Un samedi après-midi, confortablement installée sur son transat, Délia prenait le soleil tandis que Messie se roulait dans la bruyère parfumée – il avait toujours été d'une coquetterie immodérée ! Pégase et Toundra, eux, préféraient l'ombre du pommier dont les rameaux frémissaient dans l'air bleu.
Rob était parti rencontrer de nouveaux investisseurs. La ligne de clefs USB parfumées rencontrait un franc succès et il était de plus en plus sollicité.
Délia respirait calmement, les yeux clos, se laissant envahir par une douce paresse, lorsque la plainte de son portable la fit sursauter.
Elle tendit la main sans regarder le numéro, pressa le combiné contre son oreille et murmura un « Allo ? » un peu sec qui trahissait son désir de n'écouter que le chant des oiseaux aujourd'hui.
– Salut. C'est Julien.
Elle se redressa. Tous les muscles de sa nuque venaient de se contracter violemment.
– Rob n'est pas là, répliqua-t-elle.
– Ça tombe bien. C'est à toi que je voulais parler. On peut se retrouver au café des Roses ? 16 heures, ça irait pour toi ?
– Euh oui... balbutia-t-elle, prise de court.
– Alors à bientôt !
Sa voix était étrangement joyeuse. Il voulait sans doute organiser une surprise à Rob pour son anniversaire ou quelque chose comme ça. Cependant, l'anniversaire de Rob n'était que dans deux mois... Mais cela concernait forcément Rob. Il n'y avait pas d'autre explication.
Elle n'avait pas envie d'y aller. C'était toujours pesant et embarrassant de voir Julien. La dernière fois qu'elle l'avait vu, c'était pour fêter ses fiançailles avec Sarah. Rob les avait invités tous les deux à la maison. Cette soirée avait été horrible, elle avait eu envie de se coincer la tête dans le four à plusieurs reprises, rien que pour ne pas les voir s'embrasser. Il avait fallu violenter les muscles de sa mâchoire pour imprimer un sourire et ordonner à ses bras d'applaudir après le toast porté en leur honneur. Malgré elle, elle avait constaté à quel point ils semblaient heureux ensemble et, quelque part, cela l'avait aidée à accepter la situation.
Elle décida de ne faire aucun effort de coquetterie. Elle irait sans maquillage, les cheveux aux vents, avec le premier tee-shirt qui lui tomberait sous la main et le short en coton bleu ciel qu'elle portait déjà. De toute façon, Julien ne remarquerait même pas comment elle était habillée.
***
Julien était assis tout au fond, affublé de grosses lunettes de soleil, sans doute pour qu'on le ne reconnaisse pas. Ce stratagème paraissait un peu ridicule, car sa carrure et ses boucles étaient reconnaissables entre toutes. Elle l'aurait reconnu même s'il avait porté un costume de Winnie l'Ourson.
Il ôta ses lunettes et les posa sur la table pour lui faire la bise. Il portait un tee-shirt blanc avec des motifs ethniques à l'extrémité des manches. Un blouson en cuir noir enveloppait le dossier de sa chaise. Elle remarquait ce genre de détail, contrairement à lui.
– Qu'est-ce que tu veux boire ?
– Je ne sais pas. Ça dépend de ce que tu vas me dire. Qu'est-ce que tu as pris, toi ?
Elle dévisagea son verre.
– Un martini.
– Alors on a quelque chose à fêter ?
– Je ne sais pas, répondit-il mystérieusement.
Il a l'air anxieux, pensa-t-elle. C'était la première fois que cette pensée lui venait à l'esprit. Julien n'avait jamais l'air anxieux ni nerveux. Il avait toujours l'air de se sentir dans son élément, où qu'il soit.
Un serveur se posta à côté d'elle. Elle commanda un Perrier citron. C'était toujours ce qu'elle prenait lorsqu'elle ne parvenait pas à se décider.
Le serveur s'éloigna. Elle lança un regard impatient à Julien. Elle parvenait à le regarder dans les yeux maintenant.
– J'ai lu ton livre, lâcha-t-il brusquement.
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Hier n'est jamais loin
RomanceElle pensait les avoir oubliés... Mais le Passé n'aime pas qu'on lui tourne le dos. En couple depuis cinq années, Délia vit une idylle parfaite avec Arnaud. Mais son cœur a-t-il réellement renoncé à ses trois amours de jeunesse ? Lorsque sonne l'heu...