-Vous êtes prêts ? nous interroge Inès après avoir donné les dernières recommandations à ses troupes.
Mon cœur se serre à la vue de la maigre armée dont nous disposons face à celle du Président. Les Privilégiés qui la composent, pour la plupart des adolescents, n'ont pas l'air très rassurés. J'aimerai tant qu'ils n'aient pas à se battre, pas aujourd'hui. Pourtant je sais que ce sera le cas. J'ignore si c'est la proximité de la menace qui l'a réveillé, mais mon cauchemar est revenu me hanter cette nuit. Après avoir dépassé en larmes le cadavre de Myra et celui de la mère de Will, j'ai continué ma route le long du sentier pour me heurter à un mur invisible. J'ai tenté de l'escalader, donné des coups dedans, crié, mais rien n'y a fait : j'ai fini par être rattrapée par mon assaillant pour me réveiller en sueur aux côtés de Will. J'y ai réfléchi, et il ne fait aucun doute que le mur représente l'armée du Président, à laquelle nous allons nous heurter aujourd'hui et sur laquelle nous savons trop peu de choses pour pouvoir la combattre efficacement. Je soupire et ravale mes doutes : ce n'est pas le moment de perdre espoir.
-Allons-y, réponds-je. Nous n'avons plus beaucoup de temps. Soyez prudents les garçons, imploré-je mes amis après une brève étreinte.
-Fais très attention toi aussi, murmure Will en entrelaçant nos doigts.
-Ne t'inquiètes pas, je veillerai à ce qu'il ne lui arrive rien, intervient Inès avec un clin d'œil.
Les joues de Will se colorent légèrement, mais sans doute pas autant que les miennes. Je ne sais pas pourquoi l'intervention d'Inès me gêne, mais je ne peux pas m'attarder plus longtemps. Après un dernier signe de la main, je quitte les garçons pour rejoindre Aaron et nous nous mettons en route à la suite d'Inès. Le soleil est presque à son zénith, ce qui signifie que le délai établi par le Président touchera bientôt à sa fin. Je suis étonnée de voir que mon souffle forme de petits nuages de buée devant mon visage. Je ne m'étais pas rendue compte qu'il faisait si froid, ou peut-être est-ce simplement parce que je ne suis pas habituée au climat Eurasien. Je fourre mes mains dans les poches de la veste prêtée par Gaëlle et accélère le pas, faisant craquer quelques brindilles sous mes pieds. Aucun d'entre nous n'a prononcé un seul mot quand nous arrivons à la lisière de la forêt. Nous nous arrêtons à quelques mètres de la dernière rangée d'arbres qui nous cache à la vue du Président que je peux apercevoir, debout sur la plage, accompagné du Général Walker.
-Vous savez ce que vous avez à faire ? s'enquiert Inès.
Aaron et moi hochons la tête. Je suis incapable de dire quoi que ce soit, la gorge nouée par l'appréhension. Je vois au regard d'Inès que de vieux souvenirs qu'elle aurait préféré oublier refont surface. Elle cligne des paupières, comme pour chasser ces fantômes indésirables puis nous regarde tour à tour, Aaron et moi.
- N'oubliez pas qu'ils sont entraînés. S'ils attaquent, ces soldats risquent de vous surprendre, alors restez sur vos gardes, nous conseille Inès d'un ton presque maternel.
Sur ces paroles, elle prend une profonde inspiration et marche d'un pas déterminé en direction de la plage. A l'instant où nous posons le pied sur le sable, je peux voir les lèvres du Président Johnson s'étirer en un sourire hypocrite. Je fais de mon mieux pour les ignorer, lui et le Général Walker qui nous fixe d'un air sévère. Je ne peux m'empêcher de jeter des coups d'œil aux alentours, à la recherche d'indices trahissant la présence de l'armée d'Anomalies à proximité. En dehors des imposants bateaux échoués sur la plage, et des quelques tentes qui ont été montées à plusieurs mètres de là, je ne vois aucune autre cachette possible.
-Vous savez vous faire attendre Inès ! s'exclame le Président quand nous arrivons à sa hauteur.
-Nous sommes dans les temps, déclare simplement la chef de la communauté.
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Anomalie [ EN RÉÉCRITURE ]
Ciencia Ficción"-Et pourquoi on n'essaierait pas quand même ? opposé-je. Vous avez vraiment envie de rester ici sans rien faire ? Pas moi. De toute façon, qui ne tente rien n'a rien et puis même si on se fait attraper en essayant de changer les choses, ça vaudrait...