Chapitre 53

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[...] Peter

J'étais obligé de la laisser partir... Elle devenait ingérable. Même moi, je ne lui arrivais pas à la cheville. C'était devenu l'ensorceleuse la plus puissante et la plus dangereuse des 1001 mondes réunis.

Je ne sais ni pourquoi ni comment, mais elle n'était pas arrivée au pays imaginaire par hasard. Je ne regretterais jamais de l'avoir rencontrée...J'ai connu des choses que je croyais ne jamais pouvoir connaître un jour. Eveline m'avait accepté tel que j'étais... Il est clair qu'au début, je ne faisais pas semblant, je la détestais vraiment. Une fille en plus ! Ça aurait servie à quoi dans un camp rempli de garçon à part peut-être à attiser les tensions au sein de la communauté que j'avais durement réunis.

Mais putain qu'est-ce que je l'ai aimé. Je l'aime toujours. Et je l'aimerais toujours parce que c'est comme ça. Mais je ne peux plus y penser, je ne dois plus y penser. Elle ne reviendra pas.

La dernière fois, quand elle a atteint son point de non-retour, c'était l'occasion rêvée : elle serait faible et épuisée, haletante. En gardant le contrôle c'est le seul moment où j'étais plus puissant qu'elle. Je sais bien que me servir du sexe contre Eveline alors qu'elle n'était pas elle-même était mal mais c'était le seul moyen de la faire redevenir celle qu'elle était même si ça voulait dire la perdre.

Je lui avais promis que je ne pourrais jamais être égoïste avec elle... Pourtant qu'est-ce qu'elle me manque... Plus personne ne me contredit au pays imaginaire. Crochet est mort, les sirènes ont fuis, les enfants perdus font leur deuil et les indiens sont tous morts après qu'un virus d'origine inconnu ait eu raison d'eux. Eve a toujours plaidé son innocence mais je savais que c'était elle. Ça ne pouvait être qu'elle. Même moi je n'étais pas si cruel pour faire ça. Un peuple entier. Ce n'était pas un simple meurtre mais un génocide. Femmes, enfants, vieillards, ils y sont tous passés et je n'ai rien pus faire. Qui aurait cru que moi, Peter Pan grand souverain sur Neverland aurait eu des regrets et de la pitié...

Je me souviens de ses premières crises... Ses cauchemars où elle venait se lover tout contre moi. C'est à ce moment que j'ai vraiment commencé à me rendre compte l'effet qu'elle me faisait. C'est tellement cliché quand on y repense...

Je restai assis, fixant le torrent d'eau essayant d'imaginer les courbes d'Eve plonger sous l'eau de la cascade. Je la vois encore tirer sur ses cheveux rebelles comme au premier jour. Ce jour où elle n'était que Eve, et non Eveline l'ensorceleuse. Je me souviens encore la manière qu'elle avait d'essorer ses cheveux puis de se planquer rapidement dans l'eau me remarquant enfin assis sur la rive à l'observer sans fin.

Je ne peux pas m'empêcher de sourire en repensant à ces petits moments...Même si nous n'étions pas encore dans la pleine assumassions de nos sentiments respectifs. C'était une belle époque... Ces moments où elle me prenait la tête. Souvent pour rien. J'ai encore envie de l'entendre râler quand j'essaye de la taquiner. J'ai envie d'entendre son rire quand je l'éclabousse.

Mais maintenant c'est fini... Je ne la reverrai plus jamais...

***

[...] Eve

Gabin était resté silencieux tout le long du trajet sans même essayer de savoir ce qu'il s'était passé entre Julian et moi. Je crois qu'il a peur de découvrir la vérité. Ou qu'il ne veut tout simplement pas savoir.

Moi aussi j'ai peur mais maintenant que je sais que c'est réel, je n'ai plus le choix. Je dois me rendre à l'évidence... Maintenant, ce que je dois comprendre c'est ce que je suis capable de faire et qui et pourquoi m'a-t-on effacé la mémoire...

Mais j'ai ma petite idée là-dessus... Ce fameux Peter ne doit pas être étranger à tous ces changements de vie. Il faut simplement que je le trouve. Lui saura ce qu'il se passe.

Mon premier réflexe est alors de déverrouiller mon téléphone et de faire défiler mes contacts. Après tout, nous avions peut-être échangé nos numéros.

Je fais défiler les noms sur mon téléphone et aucun Peter ni aucun surnom potentiel d'être suspect. Non, ça aurait été trop facile de simplement le retrouver dans mon répertoire.

Je parcourrai le reste de mon téléphone, blasée. Aucun changement... J'ouvris ma galerie par simple curiosité et découvris un nouveau dossier.

Qu'est-ce que c'est encore ça ?

Une lueur d'espoir me traversa ... Et si...?

Je fis défiler les quelques photos qui constituaient ce dossier. C'est bizarre quand même... Elles datent toutes du 16 octobre ou du 17 au matin... La plupart de la soirée plutôt arrosée sauf une qui datait du 17 vers 11heures... La dernière prise sur mon téléphone avant ma disparition. On pouvait voir un garçon châtain sûrement plus âgé que moi fourrer sa tête dans mon cou. On ne voyait qu'à moitié son visage mais vu mon sourire rayonnant ça ne pouvait être que ce fameux Peter...Alors c'est à ça qu'il ressemblait... Ses yeux étaient fermés mais son sourire en disant long sur ce qu'il ressentait. C'est une très belle photo...Mais ses vêtements... Ça me gêne... On dirait qu'il sort d'un de ces films d'aventure où les héros ont des vêtements qui vont avec l'environnement. C'est...Spécial ?

Ce fut Gabin qui me sortit de mes pensées. Apparemment nous étions arrivés chez moi. Je fixai les planches brunes de ma maison. J'avais tellement l'impression de ne pas l'avoir quitté... J'ai vécu dans cette maison toute ma vie... Du moins jusqu'à maintenant...

D'ailleurs où avais-je bien pu passer ces cinquante derniers jours. Est-ce que j'étais restée sur le sol américain ? Peut-être même pas... Certes ce serait étrange mais en ce moment je pense que '' étrange'' ne serait pas si invraisemblable que ça. Après tout ce qu'il m'était arrivé...

Je tournai finalement la tête vers Gabin qui m'observait pensif. Il ne devait pas reconnaître la fille qu'il a laissé au Harry's. Je tapai nerveusement sur mes genoux, me pinçant légèrement les lèvres. Je ne savais pas trop quoi faire. Je sors de la voiture ou j'essaye de lui faire la conversation pour paraître moins impoli ? Je ne sais pas pourquoi mais je ne savais pas comment réagir ou comment me comporter avec Gabin. C'était devenu différent...

J'allais ouvrir la bouche mais mon ami éloigna ma tentative d'un geste de la main. Il simula un sourire avant de tirer sur mon bras pour que je vienne me lover dans ses bras. Il déposa un long baiser sur mon crâne avant de dire.

« Je sais, je sais... Va découvrir qui est ce mec...Tu m'appelles dès que tu as du nouveau ! »

Je hochai la tête, contente qu'il comprenne. Je déposai à mon tour un furtif smack sur sa joue et sortis de la voiture.

Maintenant au travail.

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