L'odeur du café régnait dans le bureau deux-pièces du groupe Fontana au petit matin du vendredi 25 novembre. Les officiers de police étaient – plus ou moins – confortablement installés devant la paperasse et leur ordinateur. Il ne manquait plus que le capitaine Gilbert à l'appel, que Jordan pensait derrière son bureau à mettre à jour la procédure. Ce dernier finit cependant par arriver en trombe, non sans les mains vides : en plus de sa tasse de café, il avait de nouvelles informations à transmettre au reste de son équipe. Lorsqu'il entra en 414, il constata les lieutenants et son adjoint, le capitaine Claude Beauchamp, qui scrutaient leur ordinateur, affairés à mettre la main sur le moindre détail susceptible de faire avancer l'enquête sur les meurtres de Laura et Pauline. Ils étaient si concentrés et absorbés par leurs tâches qu'ils n'avaient pas remarqué la venue du procédurier. Depuis le 415, Jordan le vit patienter. Tout le monde présentait une mine affreuse, signe que personne n'avait beaucoup dormi ces derniers jours. Le mercredi précédent, le Parquet de Paris avait ouvert une information judiciaire contre X pour homicides volontaires commis sur Laura Delcourt et Pauline Eyraud. L'équipe Fontana demeurait sur le qui-vive.
— Bonjour à tous, salua le troisième de groupe en appuyant sur chacune des syllabes prononcées.
— Bonjour, Marc, fit Jordan en retour.
Aucune autre réponse ne se fit entendre, le silence et la concentration dominaient largement les enquêteurs.
— Considérons que vous m'avez tous répondu, poursuivit Gilbert, debout près de la porte. Cela étant dit, je–
Comme par miracle, toutes les têtes se tournèrent d'un seul coup vers lui.
— Ah, enfin ! J'ai cru que vous étiez tous ivres morts.
— Rendez-vous dans le bureau du patron à 9 h, fit une voix rauque derrière Marc—voix que celui-ci ne connaissait que trop bien.
Le procédurier se retourna vivement et découvrit Lafarge, sur le seuil, qui le fixait de ses yeux sombres.
— Commissaire, bonjour, fit Gilbert d'un air gêné. Ne vous en faites pas, nous serons à l'heure.
Le chef de section ne dit rien. Il avait arboré une expression faciale grave et renfermée qui ne plaisait pas aux « Fontana ». Le stress commença à envahir Jordan ; elle sut que des réprimandes l'attendaient au tournant.
Cinq minutes avant l'heure H, Jordan contempla les deux cadres photo qui reposaient sur son bureau : son ancienne équipe au FBI et sa famille – Sébastien, Ellie, sa mère et son père – lui souriaient en continu. Elle retint tant bien que mal ses larmes qui l'intimaient de les libérer. Elle se surprit à se demander ce qui la retenait de partir et ne plus donner de nouvelles à quiconque. Ses ongles rencontrèrent ses paumes de main, un peu trop, à tel point que sa peau se trouait probablement sous la pression de ses doigts. Jordan rouvrit sa paume droite : quatre demi-lunes étaient nées dans le creux de sa main.— Ça va ? s'inquiéta son adjoint tandis que le groupe quittait le bureau. T'es toute pâle.
— Honnêtement, non, répliqua-t-elle. Je ne sais pas ce que le taulier a à nous dire, mais je sens que je vais m'en prendre plein la gueule parce qu'on n'avance pas et qu'en plus, on a un potentiel tueur en série sur les bras.
À 9 h pétantes, les six fonctionnaires qui composaient le groupe Fontana étaient réunis dans le bureau 315. Le chef de section, Dominique Lafarge, était également présent. Arthur Santini, quant à lui, siégeait encore dans son fauteuil, mains croisées. Le chef-adjoint, le commissaire Pascal Deslandes, se tenait debout à côté de son supérieur et avait rangé ses mains dans ses poches de pantalon. Le cœur de Jordan battait tellement vite qu'elle eut l'impression qu'il allait bondir hors de sa cage thoracique.
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TOME 1 : LE SANG DES ROSES
Mystery / ThrillerEntièrement nue, assise au pied de l'Obélisque de Louxor, telle une marionnette : une gamine de dix-sept ans qui a visiblement subi les pires atrocités qui soient. C'est une boucherie digne de ce nom à laquelle fait face la jeune commandante de poli...