À Bout de Souffle [Terminé]

Chapitre 46

Ali

J'ai marché jusqu'à la maison de Claudia.

C'était le seul endroit auquel j'ai pensé durant ma démarche de déménagement express.

Il n'y avait que Matteo quand je suis entrée. Comme un grand, il se préparait tout seul pour aller à l'école. Sa mère était déjà parti au boulot et quand je lui ai demandé ce qu'elle faisait, une brosse à dents dans la bouche il n'a pas trop su me répondre.

- Elle se fait toute belle et monte dans la voiture brillante du gentil monsieur.

Les trois adjectifs dans une même phrase ne m'inspirent pas du tout confiance. Parce que ça me fait trop penser à Michelle. Est-ce que Claudia se prostitue ? Peut être que je me fais trop d'idées.

- Tonton Oscar a dormi ici, me raconte Matteo en me désignant le canapé.

- Je vais dormir ici aussi si ça ne te dérange pas...

Alors que je m'allonge, je sens que la place est encore chaude. J'ai raté Oscar de peu et j'en suis soulagée. Justifier ma présence n'aurait pas été chose facile.

J'ai le visage en feu rien que de penser à ce qui s'est passé il y a quelques heures avec Ishan. Je veux disparaître. Quand j'abaisse mes mains, Matteo me regarde de tout près, avec une grande curiosité dans ses yeux bridés.

- Pourquoi tu dors ici ?

- Euhm...Le matelas d'Ishan me fait très mal au dos. Problème de vieux, tu comprendras plus tard.

Il plisse ses yeux.

- C'est ce que Mama dit toujours quand elle veut pas dire la vérité.

Merde. Ce gamin est intelligent.

- Tu ne vas pas être en retard ?

- Elle dit ça aussi !

Grmbl.

- Je me suis disputée avec tonton Ishan alors je vais restée un moment ici.

- Oh. Il a été méchant avec toi ?me demande-t-il tout inquiet.

Je souris, attendrie.

- Non, c'est moi. Vas-y, vas-y.

Matteo enfile ses chaussures, son cartable sur les épaules et juste avant de refermer la porte d'entrée, il me lance :

- Tonton Ishan t'aime beaucoup, Tata Ali !

Les larmes me montent aux yeux. Ce que je suis émotive ce matin ! Épuisée, je finis par m'endormir, je ne sais quand.

Quelques heures plus tard, je suis en cours, à ressentir la gueule de bois pour la première fois de ma vie. Comme une condamnée, je me dirige vers le gymnase. Nous marchons dans un long couloir quand Luc s'exclame irrité pour la énième fois :

- Je veux pas faire sport !

Ce mec s'exprime au nom de tous.

- Tu peux dire au prof que tu as tes règles, lui propose Byron.

- Ouais.

Ce n'est qu'au bout du couloir que Luc s'écrie :

- Sauf que je ne suis pas une fille !!

- T'as mis du temps à percuter, se moque Connor.

Byron se laisse étrangler par Luc. C'est fou combien j'ai dû mal à imaginer leur ancienne relation. En profondeur, ils ont toujours cette petite animosité l'un pour l'autre mais en surface ils n'en laissent rien paraître. Mon humble avis est qu'ils sont tous les deux matures pour passer à autre chose.