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Ce soire encore, on sort en douce pour aller voir ''les méchants''. Au programme, l'arrestation d'un dealer de drogue, qui n'a qu'un paquet de drogue et qui tue ses acheteurs pour récupérer l'argent et sa drogue. Ce n'est pas un gros coup mais l'homme semble avoir un don pour échapper à la police et ne laisser aucunes traces derrière lui. Il ne se cache pas et c'est ce qui fait que la police ne letrouve pas. Parce que parfois ne pas se cacher est le meilleur moyen de passer inaperçu. Le feu des projecteurs est parfois une meilleure cachette que l'obscurité des coulisses.
On se perche sur un immeuble, c'est ici que tout les morts sont retrouvés, mais apparemment ils sont déplacés et amenés ici après. Comme nous n'avons qu'une piste à suivre pour les lieux de vente, on a décidé que Hellen resterait là, parce qu'elle est meilleure que moi au sniper et que je jouerais le client. Hellen m'a obligé à enfiler un gilet par balles en acier parce qu'elle avait peur que je ne puisse pas me sauver à temps. Ce qui, bien sûr, fut la source de notre premier désaccord. J'étais beaucoup plus rapide qu'elle ne le pensait. Et puis le gilet me gênerait si j'avais besoin de décoller en urgence. Mais finalement, je cédais, parce que ça la rassurait et que la savoir inquiète me stressais et me déconcentrais.
Je marche donc dans les rues, seul et à la recherche du vendeur. Soudain, sur une petite place, je trouve celui qui pourrait être l'homme de la situation. Alors je m'approche pour écouter sa conversation avec un autre homme. Les deux partent côte à côte, comme de vieux amis vers le quartier sud, vers l'immeuble de Hellen. Je me cache dans l'ombre pour m'y abriter puis je deviens l'ombre, je suis habillé de noir et je peux voir ce que personne d'autre ne peut voir alors où que je sois, je suis indiscernable. Le dealer sort un sachet bleu de sa poche. L'autre sort une liasse de billets. Il compte et donne au dealer, qui sort une arme. Je passe à l'action au moment où l'autre homme s'aperçoit qu'il est menacé. Je fauche les jambes du dealers, qui tire deux fois en l'air. L'autre homme, apeuré s'enfuie en laissant sa drogue sur place. Un combat s'en suit alors. Les coups pleuvent mais aucun me m'atteint. Je trouve le temps du dealer et abats deux fois ma main. Il tombe, sans vie. Mon travail de tueur est accompli. Tout excellent combattant se doit de percevoir le temps de son adversaire. Le temps prend en compte le rythme auquel la personne se déplace, la cadence de ses attaques, la puissance des coups et l'efficacité des défenses. Une fois que l'on trouve le temps, c'est comme si l'homme contre qui vous vous battiez bougeait au ralenti. Un coup bien ajusté et c'est bon. Un excellent combattant a un temps pour chaque paramètre. Par conséquent, s'il se bat contre un adversaire de son niveau, le combat peut durer des heures. Bref fin de l'exposé. Je retourne auprès de Hellen qui a déjà le téléphone à l'oreille. Elle module sa voix pour faire croire à de la panique et y arrive tellement bien qu'un instant je crois qu'elle ne m'a pas vu et qu'elle panique réellement. Mais elle me fait un clin d'œil.
On retourne aux motos pour rentrer mais soudain, je perçois, comme étouffé, des gémissements de douleur. Je regarde Hellen qui n'a rien entendu et le lui dit. On part tout les deux en courant vers la provenance des cris. C'est un petit garçon, aux pieds de sa mère, étendue sur le trottoir, sans vie. En nous voyant arriver, ses pleurs se tarissent et il arrête de bouger. Je fronce les sourcils sans comprendre puis me souviens que nous sommes vus comme des héros par les enfants. Mais est-ce que nous le sommes vraiment ?

Deux silhouettes sortent de l'ombre. La première est large d'épaule, grande et imposante, deux ailes de métal se mouvant en silence dans son dos. Son visage est invisible sous la grande capuche derrière laquelle il s'abrite. La seconde est plus petite, plus fine et ses gestes sont plus furtifs, félins. Tous deux font preuve d'une puissance et d'une élégance peu commune. Leur souplesse gomme leur différence de poids, ce qui donne l'impression qu'ils ne sont qu'une seule et même personne. Ils ne semblent pas être gênés par le noir. Le noir et le silence sont sources d'angoisse pour tout le monde. Mais eux, ils semblent en faire partie. Tels des enfants de la nuit.

Cette nuit, ils ont aidé ce petit garçon qui jamais ne saura effacer de sa mémoire l'étreinte maternelle de la femme qui l'a prit dans ses bras, ni la voix grave et rassurante de l'ange qui l'accompagnait.

Cette nuit, ils ont été le premier réconfort d'une enfance brisée.

Cette nuit, un petit garçon vient de trouver sa vocation. Faire le bien.

Comme l'Ange.

Comme la Justicière.

*

Le hurlement strident du réveil me fait grogner et un petit rire se fait entendre. J'ouvre les yeux et vois Hellen juste à côté de moi.

- Tu as l'air d'un chien en colère à cause de ce réveil.

- Quel compliment ! Dis-je, sarcastique.

Elle sourit, me donne une tape sur le bras, que je m'empresse de lui rendre. Elle grimace et je devine que je n'ai pas bien dosé ma force. Je m'excuse mais elle éclate de rire et s'enfuie dans sa chambre lorsqu'elle voit que je fronce les sourcils. Elle sait que c'est de mauvaise augure, pour elle. Elle est chatouilleuse comme pas possible.
Je me lève et vais prendre ma douche. Je choisis un pull bleu marin. Un jean gris clair et des chaussures noires. J'enfonce une casquette noire à visière droite sur mes oreilles et attrape mon sac. Je descends les escaliers, et rattrape Matt, qui a fêté ses sept ans il n'y a pas longtemps, qui allait tomber dans les escaliers, assis en équilibre sur la rambarde. Il rigole et tape dans ma casquette, ce qui la fait décoller. Par simple réflexe, je me ramasse sur moi-même pour bondir, la rattrape en vol et la remets à sa place. Puis je fais mine de le pousser dans le vide et il pousse un petit cri. On arrive en bas en même temps que Hellen, qui est passée par l'autre escalier.

*

En cours, je m'installe toujours à la même place mais cette fois à mes côtés, il y a quelqu'un. La bande de Hellen m'a accepté comme l'un des leurs et je ne suis plus jamais seul, ce qui favorise les contacts avec Hellen et donc mon rôle. La prof dépose son sac, fait l'appel et au moment où elle dit mon prénom, le frère de James s'exclame :

- Oh c'est bien ! Toutou reconnaît son nom !

La prof le vire mais le mal est fait. Je fronce les sourcils parce que ça faisait longtemps que je n'avais pas eu droit à ses petites piques.

La matinée se passe super bien, parce que pour, je cite : "racisme envers une personne différente",le frère de James à été retenu toutes les heures du matin. Mais lorsque l'entraînement de cross arrive, et que je vois qu'il est là, je sens que ça va mal se passer. Tous les garçons du groupe font partie de l'équipe donc je ne serais pas seul mais je sais que ça me bouffe de l'intérieur toutes ces insultes. Je ne suis pourtant pas un sensible mentalement mais je crois que ma - enfin mes mutation est mon point le plus faible. Je vais devoir m'entraîner là-dessus si je ne veux pas me laisser submerger.

Un des gars de l'équipe adverse lance la balle mais je tends ma crosse et l'intercepte pour marquer. Un viva monte des gradins mais un cri étouffe les bravos.

- C'est bien mon chien !

C'est ainsi que pendant près d'une heure, à chaque fois que je faisais quelque chose j'avais une petite remarque en prime. Jusqu'à ce que le coach le vire.

*

Lorsque le soir, les Doris demandent comment s'est passée la journée, je fronce les sourcils vers Hellen pour ne pas qu'elle explique les critiques. Je ne veux pas qu'ils pensent que ça me fait du mal et que je veuille tout arrêter. Même si c'est vrai. Mais je veux rester, pour Hellen, pour nos virées le soir et pour la bande qui est tellement sympa avec moi. J'avais peur de ne pas y parvenir, mais j'ai réussi à reconstruire un semblant d'existence normal avec cette famille.

Hellen hausse les sourcils mais ne dit rien. Ce n'est qu'une fois couchée à côté de moi elle me demande des explications mais je n'arrive pas à expliquer. Comment pourrais-je lui expliquer quelque chose que je ne suis même pas capable de comprendre moi-même ?

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Et voilà ! La suite demain !

H.

Homme-LoupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant