au coin des yeux, tu ne verras point mes larmes - t'es morte

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« la douleur ne disparaîtra pas tant que le vide restera »

« la douleur ne disparaîtra pas tant que le vide restera »

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Le vent dans mes cheveux me donne la chair de poule.
     Je frissonne, les yeux rivés sur la pierre tombale en granite blanc. Des roses blanches couvrent la tombe. J'avale difficilement ma salive, repensant à elle comme je le fais tous les jours depuis bien longtemps.
Je ne comprendrais jamais l'amour. Je ne comprendrais jamais comment l'amour a pu la rendre dingue à en mourir.
Aucune larme ne coule cette fois, pas encore. Le froid m'a surprise quand je suis sortie de la maison. Il fait froid, l'hiver commence à s'installer et Dieu sait à quel point l'hiver est rude à New-York.
     Cependant, cette fois, j'ai l'impression que cette saison est morte. J'ai l'impression que la vie est morte, c'est différent, ce n'est plus ma saison préférée.
Je pose une rose rouge sur sa tombe. Je suis seule et parfois la solitude est agréable. Quand je regarde sa tombe, je pense à tout et en même temps au fait que je ne connaissais pas ma sœur, elle était un véritable point d'interrogation.
Pourquoi a-t-elle agit ainsi ? Pourquoi a-t-elle écouté son cœur plutôt que la raison ? Si elle avait écouté la raison, elle ne serait pas morte. Je ne comprendrais jamais ce qui a pu la pousser à se sacrifier au point de perdre toutes les personnes autour d'elle, au point de perdre sa famille.
Mes amis disent que la douleur partira avec le temps. À vrai dire, je suis en colère. J'espère que cette dernière s'en aille, c'est ça que je veux. La douleur peut rester si elle veut mais la colère, je veux qu'elle s'en aille.
Les autres me regardent de travers, comme si j'étais un monstre, comme si j'étais aussi détraquée que ma sœur. Parce que c'est ce qu'elle était, détraquée. Il y a des trucs que je ne comprends pas, que personne ne comprend. Maintenant, les gens nous pointent du doigt. Soit ils nous aiment et éprouvent de la compassion pour nous, soit ils se méfient et nous détestent.
Mais ce n'est pas ma faute, c'est la faute d'aucun d'entre nous. Ma sœur a fait ses propres choix, ces derniers l'ont mené tout droit à une issue fatale.
Pourquoi il a fallu que tout cela se passe ainsi ? Pourquoi tout s'est déroulé aussi mal ? Je ne comprends pas, je ne comprendrais jamais.
Je secoue la tête de droite à gauche parce qu'après cinq mois, je suis en colère, je suis dans l'incompréhension totale.
Je regarde au loin, essayant de trouver le réconfort dans les buildings de cette grande ville. Tout m'étouffe, tout est si oppressant depuis qu'elle est partie. Je ne l'ai pas reconnu, je l'ai perdu comme nous l'avons tous perdu quand tout a changé. Elle s'est oubliée, elle a oublié sa vie pour se focaliser sur l'amour. Mais c'était quoi son amour ?
Comment a-t-elle pu éprouver de l'amour pour cette personne ? Pour ce véritable monstre ?
Même si la vie a repris son court, personne n'a oublié. Il a laissé une empreinte dans cette ville, il a marqué cette ville à jamais et a emporté dans sa tombe ma grande-sœur.
Je secoue la tête de droite à gauche avant de partir, serrant les dents. Je n'oublierai pas, je n'oublierai jamais. Ma sœur prétendait que l'amour était la base de tout, qu'elle ferait n'importe quoi pour l'amour.
Au point de mourir ? Jusqu'à ce point.
Quand je rentre chez moi, je retire mes chaussures, lentement, perdue dans mes pensées. Je monte directement à l'étage, me réfugier ou peut-être me perdre, dans sa chambre. J'ai besoin de rester en contact avec elle. Rien n'a bougé depuis qu'elle n'est plus des nôtres. La femme de ménage continue de faire le ménage, sans un mot. Une fois, je l'ai surprise en train de pleurer. Et puis, comme si nous allions mettre ses affaires au grenier, nous avons presque quinze chambres dans cette immense maison.
Malgré le fait que maman n'ait rien voulu changer, ma sœur s'en était déjà chargée. Un soir, lorsque nous dormions, elle a arraché des morceaux de tapisserie de sa chambre en criant. Je me souviens qu'elle nous a tous réveillés et que nous avions du la calmer en la prenant dans nos bras.
Tout ça par amour.
Sa chambre m'est glaciale à présent, il n'y a plus rien de chaleureux. Tout est mort, comme elle. Tout est mort. Il y a encore ses affaires d'école sur son bureau, un livre de maths ouvert sur des exercices quelconques. Rien n'a absolument bougé, maman a souhaité que tout reste en place.
J'ai envie de tout renverser tellement je suis en colère. J'ai envie de tout détruire comme elle nous a détruit durant ses dernières semaines de vie. J'aimerais qu'elle puisse me voir une dernière fois pour qu'elle s'aperçoive de l'état dans lequel elle m'a plongée. Ça me fout la haine de savoir qu'elle est partie à cause de quelqu'un de monstrueux.
C'est un véritable monstre, je n'ai pas les mots. Il a provoqué le chaos, la terreur chez toutes les personnes de cette ville. Il avait le contrôle sur tout, tout ce qu'il touchait était empreint de noirceur et ma sœur était le cœur de cette obscurité. Ce n'est pas ses actions ou la conséquence de ses actes qui ont entraîné cette noirceur mais c'est ma sœur. Ils auront beau dire ce qu'ils veulent, elle était son cœur noir.
Quand je m'effondre par terre, la tête à même le sol contre le parquet en bois sombre, je remarque quelque chose que je n'avais jamais vu avant.
La latte du plancher en dessous de l'un de ses meubles se détachent des autres. Je fronce les sourcils, sur le point de craquer. Je colle ma joue contre le parquet et retire la latte des autres, laissant apparaître une cachette secrète, comme dans les films.
Fronçant les sourcils, je tombe sur un objet dont je ne connaissais pas la moindre existence. La couverture ainsi que la reliure est abîmée, le journal est aussi noir que la couleur de l'âme du monstre. Des feuilles sont coincées entre les pages, le journal étant rempli à craquer. Je jette un léger coup d'œil au carnet, découvrant l'écriture de ma sœur.
J'essaie de ne pas paniquer. Je remets tout en ordre en emportant le carnet avec moi, comme si je n'étais jamais venue dans la chambre de ma défunte sœur.
Je verrouille la porte de ma chambre derrière moi et me jette sur mon lit, les sourcils froncés. Je sais que cela ne se fait pas de lire le journal intime de quelqu'un mais elle ne pourra pas m'en vouloir.
     Une personne morte ne peut en vouloir à personne. Ironique quand on connaît sa fin tragique et toute la haine qu'elle portait au monde entier.
De plus, la première page m'est dédiée.
C'est à ce moment que je craque et que je plaque une main contre les lèvres, les larmes débordant dans le coin de mes yeux.

psychotic loveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant