Toujours aussi furieuse, j'arrivai à l'arbre quand je vis Peter assis sur une grosse pierre. Il semblait réfléchir. Tant pis s'il doit m'enfermer dans une des cages, au moins ce sera pour une bonne raison. Alors d'un coup et sans aucune retenue je m'approchai de lui et le giflai de toutes mes forces. Il n'a pas vu le coup venir pensant sûrement que j'étais là pour le remercier encore une fois et non pour le frapper comme je viens de le faire. Il leva alors les yeux vers moi, déconcerté par mon geste, tout en laissant sa main sur sa joue encore un peu rouge.
- Donc comme ça tu t'amuses à mutiler les plus jeunes ! Pas étonnant que je leur manque si tu profites de mon absence pour faire du mal aux autres. Tu ne vaux pas mieux que Crochet. La cicatrice que Edwin a au visage ressemble trait pour trait à celle que j'avais hier encore !
Je le dévisageai avec mépris, me rendant compte une fois de plus de la haine que je lui vouai. Il se leva brusquement et vint se placer à quelques centimètres de moi, la mâchoire serrée. Peter me surpassait de beaucoup mais je gardai la tête haute et toute la fierté qu'il me restait. Soudain, il me saisit violemment le poignet et le pressa de toutes ses forces entre ses doigts. Je ne saurais décrire la douleur que je ressens tellement elle est forte. Cependant, je ne proteste pas et fais mine de ne rien sentir, continuant de le défier du regard. Il n'est pas question que je lui montre mes faiblesses.
- Tu te crois plus maligne que tout le monde n'est-ce pas ? cracha-t-il. C'est bête, je le suis plus que toi. Ecoute, tu crois peut-être que ça m'amuse de jouer au même jeu que Crochet mais détrompe toi, c'est tout le contraire. Edwin devait apprendre à se battre. Il est jeune : on apprend plus vite. Je ne lui laisse pas plus d'indulgence que Crochet lui en laissera s'il lui met un couteau sous la gorge comme il l'a fait avec toi. La coupure qu'il a reçue n'est en rien de ma faute, ce sont les risques. Je commence sérieusement à regretter de t'avoir retrouvée...
- Il est jeune et toi tu lui apprends à se battre ? Mais qu'est-ce qui te passe par la tête ?
- Tu ne comprends pas ! Si Crochet revient à l'attaque, je veux que vous soyez capables de vous défendre. D'ailleurs, toi aussi tu devrais apprendre... Plus que n'importe qui, ici. Tu es perçue comme une proie facile.
Moi ? Apprendre à me battre... C'est une blague ? Je préfère mille fois l'efficacité d'une bombe lacrymogène.
Crochet et Peter ont un marché. Quel serait l'intérêt de le rompre ?
Alors que je me remémorai difficilement les semaines passées sur le Jolly Roger, je me souvins des paroles de Crochet. Celles qui me faisaient comprendre que j'appartenais entièrement à Peter.
- Pourquoi ai-je oublié mon nom ? je demandai en changeant de sujet.
- Ça fait trop longtemps que tu es là... m'expliqua-t-il. Tu es devenue une enfant perdue. Et maintenant tu n'y pourras plus rien. Tu es condamnée à rester sur cette île. Je suis la seule personne qu'il te reste. Si tu parvenais à te souvenir de ton nom, tu pourrais partir...
A la minute où il dit ces mots, il les regretta. Il n'aurait pas dû m'en parler et il le savait. Il baissa la tête et shoota dans une pierre non loin de lui. Il avait l'air si perturbé...Pour la première fois depuis que je le connaissais, je voulais le prendre dans mes bras pour qu'il réussisse à évacuer toutes ses tensions.
Je secouai vivement la tête. Non mais qu'est-ce que je raconte... Ça me fait juste de la peine quand les gens sont tristes. C'est tout...
- Ça tombe bien que tu sois là, je voulais te signaler que temps que tu n'auras pas appris à te battre convenablement, tu dormiras dans ma cabane. Crochet serait capable de lancer une deuxième offensive pour pouvoir te récupérer. Demain matin au lever du soleil, rejoins-moi au bord de la cascade, tu auras ton premier entrainement de défense. Ce n'est pas une proposition mais un ordre et ne t'amuses pas à me faire attendre.
A ces mots, il retrouva son sourire sournois et son ton hautin. Je le déteste, je le déteste de toutes mes entrailles. Je jure de retrouver mon nom et de me barrer de cet endroit quand la lune sera bleue et que les étoiles brilleront de mille feu dans le ciel.
***
Nous étions tous assis en rond autour du feu depuis quelques temps quand une quinzaine de garçons se levèrent au son de la flûte de Pan. Nous l'entendions tous. Même Gabin avait fini par entendre son bruit. Lui aussi a abandonné tout espoir, en tout cas c'est ce que j'ai compris quand il me fit une remarque cinglante sur la mélodie que jouait Peter. Je restai assise à côté du feu n'ayant rien prévu pour me couvrir. Me voyant grelotter, Lucas passa sa main autour mes épaules et me colla contre lui.
Je ne prêtai pas grande attention à son geste, j'étais bien trop occupée à réfléchir. Réfléchir par rapport à Crochet, à Peter Pan, à ce maudit pays... Quand j'y repense, je me rend compte que j'ai passé plus de temps à me faire torturer par Crochet qu'à essayer de vivre dans une jungle par mes propres moyens.
Sans que je m'en rende compte Peter avait arrêté de jouer et se dirigea vers moi. Je me redressai en attendant de savoir ce qu'il me voulait. Il fronçait les sourcils, la mâchoire serrée. Il semblait légèrement contrarié. Pourquoi à chaque fois qu'il vient me voir, on dirait qu'il a toujours quelque chose à me reprocher ?
Parce que c'est souvent le cas, Eve...!
Une fois arrivé devant moi, il me tendit simplement la main. Voyant, mon incompréhension il finit par dire sur le ton de l'exaspération.
- Viens, on rentre. Tu dois te reposer pour demain...
Lucas se tourna directement vers moi ainsi que Gabin.
- C'est quoi cette histoire ? dirent-ils en même temps.
Ah oui, c'est vrai... Je me retourne vers Gabin et lui explique que Peter trouve plus prudent que je reste quelques temps dans sa cabane au cas où que Crochet veuille revenir me chercher et qu'en plus demain matin Peter m'apprendrait à me battre. Du moins qu'il essayerait de m'apprendre.
Mes explications n'eurent pas eu l'air de faire mouche. Mes deux amis me servirent un tas de sermons comme quoi ça n'était pas une bonne idée, qu'eux aussi ils pouvaient me protéger, qu'ils ne voulaient pas que je passe plus de temps avec Peter et j'en passe des meilleurs.
Je ne voulais pas me prendre la tête avec eux alors je ne laissai pas de place au débat. J'attrapai la main de Peter et il m'emmena vers sa cabane sans lâcher les derniers doigts qui étaient près à glisser de sa poigne.
Une fois arrivée à sa cabane, il m'informa qu'il dormirait sur le siège dans le coin de la pièce et que je pouvais garder le lit. Je ne me sentais pas à l'aise de piquer pour la troisième fois son couchage. Je voulais lui demander s'il était sûr que cela ne le dérange pas que je squatte son lit mais je n'en trouvai pas la force. J'avais toujours aussi froid et je rêvais d'une grosse couette bien chaude. Malheureusement, il n'y a pas ça au pays imaginaire. Alors je tirai sur les draps blancs et réussis à trouver le sommeil en faisant abstraction du regard déconcertant que me lançait Peter.
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Neverland ?
FanfictionEve Powell est une jeune adolescente de 17 ans, des plus banales. Du moins, c'est ce qu'elle croyait avant d'être confrontée à plusieurs phénomènes qui entravèrent son quotidien. L'aventure ? Elle en avait toujours rêvé. L'adrénaline ? C'était pou...