Devant Ayma à plusieurs dizaines de mètres, la cible immobile, que Maël avait accrochée à l'arbre, semblait la mettre au défi de l'atteindre. La jeune fille inspira profondément et ferma les yeux afin de mieux se concentrer : elle ne ressentait aucun souffle d'air sur la peau nue de ses bras, le vent ne dévierait donc pas sa flèche. Elle avait bandé avec difficulté le bel arc noir de son ami, pourtant ses mains ne tremblaient pas. Elle ouvrit les yeux, décocha sa flèche... et manqua la cible d'un bon mètre.
Maël fut très étonné de constater qu'elle restait calme et concentrée malgré son échec. Il avait placé la cible de telle sorte qu'Ayma ne puisse la toucher. Aucun novice au tir à l'arc n'en serait capable ! Son dessein était de la décourager afin qu'elle abandonne l'idée téméraire qu'elle avait eue quelques jours auparavant : Maël savait bien qu'elle voulait apprendre à tirer pour se battre et non pour l'aider à chasser. L'imaginer dans la mêlée d'une bataille lui donnait des sueurs froides... Il était assez fort, grâce aux dieux, pour la protéger... pour les protéger tous.
La jeune fille fixa de nouveau son attention sur la cible. Elle avait bandé l'arc d'un geste sûr et elle visualisait la pointe de son projectile en train de s'enfoncer dans l'arbre. Elle se sentait parfaitement sereine et détachée. Elle tira... et la flèche se planta au centre du tissu. Elle avait réussi ! Des frissons d'excitation lui parcoururent le corps et elle se mit à crier victoire tout en effectuant une sorte de danse tribale.
Maël resta sans voix quelques secondes avant de se ressaisir et de lui intimer l'ordre d'être plus discrète :
« Arrête de hurler ! Imagine que nos ennemis soient à proximité, ils n'auront qu'à suivre tes cris hystériques pour nous tomber dessus !
- Tout d'abord, ce ne sont pas des cris hystériques mais des cris de victoire, répondit la jeune fille. Et puis, arrête de t'inquiéter ! Cela fait plusieurs jours que nous longeons la route, tout en restant à une distance respectable, et que nous suivons à la lettre toutes tes consignes de prudence. J'ai l'impression d'avoir à peine le droit de respirer, lui reprocha-t-elle. Et nous ne sommes même pas certains que « nos ennemis » nous poursuivent. »
Après de nombreuses heures de discussions vaines à propos de l'attaque nocturne et de l'identité de leurs agresseurs, ils avaient décidé d'un commun accord de les baptiser « ennemis ». Néanmoins, Ayma et Caân supportaient mal la vie austère que leur imposait Maël. Ils n'avaient le droit de faire du feu que durant la journée et au lieu d'avancer sur la route, ils traçaient leur propre chemin dans les broussailles épaisses de la forêt. Maël, quant à lui, avait l'air sans cesse sur le qui vive, prêt à se défendre, ou plutôt à attaquer.
Le jeune homme passa la main dans sa chevelure sombre et regarda son amie d'un air dubitatif. Mais comment avait-elle pu réussir, dès son second essai, un tir aussi difficile ? La jeune fille l'observait, un large sourire s'épanouissant sur ses lèvres. Maël haussa les épaules et lui demanda de recommencer. Il pensait qu'elle avait eu beaucoup de chance et que le hasard avait joué un grand rôle dans sa réussite. Ayma s'exécuta, bien décidée à lui prouver ce dont elle était capable.
Une dizaine de tirs réussis plus tard, Maël dut se rendre à l'évidence : Ayma était naturellement douée... bien plus talentueuse que la plupart des archers qu'il connaissait. Il regarda la jeune fille ranger les flèches dans le carquois. Son visage affichait une expression satisfaite. Elle lui tendit son arc mais le jeune homme refusa de le reprendre. Il lui dit qu'elle avait gagné le droit de le porter et de s'en servir. De joie, Ayma lui sauta au cou afin de le remercier. Leurs regards se croisèrent tandis qu'ils étaient l'un contre l'autre, la gêne alors les fit s'éloigner l'un de l'autre assez rapidement.
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Com Plëa - La légende de P. *En Pause*
ФэнтезиLe royaume de Com Plëa est une terre aimée des dieux... Mais si les divinités ont longtemps parcouru ses côtes rieuses et ses forêts mystérieuses, elles se sont finalement retirées de ce monde (enfin... c'est ce que pensent les hommes). Tous les ha...