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La rugosité du cordage commençait à faire souffrir les poignets et les chevilles de Sébastien. Il grimaça une nouvelle fois. Il avait cessé de crier à l'aide, il savait très bien que personne ne pouvait l'entendre.
Voilà déjà deux heures que ce malade était parti avec sa sœur. Qu'est-ce qu'ils pouvaient bien faire depuis tout ce temps ? Sébastien espérait que Jordan était encore vivante mais plus le temps passait, plus l'espoir s'amenuisait. Depuis toutes ces années durant lesquelles ce grand fou la voulait dans la tombe, pourquoi attendre davantage alors qu'elle était à sa merci ?

Après quelques minutes à ne rien faire, il se mit à sautiller sur sa chaise, se rapprochant ainsi d'une étagère collée au mur. Il dut effectuer plusieurs bonds pour que ses liens pussent enfin toucher le métal froid de l'étagère. Sébastien, déterminé à se libérer, commença à frotter le cordage contre le coin de l'étagère, en apnée. Il prit toutefois soin de reprendre son souffle entre deux tentatives. Il n'y avait pas trente-six solutions pour s'en sortir. Continuer à frotter pour au moins soulager ses membres. Continuer à frotter comme s'il devait allumer un feu.
Après moult essais, les cordes finirent par céder. Il défit les liens de ses chevilles. Mais loin était encore la victoire. Enfermé dans la cave, Sébastien n'était pas encore sorti d'affaire. Il ne savait toujours pas comment il allait s'évader : ce n'était en tout cas pas la maigre fenêtre tout en haut qui allait lui rendre la liberté.

Il jeta un œil autour de lui. Il n'y avait presque rien, à l'intérieur de cette maudite cave. Juste une odeur de sang séché. Si seulement il avait son téléphone avec lui, appeler du renfort aurait été si simple. Mais l'étudiant en master était conscient que la vie n'était faite que d'embûches et que rien n'était facile.

Instinctivement, il se mit à balancer toutes les affaires de l'étagère au sol. Une fois débarrassée de son contenu, il s'en empara et la mit à l'horizontal. Elle n'était pas très lourde, mais prendre de l'élan avec elle requérait un certain effort. Après une profonde et lente inspiration qui lui servit surtout à s'encourager, Sébastien donna un premier coup à la porte avec l'étagère. Puis un deuxième, un troisième. Et encore un autre. Près de dix minutes s'écoulèrent sans que la porte ne cédât sous les frappes du bélier improvisé. Cinq autres minutes plus tard, Seb s'autorisa une pause. Il s'assit contre le mur du fond, face à la porte qui refusait de capituler. Pendant un instant, il eut l'envie de jeter l'éponge, mais dans la famille Fontana, il n'était pas question d'abandonner.

Sébastien respirait bruyamment. Il baissa la tête, la prit dans ses mains et se creusa la cervelle quelques secondes. Ce moment avec lui-même fut perturbé par du bruit provenant de l'autre côté de la porte. Il se releva doucement, vint arracher l'une des planches de bois de l'étagère et se tint prêt à frapper si nécessaire. Il s'avança lentement. On tentait d'enfoncer la porte.
Ça tapait ainsi pendant près de cinq minutes.
Puis la porte céda.
Ce fut un Sébastien Fontana affaibli que découvrirent Nicolas et Robin, arme à la main. La planche de bois encore prête à cogner, l'étudiant put distinguer un « RAS » qui venait de l'étage.

— Putain, Seb, lança le capitaine Mercier en rangeant son SIG Pro dans son holster. T'es blessé ? ajouta-t-il en remarquant l'énorme plaie au-dessus de sa tempe.

Le jeune homme laissa tomber la planche et reprit son souffle. Il entendit Nicolas appeler ses collègues pour venir l'aider. Il reconnut alors les hommes de sa sœur, tous venus le secourir.

— C'est... C'est lui... murmura-t-il entre deux faibles souffles. Il... Il a emmené Jordan... C'est...

I know, le rassura Robin. C'est fini, on va l'attraper, je te promets. On va sauver Jo.


Même de nuit, Jordan n'eut aucune difficulté à reconnaître le quartier. Elle sentit l'épuisement l'envahir peu à peu. Elle eut l'impression qu'il lui racontait sa vie depuis trois jours, au point qu'elle avait cessé de l'écouter pleinement. Il paraissait aimer répéter les mêmes choses encore et encore, tel un perroquet. Il aimait insister sur certains détails, y compris sur le degré de haine qu'il portait à son égard, à sa génitrice et aux femmes en général.

TOME 1 : LE SANG DES ROSESOù les histoires vivent. Découvrez maintenant