36, quai des Orfèvres...
— Comme vous avez pu le constater par vous-mêmes, l'heure est grave, démarra Lafarge après avoir rassemblé Jordan, Marc, Claude et Lisa—Nicolas et Éric étant restés à l'appartement de Pauline afin de poursuivre la perquisition. Ça commence à puer le sériel, cette histoire.
— Oui, renchérit immédiatement l'Américaine. Bien que les deux scènes de crime soient différentes, le mode opératoire est similaire. La position du corps, les lacérations, l'égorgement, la langue sectionnée, la disposition des organes autour du cadavre... et cette foutue rose dans l'abdomen. Il est possible qu'il s'agisse du même tueur.
— Nous en avons parlé avec Jordan et le commissaire divisionnaire Santini ici présent, et nous avons le soutien du Parquet. On va donc bosser sous le numéro de procédure du dossier de Laura.
— Attends, vous êtes en train de nous dire qu'on a affaire à un tueur en série ? s'inquiéta Beauchamp.
Un silence d'église s'imposa. Chacun était assis sur le bord de son propre bureau, tasse à la main, avec le chef de section au milieu de la pièce. Le patron de la brigade criminelle, Arthur Santini, n'avait manqué pour rien au monde cette réunion.
— Officiellement, on qualifie un tueur de « serial » à partir de trois victimes, exposa la chef de groupe. Si notre hypothèse est la bonne, ce n'est qu'une question de temps avant qu'il ne recommence... L'intervalle de temps entre la découverte des corps est alarmant. J'ai rarement vu une périodicité aussi courte.
Tout le monde fut atterré et resta estomaqué face aux déclarations de Jordan, Santini et Lafarge inclus.
— Qu'est-ce qui te dit qu'il y a une troisième victime ? questionna Claude.
Fontana soupira tristement. Elle ne trouva pas les mots justes afin de rassurer ses collègues dont les regards convergeaient vers elle.
— L'expérience...
Un nouveau silence s'installa dans la pièce, comme si le bureau 414 était désert.
— Les légistes qui ont autopsié Laura ont conclu que les lacérations sur l'ensemble du corps nous montrent sa volonté de torturer, dit rapidement Gilbert qui supportait difficilement les blancs.
— Qu'il connaisse ses victimes ou pas, c'est dans leur souffrance qu'il tire son plaisir. Laura n'a pas été violée, ce n'est pas le sexe qui l'excite, mais la torture.
Jordan lança un regard furtif à ses deux supérieurs qui l'observaient, avant de se décoller du bord de son bureau et de commencer à faire les cent pas tout en poursuivant ses explications que le reste du groupe écoutait d'une manière des plus attentives.
— On ne sait pas ce qui pousse le suspect à agir, mais c'est sûrement un psychopathe, au sens propre du terme. Un antipathique nourri par ses fantasmes, qui se contrôle parfaitement et qui sait très bien ce qu'il fait, à l'inverse du psychotique qui, lui, agit plutôt de façon désorganisée et en général, il est considéré comme irresponsable de ses actes et n'est donc pas condamné—le genre de type que l'on préfère interner. Les deux scènes de crime sont nettement organisées : les organes autour du corps, la position, et cetera. Tout a été minutieusement planifié et prémédité – à la différence, encore une fois, du psychotique dont le crime est spontané –, hypothèse confortée par le laps de temps entre le décès et la découverte des corps. Laura et Pauline sont mortes plusieurs jours après leur disparition. La première a été retrouvée dans un lieu public, la deuxième chez elle. Ce qui me froisse, c'est justement ce contraste. Je pensais que le tueur voulait qu'on voie ses victimes donc logiquement, il aurait dû abandonner le corps de Pauline dans un lieu public, même si statistiquement parlant, l'exposition du corps en public relève plutôt du psychotique.
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TOME 1 : LE SANG DES ROSES
Mystery / ThrillerEntièrement nue, assise au pied de l'Obélisque de Louxor, telle une marionnette : une gamine de dix-sept ans qui a visiblement subi les pires atrocités qui soient. C'est une boucherie digne de ce nom à laquelle fait face la jeune commandante de poli...