Chapitre 1 + 2 : Décision.

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Une cellule psychologique. Un groupe d'entraide. Un groupe de partage. Ils peuvent bien trouver dix noms différents, je m'en ferai toujours la même idée.
Je suis tombé des nues quand Elly est venue me voir à mon bureau plus tôt dans la journée.

" - Liven ? Je pourrais te parler un instant ?
- Bien sûr. "

Je me lève et je la suis, elle a la démarche sérieuse et assurée de la femme d'affaire. La patronne. Je pense à de simples détails à régler au sujet du livre, mais je risque d'être surpris.
Elly est une très bonne patronne, et une femme ravissante. Grande, cheveux clairs, jambes interminables et vêtements sélectionnés avec goût. Elle ne porte pas beaucoup de maquillage mais elle n'en a pas besoin. Son côté naturel fait son charme.

Dans cette boîte, on est plutôt du genre à se tutoyer. À l'inverse de la plupart des américains, je ne déteste pas mon travail. Je m'y plais. Mes collègues sont charmants, mes patrons sont compréhensifs et le projet littéraire sur lequel on travaille est très intéressant. Tous les jours j'arrive à huit heures, je prends mon café avec mon équipe et ma journée se déroule toujours dans un ordre bien précis. J'aime ma routine.
Mais ce jour là, assis sur ce fauteuil noir très confortable en face du bureau d'Elly, je suis loin de me douter de ce qui m'attend en réalité.
Elle est appuyée contre le coin de son bureau, les bras croisés, m'observant comme si elle ne savait pas par où commencer. Cet air gêné sur son visage ne m'est pas très familier.

" Écoute Liven, tu fais du très bon travail et tout le monde t'apprécie ici. Mais il... "

J'arrête automatiquement d'écouter. Je me perds tout de suite dans mes pensées. Ce début de discours ressemble fort à un licenciement. Je n'essaye même pas de comprendre pourquoi me virer moi si je fais un si bon travail ? Je me jette sur les conclusions. Plus de travail signifie plus de salaire. Ce qui veut dire plus de voiture, ni d'appartement, ni de nourriture. Je commence à paniquer. Comment retrouver un travail rapidement ? Il faut absolument que je paie le prochain loyer ou alors j...

" - Liven ? Tu m'ecoutes ? Je..
- Je ne peux pas me permettre d'être licencié.
- Quoi ? Non ! Mais non enfin je ne vais pas te virer! "

Je pousse un soupir de soulagement. Pas viré. Salaire. Argent. Loyer. C'est bon.

" - Alors qu'est ce qu'il y a ?
- En fait...
- Ne tourne pas autour du pot. "

S'il y a bien quelque chose que je déteste, c'est ça. Je préfère qu'on aille droit au but, autrement j'ai tout le temps de me faire des films et je commence à paniquer.

" - On pense que tu as des problèmes. Je veux que tu intègres un groupe de partage.
- Qu... Quoi ?
- Je sais que ce n'est pas facile mais j...
- Non ! Quoi ? Pourquoi ? Pour quoi faire ? Quels genre de problèmes? "

En un rien de temps je me retrouve debout à faire de grands gestes menaçants. Je suis près d'elle, trop près. Si bien que je sens son parfum auquel je me suis accoutumé au fil des années. Les cloisons des bureaux sont en verre. Je sais de quoi ça peut avoir l'air depuis l'extérieur. Je ne veux pas que l'on me voit comme quelqu'un de colérique ou de menaçant. Je suis simplement dépité. Je finis par me rassoir calmement.

" - Calme toi tu veux ? On a tous remarqué les marques sur tes bras, ton cou, parfois même ton visage... Ta vie privée ne nous regarde pas mais...
- Exactement ! l'ai-je coupée. Ça ne vous regarde pas.
- C'est pour ça que je veux que tu intègres un groupe de partage.
- Hors de question.
- Ce n'est pas un choix Liven. Écoute, je suis désolée d'avoir à en arriver là, mais pour ton bien, je te demande d'y aller.
- Tu fais erreur Elly, je vais très bien. Je refuse d'aller voir ces gens, je n'ai rien à voir avec eux. Je vais BIEN.
- Ma décision est prise, tu ne me feras pas changer d'avis. Tu as la possibilité de choisir le groupe qui t'inspire le plus parmis ceux là, tu n'es pas obligé de rester au sein de ShadeCORP. "

Je la regarde se pencher sur son bureau pour attraper un dossier rempli de brochures en tous genres qu'elle me tend avec un sourire qui se veut rassurant. Je le feuillète brièvement d'un air mauvais. Pour la première fois depuis que je travaille chez S.CORP, je suis furieux contre elle. Elle n'a aucun droit de porter un jugement sur ma vie et d'insinuer je-ne-sais-quoi.
Après une brève réponse reflétant mon humeur, je regagne mon bureau en vitesse. J'ignorais que les employeurs avaient le droit de faire ça. De nous assigner à un groupe d'aide psychologique. Après quelques recherches sur Internet, il s'avère que si. Ca veut dire que je suis réellement obligé d'aller à un de ces groupes ? Pour y faire quoi ? Pendant combien de temps ? Est ce qu'il y aura une sorte de superviseur qui devra décider de tout ça ?

Je me sens complètement perdu. Perdu et trahi par quelqu'un que je pensais être une amie.
Puisqu'elle m'a accordé le reste de la journée -sûrement par compassion-, je sors prendre un café en bas de la rue. Je ne sais pas quoi penser de tout ça, l'air frais me fais du bien. Je réfléchis. Je ne peux pas démissionner, et je n'en ai pas envie.
Après une heure à rêvasser devant mon gobelet vide, je décide de commencer à regarder ces fameuses brochures plus en détail.

C'est irréel ! Sur certaines il est écrit que le programme dure un an ! Un an ! Il n'est pas envisageable une seule seconde que je passe un an dans je ne sais quel groupe ! Tout ça devient bien trop compliqué et trop sérieux. Je ne peux pas me permettre de passer des heures et des heures dans un hôpital ou je ne sais pas où. Après le boulot, je dois rentrer à l'appart. C'est comme ça, et je ne peux pas faire autrement.

Une seule brochure a paru sortir du lot. Le programme n'est pas trop accaparant. Deux heures le mardi, et deux heures le jeudi. Avec un peu de chance, Elly acceptera que je prenne ce groupe la, même si les horaires ne coïncident pas avec mes horaires de travail. On pourra peut être passer un marché, les heures que je ne ferai pas au bureau, je les compenserai en travail à la maison. C'est peut être faisable. Je ne me penche même pas sur les informations du programme en lui même, ça ne m'intéresse pas. Je ferai tout pour leur montrer que je n'ai pas ma place dans un groupe comme celui ci, point barre.

Je m'apprête à utiliser mon portable pour envoyer un mail à Elly au sujet de tout ça quand je remarque l'heure sur mon écran.

" Oh non, non, non ! "

Même en me dépêchant, je serai en retard à coup sûr... Il va se mettre en colère...

Honesty. (Larry / L.S)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant