Neverland ?

Chapitre 13 ✔️

Surprise d'avoir vu juste tout à l'heure dans la forêt, je me retournais et vis Lucas adossé contre un arbre, les bras croisés comme s'il attendait quelque chose. J'arquais un sourcil, me disant que les craquements de brindilles n'étaient pas une hallucination de ma part. Un problème en moins...

- Ahahah, merci mais là tu vois j'aimerais bien me doucher... je lui dis légèrement agacée par la situation.

- Rien ne t'en empêches, répliqua-t-il aussitôt l'air taquin.

Ses yeux marrons pétillaient et moi la seule chose que j'avais envie de faire c'était de décoller cette piteuse odeur de ma peau en fonçant sous la cascade. Mais pour cela il fallait qu'il s'en aille. Et tout de suite de préférence.

- Fiches le camp, Lucas, je lui dis en lui souriant faussement.

- Quoi ? Gabin a le droit de te prendre dans ses bras toutes les nuits et moi je n'ai même pas l'autorisation de t'observer.

- Non, pas quand je suis à moitié nue et que je m'apprête à l'être entièrement !

Lucas se mit à rire et partit en secouant la tête. Il ne dit rien de plus et je le vis disparaître peu à peu entre les arbres de la forêt.

Je me penchai un peu sur le côté pour vérifier que Lucas était bien parti. A priori personne...

J'enlevai mes derniers vêtements et sautai dans l'étendu d'eau. Je crois que je ne m'habituerais jamais à la fausse chaleur de cette eau. Le soleil a beau briller toute la journée sur cette eau, elle ne la réchauffe en rien !

J'avançai jusqu'à la cascade et laissai le torrent nettoyer mon corps. Et là, je me sens vraiment bien. L'eau a toujours été mon élément. Alors, je profite de ce moment laissant l'eau couler de la racine de mes cheveux, en passant par mon cou pour finir s'échouer sur le long de mes jambes. 

Je repassai une dernière fois mes cheveux bruns sous l'eau quand j'entendis une voix dans mon dos. Zut ! Sans prendre la peine de voir qui c'était, je me ratatinai le plus possible dans l'eau pour éviter que l'on ne me voit de trop. Si c'est Lucas, je l'étripe !

A ma grande surprise ce n'est pas lui, mais un autre garçon. Le garçon aux yeux verts... Ils se sont passés le mot aujourd'hui pour que je ne puisse pas avoir un moment à moi ? C'est aussi gênant qu'agaçant !

Peter était assis au bord de la rive précisément à quelques mètres de mes affaires. Sans grand étonnement, il continua de me fixer avec son sourire habituel, un brin moqueur.

- Depuis combien de temps tu es là au juste ? j'arrivai enfin à articuler.

- Depuis le début.

Je me mis à rougir. Depuis le début ? Alors... 

Je passai une main sur mon visage, morte de honte. Il m'a observé tout ce temps. Alors même au pays imaginaire, Peter Pan aime se rincer l'œil. Ça c'est un truc qu'on ne nous dit pas quand on lit le conte : au fait, Peter Pan c'est un voyeur. Non, à aucun moment c'est marqué dans le livre, à aucun moment on nous prévient. Pourtant ça aurait été plutôt pas mal et ça m'aurait évité ce genre de situation très gênante.

- Tu ne devrais pas avoir honte, tu es très belle, précisa Peter.

Je me renfermai sur moi même, décidée à ne pas lui faire de cadeau. Un compliment ne suffit pas ! Et encore mois quand c'est un mensonge... C'est humiliant.

- Tu vas te décider à partir pour que je puisse sortir et m'habiller ou tu comptes rester ? je dis sèchement.

- Je vais te laisser t'habiller, je t'ai déposé des affaires propres et tu me rejoindras à l'Arbre de la Réflexion. Nous devons parler... reprit-il d'un ton sévère.

J'acquiesçai d'un signe de tête et essorai mes cheveux en attendant que Peter s'en aille. Mais il n'avait pas l'air décidé et restait me fixer d'un air pensif, toujours assis. C'est une des premières fois où je ne le vois pas sourire et c'est surprenant de voir à quel point son visage change, il a l'air tellement plus naturel.

Je secoue la tête revenant à la réalité. Peter n'est pas quelqu'un de bien et c'est une façade, comme tout le reste ! Qui plus est, je commence à avoir froid et j'aimerais vraiment pouvoir me rhabiller.

- Tu te décides à partir ou ... ?

- Oui, oui. Je m'en vais, fit-il en secouant la tête.

Il se releva rapidement et partit en directement de l'Arbre de la Réflexion. Avant qu'il ne disparaisse dans l'obscurité de la jungle, j'aperçue son visage : son sourire mauvais était revenu et la haine que j'entretenais pour lui, aussi.

***

Cela faisait une demie heure que j'étais censée retrouver Peter mais j'avais fait exprès de prendre le plus de temps possible. Je ne voulais pas me laisser désirer, non, ce n'était pas mon objectif. Je voulais simplement qu'il se rende compte qu'il avait beau vouloir me voir ce serait quand moi je le voudrais bien. Parce que c'est lui qui a besoin de me parler et non l'inverse.

Oui, bon d'accord... Je me laisse un peu désirer ... !

Je m'avançai vers le grand arbre et vis Peter la mâchoire serrée. Il a l'air énervé et je crois que mon petit manège ne l'a pas amusé autant que moi. 

Une fois arrivée à son niveau, je lui souris de toutes mes dents, enfonçant le clou autant que je le pouvais. Cependant, ce que je n'avais pas prévu c'est que ses poings se serrent et que ses yeux me lancent des regards assassins. Je remballai aussitôt mon sourire et déglutis difficilement. Il s'approcha de moi rapidement et s'arrêta à quelques centimètres de moi. Le sentir si proche bloqua toute entrée d'air dans mes voies respiratoires.

- Est-ce que tu as oublié à qui tu t'adressais ? Je te rappelle que c'est moi qui commande ici. J'ai cru que j'allais devoir venir te chercher. Ce n'est pas parce que tu es la seule fille sur mon île que je vais t'attribuer un traitement de faveur. Ici, tout le monde à son rôle à jouer, tu m'entends !

Il m'avait balancé ces mots le plus sérieusement possible et cela en était déconcertant. Ses poings serrés, il resta me regarder droit dans les yeux. Il ne rajouta rien. Ce qui me parut suspect étant donné qu'il voulait me parler de quelque chose. Pourquoi était-il si furax contre moi. C'était si inattendu...

- J'ai eu tort, tu ne me sers à rien. Je devrais sûrement te renvoyer...

Depuis le temps que j'attends ça !

- Evidemment ton ami, Gabin, restera dans mes troupes, finit-il par préciser. Il m'est plus que serviable contrairement à toi... Après tout, tu es une fille, à quoi devais-je m'attendre. 

Je le regardais, incrédule. Il n'est pas question que je parte d'ici sans Gabin. C'est mon meilleur ami et je ne l'abandonnerais pas.

J'allais lui rétorquer que je n'étais pas d'accord mais il passa simplement sa main devant mon visage et je me sentie partir dans ce que je crois être un profond sommeil.

***

Je me réveille péniblement avec une violente douleur au  le bras droit. C'est moi, ou à chaque fois que je tombe dans les pommes, je me réveille avec un mal de quelque chose ?

Mes yeux s'adaptèrent rapidement à ce nouvel environnement qui n'était autre que la plage où je me réfugie quand je veux être seule. Je me demande bien ce que je fais là... Je suis bannie, c'est ça ?

Je me relève et observe les vagues qui se fracassent contre les rochers à ma gauche. Soudain au loin, j'aperçois sur la mer quelques chose de rouge. Je plisse les yeux et distingue un bateau rouge, resplendissant. Ce vaisseau a l'air énorme et il avance à une vitesse indescriptible. C'est quoi ça encore ?

Je avance vers la mer, timidement. L'eau m'arrive aux cuisses et trempe mon jean mais je m'en fiche. La curiosité l'emporte et l'espoir de pouvoir peut-être de se sortir de ce cauchemar. Je reste focalisée sur le bateau quand je sentis quelque chose percuter violemment ma tête. La seule chose qui me soit  venu à l'esprit avant de m'évanouir c'est : c'est quoi leur problème avec les pierres sur cette putain d'île !