Teratsu avait déjà dépassé son zénith lorsqu'ils décidèrent de s'arrêter dans une clairière pour se restaurer. Ayma et Caân s'assirent sur l'herbe et disposèrent sur une couverture quelques unes des victuailles préparées par Cymaïa. Maël était resté debout à quelques pas d'eux et observait les environs avec attention. Caân lui cria de venir les rejoindre mais Maël préféra rester à l'écart. Il s'adossa contre un arbre au large tronc et sortit de son sac un bout de pain dur qu'il commença à mâcher. Caân s'approcha du jeune homme et lui tendit du pain frais ainsi qu'un morceau de fromage. Maël lui lança alors un regard très froid et lui dit :
« Je n'ai pas besoin que l'on me fasse la charité.
- Ce n'est pas de la charité, ni même de la pitié, rétorqua Caân. Nous voyageons ensemble sur des routes incertaines. Nous ne sommes jamais partis aussi loin de chez nous, alors nous devons nous entraider et nous serrer les coudes. Cela veut dire mettre en commun nos ressources et partager nos talents ! Je suis certain que tes dons nous seront très utiles, alors accepte cette nourriture... Tu n'as qu'à voir ça comme ma propre contribution, et également celle d'Ayma. »
Quand Caân mettait tout son charme dans ses paroles, il était très difficile de s'opposer à son raisonnement. Une énergie rassurante se dégageait de toute sa personne, le regarder et l'écouter donnait l'impression de se glisser dans un bon bain chaud : on pouvait presque sentir chaque muscle se détendre. Maël ne fit pas exception à la règle. Son regard alla du sourire de son ami à la nourriture au creux de sa main tendue et il accepta ce que Caân lui donnait.
« Merci, murmura-t-il comme s'il n'avait pas l'habitude de prononcer ce mot. Après avoir mangé, reposez-vous un peu pendant que j'irai chasser. Je suis un disciple de Chacëor, ajouta-t-il après quelques secondes de réflexion, je vais vous ramener un peu de viande ! »
Ayma, qui s'était avancée au moment où Maël avait accepté les vivres de son cousin, proposa de l'accompagner et de l'aider à trouver du gibier.
« Non, ce n'est pas la peine, tu vas me ralentir, rétorqua celui-ci. Et puis, considérez que c'est ma propre contribution à notre groupe, ajouta-t-il avec un sourire malicieux. »
Alors que Maël prononçait ces paroles, un cavalier passa au galop sur le chemin à quelques mètres d'eux. Il ne les vit pas mais Ayma, elle, remarqua la belle robe argentée du cheval, éclatante sous la lumière du jour. L'homme portait une cape marron avec une capuche qui lui masquait une grande partie du visage. Il semblait pressé car il ne ménageait guère sa monture. Ayma ne put s'empêcher de penser que le trajet serait plus agréable et plus rapide s'ils avaient eu des chevaux à leur disposition.
Elle se souvint des balades à dos de poney qu'elle avait faites avec son oncle Ojas quand elle était enfant. Une légère nostalgie vint lui serrer la gorge... elle soupira. Son regard fut attiré par les deux t'chamas qui faisaient la sieste à côté d'elle, offrant leur ventre rebondi aux rayons de Teratsu. Elle s'allongea à son tour, ferma les yeux et se laissa envelopper par la chaleur de la mi-journée.
Quelques heures plus tard, après une bonne après-midi de marche, les trois compagnons s'installaient pour la nuit au bord d'une source. Après avoir ramassé de petits morceaux de bois secs et des brindilles, Maël montra à ses deux camarades comment allumer un feu. Les flammes, timides, prirent progressivement de l'ampleur et leurs reflets se mirent à danser sur les visages satisfaits des adolescents. Ils entreprirent alors de faire cuire la viande que Maël avait rapportée de sa chasse. Le repas qui suivit fut nappé de silence... Seul le crépitement du feu se faisait entendre. Ayma sentait le regard de Maël se poser sur elle de temps en temps, mais dès qu'elle levait les yeux, celui-ci détournait les siens. La jeune fille était bien trop épuisée pour réfléchir à l'attitude étrange de son compagnon de route. Elle posa la tête sur l'épaule de son cousin et sombra presque aussitôt dans un profond sommeil...
Au même moment, à quelques dizaines de lieues de l'endroit où campaient les trois jeunes gens, le cavalier à la monture grise s'arrêtait devant une auberge située à l'entrée d'un village. Il laissa son cheval s'abreuver et s'introduisit à l'intérieur de la bâtisse. Dans la salle principale, des voyageurs étaient réunis autour d'une longue table en bois. Ils buvaient, trinquaient, se faisaient passer des plats dans lesquels de la viande flottait dans d'épaisses sauces, riaient, s'interpellaient bruyamment et trinquaient encore... Le nouveau venu traversa la salle d'un pas rapide sans prendre le temps d'abaisser sa capuche. Il alla frapper à une porte qui se trouvait sous un escalier. Sans attendre d'invitation, il tourna la poignée argentée et pénétra dans la pièce, refermant derrière lui. Dans l'obscurité, seule la petite poignée ronde brillait... en son centre étaient gravées deux colonnes en ruine.
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Com Plëa - La légende de P. *En Pause*
FantasyLe royaume de Com Plëa est une terre aimée des dieux... Mais si les divinités ont longtemps parcouru ses côtes rieuses et ses forêts mystérieuses, elles se sont finalement retirées de ce monde (enfin... c'est ce que pensent les hommes). Tous les ha...