.

Yves est le premier à se reprendre et il sort de son état de surprise pour nous lancer :

-J'aurai préféré vous croiser dans d'autres circonstances mais... Heureux de vous retrouver !

Aevin est s'approche de lui et pause sa main sur son épaule avant de lui serrer la droite avec fermeté en secouant Yves comme un prunier.

-Salut vieux frère ! Qu'est-ce-qui t'amène dans cette galère ?

Yves n'a pas le temps de répondre car Gaëtan lui adresse un vague signe de tête en guise de bonjour et le jeune homme répond de la même façon. Tout le monde se tourne ensuite vers moi, y compris les autres membres du groupe de Yves dont le garçon à l'air si vaniteux. J'hésite puis me décide à tendre la main en disant :

-Contente de te revoir Yves... C'est Edilyn qui t'envoie ici non ?

Yves comprend ma question muette et son sourire s'agrandit sur ses lèvres. Mais chez lui, cela ne veut pas dire grand chose car je ne connais personne qui sourie autant.

-Toujours aussi perspicace Thaïs ! Mais tu peux poser tes questions directement, ici, tout le monde est au courant du fait que la princesse me contrôle. J'ai pris les devants avant d'avoir des ennuis...

Les visages deviennent aussitôt graves mais Yves poursuit avec toujours son léger sourire au coin des lèvres :

-Tu as sûrement raison... Je suis envoyé avec vous à cause d'Edilyn... Quoi de mieux que de m'envoyer sur Sagan pour tout contrôler grâce à moi ?

La question reste en suspens mais Yves s'approche brusquement de moi et me murmure à l'oreille de façon à ce que personne d'autre que moi n'entende :

-Mais j'ai une idée pour me sortir de là... Et je t'avoue que j'ai hâte d'avoir les moyens de la mettre en pratique... Bientôt, si tout va bien, j'échaperai définitivement au contrôle d'Edilyn.

Il recule ensuite, retrouvant son sourire imperturbable tandis que Gaetan et Aevin me dévisagent d'un air interrogatif. Je fais un léger geste de la main et ils comprennent rapidement tous les deux : je leur expliquerai après.

Comment Yves compte-t-il échapper à la princesse ? La question me tourne quelques secondes dans la tête avant que nos guides respectifs viennent troubler mes pensées.

Paolo se fraye un chemin entre nos deux groupes et crie d'une voix forte :

-Allons, venez avec moi, la récréation est terminée !

Quand il parle, j'ai de plus en plus l'impression de n'être qu'une enfant de cinq ans à surveiller attentivement...

La fille en talons aiguille, elle, lance d'une voix haut perchée à Yves :

-Mon garçon, rejoignez vos camarades, nous n'avons pas que cela à faire...

Il nous adresse un petit signe avant de tourner les talons. Le garçon blond, toujours le même arrogant, se retourne lui aussi vers nous le temps d'esquisser un sourire narquois avant de suivre à son tour sa guide.

***

De toute évidence, le trajet en aéronef touche à sa fin car je vois apparaître devant nous entre deux nuages la tour caractéristique de notre prison.

Deux minutes plus tard, nous nous posons effectivement sur l'une des multiples plateforme et les deux gardes nous ordonne sèchement de sortir de l'engin.

Je m'exécute et aspire une bouffée d'air frais avec plaisir lorsque mes pieds touchent le sol de verre. Cigarette m'abandonne au profit d'Aevin juste derrière moi et se met à voler autour de lui avec de petits sifflements joyeux tandis que Gaëtan s'avance à côté de moi.

Les gardes nous font signe d'avancer mais je ne pense qu'à une chose qui vient de soudainement me traverser l'esprit.

Je me penche très légèrement vers Gaëtan, le plus proche de moi, et murmure ma question.

-Gaëtan, à ton avis, on ne pourrait pas se servir de Cigarette pour envoyer un message à Azylis ?

Le garçon jette un léger coup d'œil aux deux gardes qui ne paraissent pas avoir entendu et murmure du même ton sa réponse :

-Surtout pas Thaïs... Ils n'espèrent que ça et c'est pour ça qu'ils nous l'ont laissé... Ce dragon a côtoyé Azylis pendant longtemps, avec beaucoup de chance il pourrait donc la retrouver. Mais j'ai vérifié, il a un émetteur incrusté sous les écailles...

Je laisse échapper un geste de colère puis me calme. La rage ne sert pas à grand-chose dans le cas présent.

-Je suis impressionnée Gaëtan que tu aies pensé à vérifier ce detail...

-J'ai surtout trouvé étrange qu'ils nous laissent le dragon...

J'acquiesce et n'ajoute rien de plus. Les portes devant nous coulissent pour nous laisser entrer et Aevin me rejoint.

-Sacrée journée quand même... Vous avez vu l'appareil pour l'expédition ?

Je repense à l'espèce de gigantesque chenille composée d'une multitude de wagons et grimace.

-C'était superbe mais ça l'aurait été encore plus si nous ne devions pas y entrer un jour...

Malgré tout, je dois avouer que leur organisation et la qualité de leurs moyens m'a stupéfaite. Mais les gardes derrière nous ne me laisse pas réfléchir davantage et nous font accélérer le pas en lançant :

-On est pas dans un salon de discussion ici ! Avancez !

Nous traversons l'accueil puis une partie de l'étage avant d'arriver devant le couloir numéro cinquante-quatre. Les gardes nous ordonne de nous arrêter et de tendre les mains en avant.

J'obéis, trop heureuse qu'ils se décident enfin à m'ôter mes liens, et ils enlèvent effectivement rapidement les cordelettes métalliques, non sans m'écorcher les poignets au passage.

J'esquisse une grimace fugitive sous la légère douleur avant de me reprendre et les gardes nous ordonnent d'entrer dans notre cellule dont on vient d'ouvrir la porte.

Aevin et Gaëtan passent les premiers et, à leur visage, je devine que quelque chose n'est pas normal.

Kim est-elle toujours bien là ? Le cœur battant, je me précipite à l'intérieur et les gardes n'ont pas besoin de me bousculer.

La première chose que j'aperçois, c'est Gaëtan prenant dans ses bras Kim. Un indicible soulagement m'envahit jusqu'au moment où je tourne les yeux vers Aevin. Celui-ci est en train de s'exclamer en tendant la main à un jeune adolescent :

-Eh bien ma parole ! Aujourd'hui c'est vraiment le jour des rencontres... Salut Eric !...