Chapitre 4

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Je reste dans la cuisine et j'attends que mon petit frère se réveille. Pendant qu'il boit le lait que je lui ai fait chauffer, je lui prépare ses vêtements et son sac. Je dois l'amener chez notre voisine, c'est elle qui va le garder le temps que je passe mon test. Je l'aide à s'habiller et nous vérifions tous les deux qu'il ne manque rien dans ses affaires. Il se brosse les dents et nous sommes prêts à partir. Nous n'avons qu'à traverser l'allée de graviers pour arriver à destination. Nathalie nous attend sur le pas de la porte et nous salue de la main. Louis court la rejoindre.

—Nat ! crie-t-il en grimpant les escaliers qui mènent sur la terrasse de la maison.

Mon frère l'aime beaucoup. Sans doutes les gâteaux qu'elle lui prépare pour le goûter y sont-ils pour quelque chose.

— Bonjour Louis, sourit l'intéressé en lui rendant son câlin. Alice, comment vas-tu ?

— Un peu stressée, mais ça va.

Elle me regarde avec une lueur de tristesse et de compassion dans les yeux. Elle a perdu son fils à cause de ce maudit test, alors évidemment, elle sait ce que c'est. Aussi ne me bombarde-t-elle pas de « Ne t'inquiètes pas » ou de « Tout va bien se passer ». Je lui en suis assez reconnaissante à vrai dire. Je m'accroupis pour dire au revoir à Louis.

—Au revoir Louis, dis-je en le serrant fort dans mes bras, comme l'ont fait mes parents avec moi un peu plus tôt.

—Tu sais, papa m'a dit que tu avais un rendez-vous aujourd'hui. Mais faut pas avoir peur, je suis grand maintenant, je sais me débrouiller, ajoute-t-il en faisant mine de se grandir.

—Je sais que tu es grand Louis, et je suis fière de toi.

—Bisou, me dit-il avant de déposer un baiser sur ma joue.

—Bisou, je t'aime tu sais, je lui réponds en l'embrassant à mon tour.

Je ne veux pas m'attarder, de peur d'inquiéter mon frère. Il doit déjà se demander pourquoi j'ai l'air d'avoir envie de pleurer, alors inutile d'en rajouter. Je me relève et dit au revoir à Nathalie, qui m'étreint en m'assurant qu'elle veillera sur Louis. J'ébouriffe une dernière fois les cheveux blond foncé de mon frère et rentre chez nous en lui adressant un grand signe de la main, le cœur comprimé.

Une fois rentrée, je prends une grande inspiration pour tenter d'alléger le poids du stress. C'est alors que je remarque le bol abandonné par mon frère sur la table, et je ne peux m'empêcher de penser que c'était peut-être la dernière fois que je lui préparais son petit déjeuner. A présent, c'est du plomb qui pèse dans ma poitrine. Tout en nettoyant le récipient, je récapitule mentalement ce qu'il me reste à faire. Ça m'aide souvent à ne pas me laisser submerger. Il est 9h45. En comptant un quart d'heure pour aller en ville à pieds, et en ajoutant cinq minutes de marge, je devrai partir vers 10h40. Ce qui me laisse assez de temps pour achever mes préparatifs.

Je me dirige vers la salle de bain pour prendre une douche, mais lorsque je me rhabille, la chaleur dont j'avais essayé de me défaire me parait encore plus accablante. Quand je vois mon reflet dans le miroir au dessus du lavabo, ce reflet dont les yeux cernés me fixent avec insistance, je me demande sérieusement comment mes parents ont put avaler le mensonge que je leur ai servi tout à l'heure. Enfin, ce n'est plus très important maintenant. Je suis contente qu'ils soient partis sans trop s'inquiéter.

Alors que je sors chercher du papier et un stylo dans l'armoire du salon, un objet attire mon attention sur l'une des étagères du haut : c'est une boule à neige. Je l'agite et les flocons se dispersent sur les arbres miniatures, puis terminent leur ballet sur un sol blanc, aux pieds d'un minuscule petit garçon. Elle me fait tant penser à Liam, cette boule à neige. Je me demande si je pourrai passer devant la boutique pour la lui laisser. Malgré tout, je redoute de le voir, de peur qu'un simple aurevoir se transforme en adieu.

Anomalie [ EN RÉÉCRITURE ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant