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Lorsque j'ouvre les yeux, je remarque que je suis dans une semi-obscurité étrange. Mes chevilles et mes poignets sont ligotés. Je suis assise sur une chaise et la lumière blafarde vient de derrière moi. Je laisse à mes yeux le temps de s'habituer au noir et regarde rapidement autour de moi. Nous sommes dans un vieil entrepôt. Jen'entends rien sauf le frottement d'un morceau de métal sur le béton, qui venait de ma gauche. Mon cerveau met un bon bout de temps à se souvenir. A se souvenir que c'était ce même bruit que faisait l'aile gauche de Scott lorsqu'il prenait sa douche, parce qu'il devait la laisser au sol, le temps de récupérer de ses blessures. Je tourne la tête et ce que je vois me fait froid dans le dos. Scott est attaché par les poignets, au plafond. Ses pieds touchent à peine le sol et ne lui apportent aucun appui valable. Sa tête tombe sur son épaule et ses oreilles d'habitude toujours aux aguets même durant son sommeil, sont comme repliées sur elles-même. Mais le pire est certainement ses ailes qui pendent de part et d'autre de son corps et qui frottent au sol au rythme des légers balancements de leur propriétaire. Le tout offre un triste spectacle de désolation qui me déchire le cœur. Malgré ma gorge nouée, je m'efforce de parler. Je sens ma peur et ma détresse s'échapper par toutes les pores de ma peau et donner encore plus d'horreur à la scène. Après tout, je sais que Scott ressent les émotions, peut-être qu'en sentant les miennes, ça va le réveiller. Mais comme ça ne marche pas, je recommence à murmurer d'une voix cassée par la peur. J'ai rarement peur. Mais lorsque ça arrive, ce sentiments remplace toutes les autres émotions que je suis capable de ressentir. Comme si elle dominait tout ce que j'étais capable d'être.

- Scott ! Scott je t'en supplie réponds moi ! Scott !

Soudain, ses ailes se tendent autour de lui, il relève la tête et ouvre les yeux. Toutes les plumes de métal noir sont tendues à l'extrême, et un instant je crois qu'il va s'envoler. Ses pupilles bleues reflètent la lumière à la manière d'un chat et elles réussirent à me rassurer un petit peu. Mais ses ailes retombent doucement sur le sol, me faisant tout de même sursauter. Il lève la tête vers ses poignets. Il ne semble pas se rendre compte de ma présence, comme s'il n'était pas tout à fait conscient de ses actes. Il relève une aile et l'abatvbrutalement, tentant de casser ses chaînes mais rien n'y fait, et par peur qu'il ne se blesse, je l'arrête. Le son de ma propre voix me semble sombre, comme tout ce qui nous entoure.

- Hellen ? Demanda-t-il la voix pâteuse.

- Tu es enfin réveillé ! Est-ce que tu vas bien ? J'ai tellement eu peur qu'il t'ai tué ce...

- Ce ? Interrogea une voix masculine dans mon dos.

Je me stoppe en pleine phrase et me fige. J'ai beau essayer de me retourner pour apercevoir son visage, c'est impossible, il m'a trop bien attachée. Et vu la manière dont Scott se débat, il cherche à faire de même, mais suspendu par les poignets et ses pieds qui touchent à peine de sol, il est, lui aussi, loin d'y parvenir. L'homme se décide enfin à faire cesser ce suspense débile et à venir se placer en face de nous. Il intercepte le regard que me lance Scott et sourit de manière sadique. Il s'approche de moi avec la démarche des hommes qui se croient plus puissants que tout le monde puis se baisse pour avoir le visage à quelques centimètres du mien. Il sourit encore en entendant Scott se débattre. Il lève une main avant de caresser ma joue du front au menton. Je détourne brusquement la tête, pour tenter de regarder Scott, mais l'homme attrape mon visage à une main et me force à le regarder. Je n'ai pas assez de force pour lutter. Cette fois Scott ne peut retenir un grognement tellement puissant et tellement furieuxque l'homme se redresse rapidement et s'éloigne de quelques pas. Le jeune loup à qui j'ai ouvert mon cœur, se tourne vers moi pourvérifier que je vais bien, me faisant une fois de plus remarquer combien je l'aimais et combien j'avais eu raison de prendre ce risque.
Puis son regard si différent mais si parfait se tourne vers l'homme et ses pupilles se rétrécissent jusqu'à ce qu'elles ne soient plus qu'une fine rayure dans un ciel d'orage. Devant cette différence, cette haine, cette colère, cette rage, l'homme recule de nouveau et bute contre le mur derrière lui. Il semble très déstabilisé par la tournure que prennent les événements. Il se tourne vers le mur et y dépose le front.

Homme-LoupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant