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On a encore eu le droit à une semaine de repos avant que les parents de Hellen ne se décident à nous faire reprendre les cours. Après trois petits mois d'absence, nous ne pouvions plus rattraper notre retard, mais nombre de nos professeurs sont surpris de constater que nous n'en sommes que meilleurs. On décide simplement de passer sous silence le fait que la réalité est bien meilleure en morale que les cours. Habitués à vivre à 200km/h au Japon, on a l'impression que la semaine passe à une vitesse incroyablement lente. Hellen passe ses journées à soupirer, à dessiner ou encore à râler, mais dès que nous quittons l'enceinte du lycée, elle redevient la fille normale qu'elle a toujours été. Je ressens exactement la même chose qu'elle, à la différence près que je ne le montre pas, affichant seulement un visage impassible. Je passe mes cours à essayer de sentir les sentiments des gens qui m'entourent, et ce sans attirer l'attention sur moi en faisant changer mes yeux de couleur. Grâce à Hellen, j'ai réussi à me maîtriser complètement, parce qu'elle me poussait régulièrement à des sortes de mini crises de colère. Et cela m'a permis de remarquer que lorsque mes yeux changent de couleur, je sens comme une minuscule brûlure tout autour de ma pupille.

Plusieurs fois, j'ai croisé la bande du frère de James mais jamais je n'ai eu droit à une insulte ou un mot de travers, ce qui renforce mon idée. Ils ont été manipulés et le départ de Bruce leur a permis de s'en rendre compte. Ils sont restés ensemble parce que ce qu'ils avaient fait lorsqu'ils étaient ''sous l'emprise'' de Bruce est resté gravé dans la mémoire des autres.

Lorsque le week-end arrive enfin, j'ai cru que Hellen allait sauter de joie. Surexcitée elle nous organise une soirée avec toute la bande, nous avons rendez-vous dans la boîte de nuit qui appartient au père d'une des filles, celle qui rougit à chaque fois que j'ai le malheur de poser mes yeux sur elle ou pire encore lorsque je lui parle, Marlen je crois. Je fronce les sourcils, parce que ce n'est pas dans les habitudes de Hellen d'organiser des grands regroupements comme cela, mais ce soir, elle a l'air tellement heureuse de faire ça que j'accepte. Après tout, qu'est-ce que ça a de dangereux de sortir dans une boite de nuit à part le fait que mes sens ultra-sensibles vont souffrir ? Entre les flashs des photographes à l'entrée qui vont me ruiner les yeux, la musique à fond qui va me rendre sourd, une quantité incroyable de gens dansant les un collés aux autres et sentant le vestiaire de football, j'ai de la chance si personne ne se décide à draguer Hellen !

- Scott ! Et ça c'est bien ?

Je relève le nez du numécran que je suis en train de lire. Hellen est devant moi, vêtue d'une robe ample, juste serrée à la taille, blanche avec des fleurs dans les tons roses. C'est la septième robe qu'elle me présente.

- Ça fait pas trop Marie-Antoinette dans son jardin de Versailles ?

- Depuis quand tu dis des vieilles expressions ? C'est moi qui vit en marge du temps !

- Gnagna ! Bon alors ?

- Oui.

- Quoi oui ? Souffle-t-elle, l'air exaspéré.

- Oui, ça fait Marie-Antoinette dans son...

Je n'ai même pas finit ma phrase qu'elle est déjà repartie dans son dressing.
Je me replonge dans mon livre. C'est l'histoire d'un homme qui perd la mémoire et donc qui fait tout pour reconstituer sa vie et son passé, et ce en étant agent secret. Et plus encore, cet homme possède une radioactivité incroyable dans le corps. J'aime bien ce livre, ce qu'il fait comprendre... Que les sentiments sont inoubliables, que l'instinct est la seule chose qui ne nous abandonne jamais.

- Sco' ?

Je lève à nouveau les yeux, en retenant un soupir et, contrairement aux autres robes où j'affichais un air blasé, sens ma mâchoire se décrocher. Devant moi se tient une vraie déesse. Elle a relevé ses cheveux avec quelques barrettes. Des boucles tombent simplement sur ses épaules nues. Ses yeux sont maquillés parfaitement, soulignés de noir et rehaussés de paillettes bleues nuit et noires. Sa bouche vermeille esquisse un sourire flatté. Mais le clou du spectacle est sa robe. Futuriste, elle laisse apparaître de grands triangles de peau bronzée. Elle semble être taillée dans un ciel étoilé. Le tissu est noir mais tellement brillant que la lumière allume indéniablement des étoiles de milles feux tout au long de sa silhouette qui aurait fait baver n'importe quel homme. Je dois certainement être en plein rêve. Cette créature souriante qui se tient devant moi doit être sortie du livre...

Homme-LoupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant