Chapitre 15

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POV Ali


Et voilà j'y suis. Devant chez lui.

- C'est un pull noir avec des rayures dorées, je lance par-dessus mon épaule.

Mes yeux, curieux de nature, font le tour de son chez soi. C'est petit mais il y a un étage. J'avance vers ce qu'il me semble le salon dans lequel trône un canapé et une table ovale. Il n'y a pas de télé.

Je rejoins Ishan dans la pièce opposée et pour cela, je traverse une petite cuisine ouverte et je constate qu'il n'a aucune vaisselle sale m'indiquant qu'il mange rarement ses repas chez lui. Mon pied bute contre le matelas par terre que je n'avais pas vu. Les couvertures sont défaites et il n'y a aucun oreiller.

Pourquoi dort-il par terre ?

Comment peut-il dormir sans oreiller ?

Ishan marche dessus, après tout c'est son lit il fait ce qu'il veux, et ramasse un vêtement noir roulé en boule dans un coin. Il me le lance et j'ai le réflexe de l'attraper avant qu'il n'atterrit dans ma face.

Le parfum de Michelle envahit mes narines. Soulagée, je le déplie et le replie soigneusement pour le serrer contre ma poitrine.

- C'est celui-là.

Je me dirige vers la sortie.

- Viens on y va !

Bien sûr, je ne suis pas étonnée de me retrouver seule sur son perron. Comme s'il allait me suivre comme un toutou...

Je retourne à l'intérieur pour l'appeler.

- Magne tes fesses.

- Où ?

- A l'opérateur téléphonique du coin. Je te rappelle que t'as cassé mon portable. Crétin.

A son expression, je vois bien qu'il avait oublié.

- Tu casses les choses et tu oublies après ? t'es pas croyable. Et pendant que tu y es, on va manger aussi !

Il me fixe.

Une, deux, trois, quatre secondes.

Alors je vais jusqu'à lui et je le prends par la manche.

- T'es un vrai tyran toi, dit-il alors que je le tire hors de sa maison.

Je suis toujours en train de tirer mais il ne bouge pas d'un pouce tandis qu'il ferme sa porte à clé. Ce mec est un rocher quand il veut.

Obstinées, mes deux mains tirent sur sa manche et son t-shirt dévoile son épaule un court instant. Je cille sur le bleu violacé au niveau de son os. C'est presque noir sous sa peau mate.

Sous le choc, je lâche prise et il tourne la tête vers moi. Son expression change lorsqu'il remarque où je regarde.

- Ce n'est pas douloureux ?

- Va enculer les mouches ailleurs, réplique-t-il.

Ma mâchoire tombe.

- Pourquoi tu dis ça ?

- Elle va à l'école et elle ne connaît pas ses expressions, se moque-t-il mais j'entends un léger soupçon de mépris dans sa voix.

Les mains dans les poches, il descend la pente de sa dégaine d'homme voyou. Comment peux-t-il être menaçant tout en étant calme ? Néanmoins, je lui emboîte le pas.

- Et ça veut dire quoi ?

- Que tu portes trop d'attention aux détails.

Malgré moi, mes yeux tombent sur les bandages que laissent entrevoir ses poignets. Il ne les enlève jamais ? Je décide de garder la bouche fermée cette fois, vexée par ce qu'il m'a dit.

Les employées ont fait une drôle de tête en nous voyant entrer. C'était la seconde fois en un laps cours de temps et pour la même raison.

- Vous devriez faire attention la prochaine fois, dit l'une d'elle en me proposant une gamme de nouveaux portables.

- De quoi elle se mêle, la salope ?fait Ishan mécontent.

Nous nous tournons toutes les deux vers lui. Je le fusille du regard.

- Hé sac à merde, on ne serait pas ici si t'avais pas péter les plombs en même temps que mon portable. Attends sagement dans ton coin et je te sifflerai quand j'aurais choisi mon modèle.

Ishan me regarde dans les yeux avec une intensité presque insoutenable. Seigneur, il est vraiment effrayant quand il est en colère. Ça me donne envie de lui cracher à la face pour l'aveugler mais là il m'assommerait à coup sûr.

Alors à la place, je croise les bras dans une position de défiante. Il hausse les sourcils.

- Tu continues à me chercher même quand je suis en rogne ? Espèce de cinglée...

- Oh parce que je dois faire attention à tes états d'âmes maintenant ducon?

Il cligne des yeux plusieurs fois comme s'il n'arrivait pas à le croire.

- Mais t'as tes règles tout le temps toi...

- Euh, on va discuter des états d'âmes de mon vagin maintenant ?

Il secoue la tête.

- Tsss...c'est pas vrai. Il t'arrive de la fermer ?

- Oui quand t'es pas dans les parages, je réponds avec un sourire brillant.

Je me tourne vers l'employée qui patiente en suivant notre échange comme si c'était un match de tennis. Elle n'a pas l'air dans son assiette.

- Je vais prendre celui-là, s'il vous plaît.

Elle sursaute.

- Oui, tout de suite !

Et sous mes yeux éberlués, elle file derrière le comptoir pour disparaître dans la réserve comme si elle avait le diable à ses trousses. Ishan se place à côté de moi et ricane.

- Je te l'ai dit : un vrai tyran.

- C'est de toi qu'elle a peur. Tu l'as traitée de salope sans raison. Le respect tu connais ?

- Putain, tu la fermes jamais.

L'employée revient précipitamment avec le modèle.

- Il est prêt.

Ishan paye cash. La pauvre en moi ne peut s'empêcher d'arrondir les yeux face à cette masse de billets qui sort de ses poches.

Le mal paye vraiment bien.

Une fois sortis du magasin, je lui prends la manche et le conduis à un petit restaurant dont la façade m'a toujours paru sympathique. Il me laisse faire. Ça veut dire qu'il a faim lui aussi.

Repue, je pose ma tête sur mes bras croisés.

- C'était délicieux.

Ishan à côté de moi a les yeux fixés sur l'addition que le serveur vient de lui donner. Il fait un aller-retour entre le papier dans sa main et ma personne avant de déclarer :

- T'es un vrai ogre.

Je lui donne un coup de pied dans le tibia. Pas fort. Juste histoire de lui montrer que j'aime pas la comparaison. Puis je ferme les yeux en sentant le sommeil peser sur mon corps entier et en attendant qu'il finisse sa bière Asahi.

Fatiguée, je ne les rouvre que lorsque je le sens jouer avec mes cheveux.

La joue dans sa paume, les paupières mi- closes dans un air d'ennui souverain, il fait tournoyer ma queue de cheval autour de son index.

Je cache mon sourire dans le creux de mon coude et referme les yeux de bien-être, la joue sur mon pull préféré.

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À Bout de Souffle [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant