La Cité

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 Un sourire arbora le visage de Justine lorsque le groupe se retrouva face à une ville fortifiée. Elle s'arrêta devant d'immenses portes ouvertes, de bois et de métal, qui leur offraient son hospitalité sans la moindre crainte.

Baptiste leva le cou et se mit sur la pointe des pieds, la vue gâchée par Kim, voyant alors une longue rue pavée entourée de demeures collées les unes aux autres, menant à cette tour nacrée qu'ils avaient tous aperçue en arrivant à Niredvr. Ses yeux s'écarquillèrent de stupeur et d'enchantement.

La sorcière se retourna vers eux, le regard brillant de joie et d'excitation. Elle annonça alors :

— Nous y sommes. Voici la Cité.

Ils hochèrent tous la tête pour lui répondre. L'Empereur des dragons ne pouvait pas lâcher l'immense bâtisse blanche du regard. La sorcière se dirigea vers les portes de la Cité, d'un pas décidé, le reste du groupe la suivit sans contredire son intention.

Le portail était gardé par deux soldats armés de lance, se tenant droits et des deux côtés des portes. Quand leurs yeux se posèrent sur la sorcière, les gardes s'agenouillèrent avec rapidité, en signe de respect. Baptiste et le chasseur s'échangèrent un regard intrigué, Mathys leva un sourcil.

Justine leur adressa un léger sourire avant de faire un signe de la main, les incitant à se relever. Ils obéirent sans un mot. Le groupe passa les portes en silence, l'Empereur des dragons ouvrit la bouche puis s'abstint de parler. Il se contenta de plisser les yeux en fixant la sorcière, l'air sceptique.

Ils s'engouffrèrent alors dans la Cité, se mélangeant à la foule de cette ville fortifiée. Mais les habitants cessèrent tous de bouger quand leurs yeux s'arrêtèrent sur Justine et, comme les soldats gardant les portes, tous s'agenouillèrent en même temps, dans un calme respectueux qui noya aussitôt la Cité.

Baptiste trouvait cela de plus en plus étrange.

— Euh, Justine, fit ce dernier, derrière son dos, comment se fait-il que...

La sorcière claqua des doigts, l'Empereur des dragons comprit alors qu'elle voulait qu'il se tût sur-le-champ. Il leva le regard : les villageois s'étaient retirés de leur passage, laissant le groupe seul sur la grande allée, en face de la tour. Elle semblait s'agrandir au fil et à mesure de leurs pas, la bâtisse devenait progressivement plus impressionnante, plus colossale, plus inatteignable.

Baptiste ravala sa salive. Il jeta un regard autour de lui, tous ses yeux rivés sur sa personne le rendirent vite mal à l'aise. Ne sentirait-il pas ce sentiment, s'il était sous sa véritable forme ? Les habitants de la Cité le fixaient avec des yeux ronds de stupeur et, pour certains, d'effroi. En soit, il pouvait comprendre cette terreur dansant dans leurs iris : comment réagiriez-vous si vous étiez en face d'une créature mi-homme mi-dragon ?

— MADEMOISELLE JUSTINE ! DÉCALEZ—VOUS, VITE !

Un jeune homme s'interposa devant eux, leur coupant alors la route, vêtu d'une longue cape d'un violet sombre. Le groupe s'arrêta devant lui et la sorcière le jugea du regard, un masque d'indifférence posé sur le visage.

— Qui sont ces personnes, mademoiselle Justine ? demanda l'homme d'une voix forte, les yeux sur le reste du groupe. Pourquoi y a-t-il... ?

— Laisse nous passer, Zakari. Aucun d'entre eux mettra la Cité en danger, je te l'assure.

— Mais c'est un dragon ! s'opposa fermement ce fameux Zakari, en pointant du doigt Baptiste.

Ce dernier fronça les sourcils, profondément irrité. Il avança d'un pas rapide, se plaça devant Justine, malgré les contestations de cette dernière, puis déclara :

— Non, je ne suis pas un dragon. Je suis Baptiste, l'Empereur des dragons !

Un silence s'installa dans toute la Cité. Les yeux marron de Zakari s'écarquillèrent et sa peau, de couleur café habituellement, devint soudainement pâle. L'Empereur des dragons lui sourit puis continua, d'une voix plus sereine :

— Ne me méprends pas avec un simple dragon, humain. Enfin, je pense que mon nom t'évoque déjà quelque chose...

— Baptiste, décale-toi, ordonna Justine en l'entraînant en arrière.

Il se laissa faire, sachant très bien, au fond de lui, que la sorcière avait la situation en main. Elle s'approcha de Zakari et fit :

— Nous sommes ici pour faire face au Conseil. C'est urgent, comprends-tu ?

— Mais...

— L'Empereur des dragons est dans une situation bien embarrassante, je le crains. Je t'expliquerai tout en détail bien plus tard, tu n'as rien à...

— QUE FAIT UNE NÉCROMANCIENNE ICI ?!

Zakari ne semblait toujours pas au bout de ses surprises. Son regard s'arrêta sur Morgane, qui fit un large rictus malfaisant en guise de réponse. La capitaine de La Rotten Dove tira la langue en signe de provocation, Baptiste remarqua alors qu'elle était anormalement... noire.

— Et ouais ! fit cette dernière avant de ricaner. J'suis une nécromancienne, tu vas faire quoi ?

— Hors de la Cité ! aboya l'homme, la voix étranglée par la colère.

— J'fais c'que j'veux et t'n'as pas d'ordres à m'donner, toi. Donc baisse d'un ton.

— Justine ! Comment est-ce possible que... ?

Zakari ne trouvait pas les mots, muet de stupéfaction et de fureur. Mathys lâcha un soupir en levant les yeux au ciel. Il chuchota, à l'oreille de l'Empereur des dragons :

— Eh bah, on n'est pas dans la merde, nous.

— Zakari, continua la sorcière d'une façon calme et posée. Elle nous a aidés à atteindre la Cité, ce n'est pas une mauvaise personne.

— Elle contrôle les morts ! rétorqua le jeune homme, toujours de cette même voix. Elle maîtrise la Magie Noire ! Sa présence ici dépasse l'entendement !

— J'vais péter la gueule tu vas voir, cracha Morgane entre ses dents, tout en s'approchant de Zakari.

Kim s'interposa entre eux avant d'attraper la nécromancienne par le bras, il la tira violemment vers lui. Cette dernière lui lança un regard meurtrier puis cria, d'une voix débordante de haine :

— D'où tu m'touches, l'chieur ?

— Ne faites pas cela ! la supplia le prince de Vodaska. Vous n'êtes pas complètement rétablie de... enfin...

— Je veux surtout qu'elle se tienne tranquille, à présent.

L'autorité et la froideur dans la voix de Justine surprirent l'Empereur des dragons. La sorcière regarda Morgane d'une façon sévère puis rétorqua :

— Rappelle-moi ta promesse que tu as prononcé face à nous, avant de quitter ton équipage.

Un silence s'installa. La nécromancienne ouvrit la bouche, tout en essayant de se dégager de l'emprise de Kim, mais Justine lui coupa la parole :

— Tu nous as promis de ne rien faire, que tu ne feras pas n'importe quoi, arrivée ici. Donc, à présent, Morgane, cesse de te comporter de la sorte et fais toi discrète. C'est un ordre.

La capitaine de La Rotten Dove serra les dents avant de faire un geste brusque, le prince de Vodaska la lâcha enfin. Elle grogna quelque chose avant de détourner le regard, furieuse. Zakari en resta bouche bée, comme tous ces innocents qui assistaient à cette scène.

— Amène-nous au Conseil, ordonna la sorcière au jeune homme. C'est une longue histoire et nous n'avons plus le temps avec nous.

Il passa une de ses mains dans ses cheveux bruns et bouclés, le regard ailleurs, comme gêné, avant d'hocher la tête. Il tourna les talons et déclara :

— Suivez-moi.

Le groupe le suivit alors, toujours avec ces indénombrables regards fixés sur eux, dans un silence brisé par les murmures inquiets des villageois, ainsi que par les injures de Morgane.

Ils s'approchèrent alors de la tour nacrée.

UntameableOù les histoires vivent. Découvrez maintenant