À Bout de Souffle [Terminé]

Chapitre 27

POV Ali

- EMILIE ! EMILIE ! EMILIE !

Je sursaute à ces hurlements qui retentissent dans toute la maison. Mes quatre murs tremblent comme les fondations de Jéricho. Je sors de ma chambre et vais dans la cuisine où je vois mon père lancer tout ce qui est à portée de main.

Je fais un pas en arrière alors que je sens un bout de verre sous mon talon et il me remarque dans le coin de la porte.

- Emilie ! Je t'appelle depuis des heures ! Tu étais où bordel ?

- J'étais dans ma chambre, papa.

- Menteuse ! Tu es partie me tromper !m'accuse-t-il en me prenant pour maman.

Le revoilà encore à délirer. Ce n'est pas la première fois que je le vois crier des accusations à tout va. Il est persuadé qu'il est victime d'adultère et que maman s'est enfuie avec son amant.

Moi seule connait la vérité. Une vérité pire que sa version inventée.

- Papa, c'est Ali. C'est moi, je réponds.

Plus ma voix est douce plus il s'énerve.

- Et tu me prends pour un con en plus ! Elle est où Michelle !?

- Elle est partie, je te l'ai dit tout à l'heure.

- Putain, toutes des ingrates ! jure-t-il. Toutes des salopes !

J'ai l'impression de voir un lion dans sa cage.

La télé est éteinte.

La bête s'est réveillée.

Il est plus rapide que moi.

Ses mains m'attrapent avant que je ne puisse m'enfuir.

Cet homme qui me plaque dos contre le frigo, sa main sur ma gorge, n'est pas mon père. Je me débats de toutes mes forces et il me soulève pour me plaquer violemment contre la table de la cuisine. Je gémis et sanglote sous la douleur qui m'électrise la colonne vertébrale.

- Comment t'as pu me tromper avec un autre gars, Emilie ! Et t'ose revenir en plus comme si rien ne s'était passée espèce de pute !

Il est sourd à mes supplications, à mes "papa", mes "lâche-moi", mes "s'il te plaît", mes "j'ai mal".

Ne voit-il pas que je suis qu'une fille ?

Ne voit-il pas que je suis sa fille ?

Alors il s'écarte et je me roule aussitôt sur le côté pour descendre de la table. Je me dirige vers l'entrée mais il se place devant et je freine de justesse en voyant l'éclat d'une lame de couteau dans sa main. La pointe est dirigée vers moi.

- Oh non, Emilie! Tu ne sortiras plus d'ici ! Pas vivante !

- PAPA ! Arrête !je hurle terrifiée alors qu'il fait un pas en avant.

- Dis-moi son nom !crie-t-il en retour au bord de l'explosion.

Il fait à nouveau un pas en avant. Son expression est intense comme si tous les nerfs de son visage étaient contractés. Je vois bien qu'il est déterminé à me planter ce couteau dans le corps. Il veut extérioriser sa douleur en me la transmettant.

Cette souffrance honteuse qui l'humilie de jour en jour. Tous ses amis lui ont tourné le dos. Tous les patrons n'ont pas voulu l'embaucher. Maman qui a disparu du jour au lendemain. Une accumulation de douleurs et d'humiliations qu'il n'a pas su gérer.

Si Michelle avait été là. Elle me serait passée devant. Parce que c'est elle la plus grande.

Mais aujourd'hui, Michelle n'est pas là.