Intemporel T3 & 4

Gabriel (Chapitre 102)

Je tourne la tête vers la porte du fond de mon appartement qui s'ouvre et sens un sourire me monter aux joues en reconnaissant ma visiteuse.

-Azylis ! Je t'ai attendu toute l'après-midi... Ça s'est passé comment pour les dragons ?

Elle se mordille la lèvre, visiblement gênée et je sens l'inquiétude m'envahir. Je me rassois dans le fauteuil que je viens de quitter et elle s'installe en face de moi dans un siège blanc à suspenseurs qui flotte à quelques centimètres du sol et s'empresse d'adapter sa forme pour être le plus confortable possible.

-Tu ne vas pas beaucoup apprécier ma fin de journée mais enfin... Racontes moi d'abord ce que toi, tu as fait.

C'est à mon tour d'être gêné. J'ai dit ce matin que l'on allait miner les trains. Mais je n'ai jamais précisé vraiment la situation.

-Eh bien... Je suis entré dans un wagon au moment où le train partait et...

Elle fronce déjà les lèvres en une moue dubitative.

-Attends... Mais tu ne devais pas miner le train ?

-Heu... Si.

-Alors avant le départ si tu veux t'en sortir vivant non ?

-Nous ne voulions pas faire de blessés et alerter la police.

Elle croise fermement les bras sur sa poitrine et demande :

-Parfait. Alors qu'est-ce-que vous avez fait exactement ?

Je regrette amèrement l'absence de Christian qui a un don pour attirer l'attention sur lui. Même la présence de Maly m'aiderait vraiment là. Je me décide pourtant à répondre.

-Eh bien... Nous avons minés les wagons et quand il ne restait plus qu'une minute au compteur, nous savions qu'il fallait sauter du train en marche...

Azylis reste silencieuse, sous le choc de ce que je viens de lui dire.

-Et personne ne s'est tué dans votre affaire ? Mais dis-moi c'est un vrai miracle !

Je secoue la tête avant de dire lentement, certain que de toute façon elle en serra informée d'une façon ou d'une autre :

-Non, nous avions pris nos précautions. On a tous sauté en parachute depuis un pont ou le train passait.

À ma grande surprise, Azylis se met alors à sourire joyeusement.

-De mieux en mieux...

Puisqu'elle est de si bonne humeur et ne paraît pas m'en vouloir, autant tout dire d'un coup.

-J'ai été suivi à mon insu et j'ai dû sauter avec une passagère qui s'était infiltrée dans le wagon.

Azylis hausse un sourcil en cachant mal son sourire.

-Jolie ?

Je grimace.

-Là tu exagères ! À mon tour de poser les questions... Pourquoi es-tu de si bonne humeur alors qu'en temps normal tu m'aurais tué pour tous les risques que je viens de prendre ?

Azylis perd son sourire mais reste de bonne humeur.

-C'est justement ça. J'ai tellement de raisons de t'en vouloir que nous allons être quitte.

Cette fois-ci, je suis franchement inquiet. Avant que je ne puisse de nouveau interroger Azylis, la porte de la salle de téléportation s'ouvre et Aevin entre dans la pièce et traverse la salle à manger pour nous rejoindre dans le salon. Il se laisse tomber dans un canapé avec un soupir de joie et je me tourne vers lui.

-Aevin, tu peux me dire quelle bêtise Azylis a encore faite ?

Azylis intervient posément avec un sourire.

-Je n'ai jamais dit que c'était une bêtise... Juste quelque chose qui ne va pas te plaire.

Je grimace et Aevin éclate franchement de rire.

-Pas te plaire ! Oh ça non, ça ne risque pas en effet... Tu n'aimes pas les animaux Gabriel ?

De plus en plus inquiet, je réponds avec méfiance.

-Non mais je suis prêt à parier qu'Azylis a racheté un dragon. Mais vous savez, ça ne me dérange pas plus que ça...

Mais Aevin repart dans un nouvel éclat de rire tout sauf respectueux.

-Attends de LES voir et tu changeras vite d'avis !

Je sursaute comme si une guêpe m'avait piqué et demande pour avoir confirmation :

-LES ?...

Aevin en peut pas me répondre tant il se noie dans ses propres éclats de rire. Je constate d'une voix neutre :

-Ça commence à friser l'hystérie là...

Aevin parvient à me répondre avant de repartir dans son fou-rire.

-Dé... Désolé vieux. Mais j'ai besoin d'évacuer le stress du voyage le plus éprouvant que j'ai jamais fais.

-Vous êtes revenus comment ?

Cette fois-ci, Azylis daigne me répondre mais ce n'est pas de bon coeur.

-Heu... À dos de dragons. Sur ceux que j'ai acheté.

Aevin n'a jamais été un lâche... S'il a eut peur, c'est qu'il a eut de bonnes raisons. Je fixe Azylis droit dans les yeux.

-Bon, finissons-en avec cette conversation. Qu'est-ce-que c'est exactement tes dragons ? Combien en as tu ?

Elle avance deux droits et je pousse un soupir soulagé. Un instant, j'ai cru que nous en avions au moins une dizaine et qu'il faudrait que je m'en occupe au moins un peu... Mais Azylis lance un regard noir à Aevin toujours plié en deux de rire sur le canapé et il lui fait signe de prendre la parole. Elle s'exécute en évitant de me regarder.

-A vrai dire ce sont des... Des dragons de combat.

Je sens mon visage devenir plus pâle encore que d'habitude et me lève d'un bond de mon siège.

-C'est une blague rassure-moi ! Ils n'ont pas reçu l'entraînement ?

-Heu... Je crois bien que si.

-Et... Ils sont comment question caractère ?

La question ramène un sourire sur le visage d'Aevin qui s'était enfin calmé. Il me répond avec amusement.

-Infernal. Si tu avais entendu ma conversation télépathique avec l'un d'eux...

Je remarque au visage d'Azylis que de toute évidence elle n'avait pas prévu qu'Aevin discute avec le dragon. Je lève les yeux au ciel.

-Et, bien sûr, vous allez maintenant me dire qu'Aevin volait sur le plus calme des deux dragons...

-Heu oui c'est un peu ça pour être tout à fait exact.

Je dévisage Azylis avec une colère rentrée et hurle tout à coup :

-Je refuse que tu remontes une seule fois de plus sur ces dragons ! Je ne veux pas te perdre bêtement et...

Mais loin de s'énerver, elle se lève calmement.

-Tu ne refuses rien du tout ! Ce n'est absolument pas plus dangereux que de sauter d'un train en marche avec un parachute... Et une jolie demoiselle !

-Azylis !

-Qu'est ce que tu veux, tu m'obliges à sortir tous mes arguments.

Je jette un coup d'œil à Aevin et sens aussitôt que je n'aurais pas dû. De nouveau hilare, il me demande :

-C'est vrai ? Je veux dire, elle était jolie ?

Je lève les yeux au ciel et cela clôt la discussion. Je crois que j'ai perdu pour les dragons... Léger soupir.