L'espresso coula dans le gobelet de la machine à café du troisième étage. Jordan l'observa d'un œil fixe. Cela faisait bientôt trois heures que l'audition de Valentin Moreau, suspect dans l'affaire des meurtres en série commis à Paris, avait commencé. Trois heures entières durant lesquelles le jeune lieutenant en garde-à-vue n'avait pas été des plus loquaces. Face aux capitaines Mercier et Gilbert, il était seul et, à la surprise générale, il avait refusé d'être assisté par un avocat. En arrivant au cinquième étage, la chef de groupe vit son cousin, Robin, devant la porte du bureau de son procédurier. Les mains plongées dans les poches de son pantalon, il tournait en rond en attendant d'avoir du nouveau.
— Alors ? lui demanda Jordan.
— Ça fait des heures qu'ils sont là-dedans. Moreau ne parle pas, à part pour dire des choses inutiles.
— Okay. On n'est pas sorti de l'auberge...
À ce même moment, la porte du bureau s'ouvrit. Mercier apparut devant eux, l'air désespéré. Jordan l'interrogea du regard. Le second de groupe ne lui répondit pas et se tourna à la place vers Robin.
— Il ne veut parler qu'à toi.
— Non mais, et puis quoi encore ? s'indigna sa chef.
L'agent du FBI consulta sa cousine du regard.
— Non, non, reprit-elle d'un air désapprobateur.
— Ce n'est peut-être pas une si mauvaise idée, répondit Robin. On a un passé en commun, il se livra peut-être.
Malgré sa réticence, Jordan le laissa entrer dans le cabinet de procédure de Marc Gilbert, lequel était assis derrière son bureau. En face de lui siégeait un Valentin Moreau muet, tête baissée. La chaise à sa droite était vide et semblait appeler Robin, qui s'en approcha lentement. Le gardé-à-vue se retourna vers lui, et lui sourit—un sourire narquois qui déplut aussitôt à Fontana.
— Hello, Sarge¹, démarra le flic du 2ᵉ DPJ.
Le nouveau venu resta silencieux. Gilbert lui lança un regard inquiet ; Robin lui assura que tout allait bien.
— Corporal Maximilian Morrow. Morrow, Moreau, Sorel... On ne sait plus trop comment t'appeler, dis-moi.
Un silence s'ensuivit. Moreau rit.
— Je t'aurais bien proposé un petit tête-à-tête, mais il faut bien que quelqu'un rédige le PV.
Marc observa le suspect d'un œil noir. La tension était palpable. Le procédurier eut la fâcheuse impression de ne pas avoir sa place dans son propre bureau ; il se contenta de ne rien dire. Les deux anciens militaires se soutenaient mutuellement du regard, tels deux ennemis prêts à se livrer à un duel à mains nues.
— Qu'est-ce que tu attends de moi ? continua Robin.
— Seulement discuter, Sergent Fontana. De vétéran à vétéran, entre vieux copains, right?
Robin serra les dents. Il se frotta les yeux, puis reprit.
— Je ne suis pas sûr d'en avoir très envie, Corporal. Je ne vais pas discuter avec quelqu'un qui m'envoie des lettres anonymes.
Moreau ne répondit pas. Il jeta un rapide coup d'œil à Gilbert, avant de se tourner de nouveau vers le Washingtonien. Ce dernier attendit une réaction du suspect, lequel dit enfin :
— Intéressant. (Il fit une pause) Je te propose un truc : je te dis tout ce que tu veux, et tu fais de même. Pas de quiproquo. Par ailleurs, navré que mon petit courrier t'ait contrarié, ce n'était pas le but.

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TOME 1 : LE SANG DES ROSES
Mistero / ThrillerEntièrement nue, assise au pied de l'Obélisque de Louxor, telle une marionnette : une gamine de dix-sept ans qui a visiblement subi les pires atrocités qui soient. C'est une boucherie digne de ce nom à laquelle fait face la jeune commandante de poli...