J'ouvre les yeux et reprends brutalement ma respiration. Pendant un instant, je cherche mes repères, je ne sais plus rien puis la chute me revient en mémoire. Finalement cette chute de quatre étages et l'option amortisseur de choc de mon corps ne m'ont pas tué et si moi je ne suis pas mort, Hellen non plus puisqu'elle était au dessus de moi et qu'elle doit m'avoir cassé toutes les côtes. Ce qui, en soit, n'est pas vraiment un problème puisque je possède une régénération très rapide. La régénération combinée de toutes les espèces qui m'ont donné de leur code génétique. Je m'aperçois que l'on est au souterrain de l'entrepôt. Hellen est en train de pianoter sur une des tables électroniques, si j'en déduis sa respiration. Je tente de bouger mais c'est comme si j'avais du plomb liquide dans les veines. Je fronce les sourcils devant cette incapacité et me force à, au moins, tourner la tête. Ce faisant, ma nuque craque durement, me tirant une grimace. Je suis attaché par les poignets et par les chevilles. Une large lanière de cuir me ceinture la taille, le torse et les genoux. Je secoue mes sangles ce qui n'eut qu'un seul effet, celui de faire un bruit terrible. Hellen relève la tête et sourit. Mais jamais il ne lui vint à l'idée de m'aider. Alors je cesse de me débattre d'un coup. Elle se retourne, peut-être pour vérifier que je ne suis pas mort... Les lames de métal de mes ailes m'entaillent le dos et je sens mes muscles se tendre dans l'intense effort que je fournis pour me libérer. J'ai soudain une idée. J'arque le dos autant que me le permet la lanière et libère la lame supérieure de mon aile gauche. Je la glisse entre la sangle et mon poignet puis tire un grand coup. La sangle lâche brusquement et la lame s'enfonce dans ma hanche. J'ignore la douleur qui fuse, implacable, et me sers de ma main libérée pour détacher les sangles de mon torse et de mon ventre puis les genoux, les chevilles et le dernier poignet. Je libère mes deux ailes, faisant gicler du sang un peu partout. Je soupirais bruyamment.
Je m'approche de Hellen qui se tourne vers moi un sourire carnassier sur le visage.
- Que me vaut l'honneur de cet accueil chaleureux ? Dis-je, ironique.
- Tu es vraiment taré ! Tu aurais pu mourir. Cette chute était mortelle, surtout si mes fesses d'éléphant venaient éclater toutes tes côtes. S'exclame-t-elle.
- J'ai agit sans réfléchir d'accord, mais au moins, si nous sommes là, c'est qu'ils ne nous ont pas eu.
- C'est sûr... mais j'ai quand même du traîner ton poids de mammouth !
- Merci !
Elle plisse les yeux dans un sourire avant de s'approcher et de poser ses mains chaudes et douces sur mon torse et caler sa tête dans mon cou.
- J'ai eu tellement peur... tu as fait un arrêt cardiaque et je ne pouvais en parler à personne...
- Chut... Je suis en bonne santé maintenant... Murmurais-je ému par son attention.
Je caresse ses cheveux alors que je sentais des larmes mouiller mes épaules. Elle était bouleversée mais pas par mon accident.
- Qu'est-ce que tu ne me raconte pas Hellen ? Dis-je.
- Je... Lorsque nous sommes tombés, que j'ai senti tes côtes se casser son mon poids, j'ai cru que tu étais mort. Je ne sentais pas ton cœur battre, seulement un silence effrayant. J'ai paniqué mais lorsque les hommes de l'Organisation sont descendus pour voir si j'étais moi aussi morte, j'ai décidé de ne pas rendre ton sacrifice inutile et je me suis enfuie en laissant ton corps là où tu avais atterrit. J'ai fui lâchement et une fois que la panique de l'attaque était un peu retombée, je suis revenue pour voir. C'était ridicule mais pour moi tu ne pouvais pas être mort. Je suis retournée mais tu n'étais plus là. Les mercenaires savaient que j'allais tenter de te retrouver. Ils m'ont assommée et emmenée dans leur planque. Tu étais là, dans ma cellule. Tu étais mort mais ils t'avaient mis là pour me faire souffrir. J'ai longtemps pleuré sur toi. Je t'ai embrassé, mais tes lèvres étaient plus froides que de la glace. Ma cellule était toute petite mais je me suis permise d'étendre tes ailes. Les mercenaires m'ont demandé ce que je savais sur toi. Plusieurs jours ont passés, je ne sais pas exactement combien, si ça ce trouve, ce n'était qu'une journée... Et puis du jour au lendemain, je me suis réveillée dans une rue, toi à mes côtés. Il faisait très froid. Je t'ai traîné sur les quelques rues qui nous séparaient d'ici et je t'ai installé sur la table. C'est là que j'ai remarqué que ton cœur battait toujours mais qu'il battait si lentement que je n'étais pas en mesure de le sentir. Le premier jour s'est bien passé, mais un soir tu as commencé à avoir des convulsions. Et un arrêt cardiaque. J'ai eu tellement peur que tu meures dans mes bras sans que je ne puisse rien faire...
Les sanglots secouaient ses épaules. Elle avait été beaucoup éprouvée par ces jours d'angoisse. Je ne comprends que maintenant ce que signifient les mots "On sait quel'on est amoureux quand la vie d'un autre passe avant la nôtre." Mes caresses sur ses cheveux descendent jusqu'à son dos et elle se calme doucement. Elle se détache de moi et baisse la tête.
- Tu dois tellement me trouver ridicule. Entraînée par des tueurs de sang froid et pleurer bêtement alors qu'il n'y a plus rien !
*
Il relève mon visage avec deux doigts avant de poser ses mains sur mes joues et d'essuyer avec son pouce une larme qui s'échappait encore de mes yeux. Une seconde plus tôt je doutais encore de la survie de Scott et la seconde plus tard ma tête était vide. C'est notre premier vrai contact et c'est Scott qui l'a provoqué.
- Tu ne sera jamais ridicule à mes yeux. Chuchota-t-il conscient de la magie de cet instant.
Il a les yeux ancrés dans les miens et je m'aperçois que si un jour je devais ne plus les voir, je donnerais tout ce que j'ai pour les voir à nouveau, même ma vie s'il le fallait. Deux grands yeux d'un bleu profond, à la limite entre l'électrique et le turquoise. De longs cils noirs dessinant des ombres féeriques sur ses joues et ses yeux. Une pupille verticale que je voyais se dilater avec le désir. Alors que ses ailes se déploient autour de nous, j'approche mon visage du sien. Il baisse la tête alors que je me mets sur la pointe des pieds. Plus rien autour de nous ne compte. Ses lèvres se posent avec délicatesse sur les miennes.
Dans mon ventre, c'est comme un ballet de papillons, un feu de joie, quelque chose d'indescriptible. Mon coeur s'emballe. Tout s'emmêle et je perds pieds avec la réalité. Ses lèvres sont douces et chaudes contre les miennes. Et c'est la seule chose que je suis capable de comprendre tant tout est magique.
A bout de souffle, on se sépare. J'ouvre les yeux pour regarder Scott, mais il a toujours les yeux fermés. Je fais glisser une de mes mains de son front à son menton, puis laisse ma main sur sa joue. Il tourne doucement la tête de manière à ce que ma main soit sur ses lèvres.- Maintenant je sais ce que ça fait d'aimer et d'être aimé bien plus en retour...
Il murmure ces mots si bas que je manque de ne pas les entendre. Tout l'amour contenu dans sa phrase, cet amour qui fait vibrer sa voix me fait comprendre que jamais il n'a été aimé comme il l'aurait voulu. Je serre mes bras autour de son cou et enroule mes jambes autour de sa taille. Il pose, d'abord doucement, ses mains sur le bas de mon dos, avant de me serrer contre lui. Je pose ma tête contre son cou et respire doucement son parfum. Je sens son cœur battre contre ma joue et il bat à un rythme qui témoigne sa peur de briser ce moment si magique. Je glisse une de mes mains dans ses cheveux, ce qui lui fait échapper un de ses petits ronronnements que j'aime tant. Je m'écartais un peu, pour voir son visage. Sa tête est posée sur mon épaule.
- Je t'aime... Tu ne peux pas savoir à quel point... Murmura-t-il, la voix étouffée.
Je tourne sa tête pour qu'il me regarde et lis dans ses yeux l'étendue de son amour. Ce qu'il lu dans mes yeux ne le fit hésiter qu'une demi-seconde. Il m'embrassa.
Je l'aimais, il m'aimait et c'est tout ce qui comptait.
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Homme-Loup
Fantasy"Aujourd'hui, la science est arrivée à un tel point que l'Homme est en capacité de modifier jusqu'au génome humain pour pouvoir soigner les maladies face auxquelles nos ancêtres ne pouvaient qu'abdiquer." Dr Bersheker, conférenc...