TOME 1 : LE SANG DES ROSES

25a

Jordan et Marc, assis à une petite table boisée et carrée de la brasserie Le Bourbon, dans le 7ᵉ, attendirent Sébastien Fontana et Jérémy Maurin. Si ces derniers, étudiants à l'université Paris–Nanterre, étaient à Paris, c'était seulement pour profiter de la bibliothèque Sainte-Geneviève avec quelques-uns de leurs amis. Leur première semaine d'examens approchait à grands pas, et la docteure en criminologie savait que son frère cadet, malgré son désir de ne pas poursuivre ses études en deuxième année de master, travaillait dur. Il l'avait toujours fait.

— D'ailleurs, comment ça va, toi ? s'enquit Marc dont la voix fit sursauter sa collègue. Tu tiens le coup ?

— Euh... Oui. Extrêmement épuisée, mais ça va.

Mains croisées sur la petite table de bois, la jeune chef de groupe baissa les yeux.

— On est tous à cran, c'est normal, continua Marc. Et toi, tu bosses beaucoup. J'imagine que tu espérais passer ton anniversaire autre part qu'au boulot.

— Boh, tu sais, je me fiche un peu de la façon dont je passe mes anniversaires...

— Si tu le dis. Bon alors, tu bois quelque chose ?

Marc se saisit de la carte et la parcourut du regard.

— Je vais prendre un café noisette, répondit Jordan.

— Et moi un capuccino, ça changera.

Le capitaine Gilbert héla un garçon de café et lui communiqua leur commande. Peu après, Jérémy et Sébastien firent leur entrée au Bourbon et ce dernier alterna son regard entre son téléphone portable et l'intérieur de la brasserie. Après avoir repéré Jordan et Marc assis à une table, les deux étudiants les rejoignirent.

— Joyeux anniversaire sis, lança Sébastien en venant embrasser sa sœur. Bonjour, Capitaine.

— Bonjour, dit à son tour Jérémy en imitant son meilleur ami. Joyeux anniversaire, Jordan.

Les deux amis posèrent leurs sacs besaces en bandoulière et s'installèrent à la table. Le serveur revint avec les boissons de Jordan et Marc et prit la commande des deux autres.

— Alors, quelle est cette chose si importante que vous voulez nous dire, les garçons ? commença le procédurier d'une voix plus basse.

Jérémy se baissa pour atteindre son sac ; il en sortit un journal qu'il déplia. Au même moment, le garçon de café revint avec deux cafés allongés et repartit aussitôt.

— Valentin Moreau, le flic qui a disparu...

— On le connaît, compléta Sébastien. Surtout Jérém.

Le commandant Fontana et le capitaine Gilbert se consultèrent du regard, sourcils froncés.

— J'étais en licence de droit avec lui, expliqua Jérémy Maurin. À la Sorbonne. Bon, il allait rarement aux cours, mais il a quand même réussi à sortir major de promo trois ans de suite.

— Quels sont vos rapports avec lui ? interrogea le troisième de groupe. Vous vous entendiez bien ?

— Lui et moi étions assez proches. Il suivait la plupart des cours à distance, alors je lui envoyais les corrections des TD et les cours magistraux quand il en avait besoin. En première année, il assistait à la moitié des cours, puis au fur et à mesure, on ne le voyait plus, ou presque. Entre nous, je comprenais, il avait déjà vingt-sept ans en L1. Il disait vouloir reprendre ses études, il s'était arrêté au bac.

— D'accord. Comment était-il, en cours ?

— Vous voulez que je vous dise franchement ? Le peu de fois où il est venu en cours, il ne notait quasiment rien. Il se pointait avec son dictaphone, je crois qu'il apprenait en écoutant.