Baptiste passa sa tête à travers le rideau avant de la charrette, ses yeux s'illuminèrent comme le corps des lucioles à la tombée de la nuit. Le cocher ne fit même pas attention à l'enfant que l'Empereur des dragons était devenu en une fraction de seconde.
La douce mélodie des vagues s'échouant sur la plage le berça, il respira un grand bol d'air frais et salé. La carriole était tout près de la plage, s'aventurant entre les plaines cultivées.
— Pousse-toi, lança Justine en lui donnant en coup d'épaule, afin de voir elle aussi l'horizon.
La tête de la sorcière dépassa du rideau. L'homme qui conduisait la charrette les jugea, tous les deux, du regard, avant de se concentrer de nouveau sur la route.
— Vodaska est tout proche ! fit-elle, ravie. Enfin !
Baptiste dirigea son attention sur la ville fortifiée, fondée sur un précipice qui surplombait la plage et l'océan. Sur le lit blanc de sable, l'Empereur remarqua alors ces imposants bateaux, reliés à la terre ferme et à un port par des pontons en bois solide. L'Empereur des dragons ne put s'empêcher de laisser échapper un soupir de soulagement. Justine admira Vodaska de ses grands yeux brillants, la ville devenait encore plus colossale lorsqu'ils s'approchaient d'à peine un pas.
Ils firent face alors à un grand portail en bois et en acier, ouvert et gardé par plusieurs soldats. La charrette les laissa devant l'entrée de la ville, le groupe remercia et salua le cocher avant de s'engouffrer au cœur de Vodaska, dans les rues bondées d'hommes et de femmes.
— Ouais, et maintenant ? demanda Mathys, curieux. On va où ?
— Direction le château, répondit la sorcière. Je connais bien le roi de la ville.
— Sérieusement ?
— C'est grâce à lui que je peux aller à Niredvr, où se trouve la Cité.
Le chasseur répondit par un sifflement, qui fut étouffé par le brouhaha causé par toutes ces personnes autour d'eux. Le groupe se retrouva sur une place, où une grande fontaine en pierre blanche larmoyait une eau limpide et fraîche. Ils burent un petit peu, à leur tour, avant de se placer face à ce qui les intéressait encore plus.
Devant eux, se dressant fièrement face aux maisons, dominant la ville toute entière, le château de Vodaska leur fit face.
Ce bâtiment de briques grises, de grandes vitres et d'incroyables tours était gardé par des soldats et une gigantesque porte. Un chemin en pente de dalles amenait au château, décoré par des arbres verdoyants et des nombreuses fleurs, aux couleurs chaleureuses et aux parfums envoûtants. Ils gravirent cette sorte d'escalier afin de se trouver nez à nez avec le portail et les gardes aux armures étincelantes, qui croisèrent les lances qu'ils possédaient en les voyant, créant alors une croix d'acier devant la porte.
— Halte ! en cria un, celui de droite. À qui nous faisons face ?
— À Justine, sorcière de l'Éludia et amie d'antan du roi. Nous avons besoin, mes amis ici-présents et moi-même, de son aide. Pourriez-vous nous faire la grâce de nous laisser rentrer ?
Les soldats décroisèrent immédiatement les lances quand elle termina de parler. Celui de gauche déclara :
— À vos ordres, Mademoiselle ! Le roi sera ravi de vous accueillir comme il se doit. Mais, par une nécessité de sécurité absolue, vos amis devront nous laisser leurs armes avant de le rencontrer.
Baptiste haussa les épaules, totalement indifférent. Le chasseur marmonna quelque chose d'inaudible avant d'hocher la tête. Les soldats les laissèrent alors rentrer dans le château, les deux parties de la porte s'écartèrent l'une de l'autre dans le silence le plus total.
À peine ils furent rentrés que Baptiste et Mathys se virent obligés de donner l'intégralité de leurs armes. L'Empereur des dragons déposa simplement son couteau sur une longue table en bois, alors que le chasseur fit apparaître un nombre incalculable de poignards et de munitions de sa sacoche, de sa grande veste, de son pantalon... devant les regards sidérés des soldats.
— Le compte est bon ? demanda l'un des gardes, les yeux écarquillés et posés sur le tas d'armes.
— Euh, commença Mathys, je crois que oui... ah non, attendez deux secondes !
Il enleva une de ses bottes et la secoua. Un autre couteau tomba sur la table dans un son cinglant.
— C'est bon ! annonça-t-il.
Les soldats en restèrent bouche bée. Après cela, un des hommes en armure amena le groupe en direction de la salle du trône, ils empruntèrent un grand escalier drapé d'un majestueux tapis bleu.
Baptiste tourna la tête de tous les côtés : il leva la tête pour admirer les luxurieux lustres, regarda à travers les grandes fenêtres qui offraient une vue magnifique sur Vodaska ou sur l'océan, il admira les meubles et les tableaux qui ornaient l'intérieur du château... le soldat poussa énergétiquement une large porte en bois, ils traversèrent un couloir qui survolait la cour intérieure de l'immense bâtiment, qui reliait la tour centrale au reste du château.
L'Empereur des dragons jeta un œil à travers une vitre : la cour était déserte mais débordante d'arbres et de fleurs. Elle avait l'allure d'une minuscule forêt emprisonnée entre quatre murs froids de briques. Baptiste vit même quelques oiseaux penchés sur les bras des êtres sylvestres.
— Majesté ! tonitrua le garde, en poussant une autre immense porte. Nous désirons vous voir !
Le soldat laissa le groupe entrer avant de fermer la porte, dans un bruit sourd. Justine s'approcha d'un pas décidé, les deux garçons d'une façon plus hésitante.
Assis sur un riche trône, aussi rayonnant que le Soleil lui-même, un homme les fixa de ses petits yeux sombres. Une large barbe noire lui cacha la moitié du visage, une couronne dorée se perdait dans sa chevelure ténébreuse. La sorcière s'agenouilla face à lui, Mathys et Baptiste s'empressèrent de faire de même.
— Ah, ma Justine ! lança-t-il d'un ton joyeux. Je vous en prie, relevez-vous, ainsi que vos amis. Que puis-je faire pour vous ?
— Eh bien, commença la sorcière en se redressant, c'est que...
— Laissez-moi deviner ! Vous avez réfléchi à ma proposition d'épouser un de mes fils et vous vous apprêtez à me donner votre réponse, dès à présent ?
— N-non ! Enfin, Majesté, ce n'est pas pour cela que je suis face à vous, aujourd'hui, et j'en suis cruellement désolée. J'aurai besoin d'un de vos bateaux et d'un de vos plus grands équipages pour nous amener, mes compagnons et moi, à Nirevdr pour une affaire privée et terriblement urgente. Je...
— Qu'ois-je ? fit une voix inconnue, surgissant de nulle part. Seraient-ce alors les paroles d'une ancienne et lointaine amie ?
Baptiste remarqua alors qu'un escalier en colimaçon se trouvait juste derrière le trône, et que quelqu'un le descendait avec calme. Il vit aussi les épaules de Justine s'abaisser soudainement. Le roi, lui, se leva rapidement, l'air ravi et un large sourire aux lèvres.
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Untameable
FantasiSon nom fait trembler les plus braves, fuir les monstres les plus puissants, horrifie des pays dont il ignore l'existence : faites place à Baptiste, l'Empereur des dragons ! Il est le symbole d'Ydruan, la contrée où il a laissé sa présence pour touj...