42.

53 6 2
                                    

Je vole doucement, pour profiter de ce moment. Sentir l'air froid et puissant qui souffle sur les oiseaux, en altitude, me fait comme renaître. Depuis mon arrivée au Japon, je me refusais à voler, parce que cela signifiait pour moi que j'allais mieux. J'attendais une véritable occasion pour le faire. Le retour de Hellen en est une. La brune que je tiens serrée dans mes bras finis par éclater de rire. Ses cheveux qui volent un peu dans tout les sens me calment. J'ai enfin retrouvé la voie que mon enlèvement m'a fait quitter. J'ai enfin retrouvé mon but, ma vie. J'ai retrouvé Hellen. Après un dernier tour en volant, je nous porte jusqu'à mon appartement. On s'y pose doucement. Hellen vacille un peu sur les premiers pas qu'elle fait.

- Tout va bien Hellen ?

- Oui, c'est simplement que cela fait tellement longtemps que je n'ai pas volé, que je n'ai pas vu une ville d'aussi haut, que je n'ai pas sentit tes muscles travailler pour lutter contre la gravité... J'en suis encore un peu bouleversée, c'est comme si j'étais plongée dans le plus beau rêve que j'ai pu faire au Japon.

- Tu ne rêves pas, je suis bien réel. Dis-je en faisant un petit sourire.

Hellen ne me répond pas, elle semble totalement perdue. Je l'attrape doucement dans mes bras et la serre contre moi. Elle ne me résiste pas et vient se coller un peu plus à moi. Je sens tout ses muscles trembler, comme si elle tentait de se retenir de pleurer. En écoutant mieux, je peux percevoir les battements affolés de son cœur. Je me décolle doucement d'elle, et attrape l'une de ses mains. Sa main à côté de la mienne paraît toute frêle, toute petite. Ses yeux bruns se posent sur nos mains enlacées, l'air surpris. Je pose sa main sur mon cœur. Je sens qu'inconsciemment, elle oblige le sien à se baser sur les lents mais puissants battements de mon organe vital.

- Tu sens ? Je suis vivant, je suis bien réel. Ton inconscient est incapable de créer deux battements de cœurs différents. C'est un fait.

- Alors c'est vrai ? Tu n'es pas mort dans un débile accident d'avion ?

- Absolument.

Comme pour lui prouver que je ne mens pas, mes ailes se mettent à produire une étrange mélodie, comme celle que j'entends lorsque je plane et qu'il y a un vent violent. Mes deux ailes frottent doucement l'une contre l'autre, et cela produit des vibrations. Comme le chant ancestral et légendaires des sirènes, une modulation d'un son que je serais incapable d'imiter. Hellen redresse la tête, incrédule,et puis tourne autour de moi pour voir mes ailes. Je tourne la tête pour observer la personne qui détient mon cœur. Et je vois cette flamme incroyable recommencer à danser dans son regard, preuve qu'elle vient d'accepter le fait qu'elle ne rêvait pas. Alors un sourire incroyable se dessine sur ses lèvres et elle revient se planter devant moi. Elle ouvre la bouche et un instant, je manque de perdre le contrôle de moi-même, et de l'embrasser.

- Je t'aime. Tu n'as pas idée à quel point de je t'aime. Dit-elle, sa voix n'étant qu'un murmure dans la pièce sombre.

- Si je sais, parce que je ressens exactement la même chose.

Ma réponse paraît la satisfaire parce qu'elle se perche sur la pointe des pieds et pose délicatement ses lèvres sur les miennes. Je lui réponds, tout en restant sur mes gardes. Non pas que j'ai peur d'être à nouveau blessé, je sais qu'elle ne serait pas capable de refaire ça, qu'elle y a été obligée, mais parce que je ne connais pas mes nouvelles limites, et avoir de son sang sur mes mains signifie irrévocablement ma mort. Je ne peux tout simplement pas vivre sachant que je l'ai blessée physiquement. Hellen se décale, recule de quelques pas, pour à nouveau m'observer, avant de parcourir les deux mètres qui nous séparent en courant et de sauter dans mes bras. Elle entoure de ses bras, mon cou, et ma taille avec ses jambes. Je sens rapidement quelques larmes couler sur mon tee-shirt. Alors, ne la tenant plus que par une main, je passe ma seconde dans son dos, pour la calmer.

Homme-LoupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant