Saison 2 - Partie 5

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Saison 2 – Episode 5

J'étais chez moi, dans ma chambre et je regardais dans le vide. Du jour au lendemain, tout avait changé, de A à Z, du début à la fin. Selon certains, ça serait « la fin de quelque chose mais le début d'une autre chose ». Quel début ? J'ai perdu une des personnes les plus importante pour moi et maintenant je suis censée faire quoi ? Attendre ou me laisser mourir ?

** Toc Toc Toc **

Je relève la tête et regarde la porte de ma chambre s'ouvrir et vois que c'est Soukeïna avec Leïla. Je les regarde s'approcher vers moi et ne dis rien. Sou s'assoit sur le rebord de mon lit et Leïla reste debout.

Leïla : J'vais pas te demander si ça va parce que je sais très bien que ça va pas et que c'est pas maintenant que ça ira mais on est là, mariés ou pas, tu peux venir quand tu veux, dormir, pas dormir mais fais pas la solitaire dans un moment comme ça, tu vas juste te tuer.

Sou : Tu viens dormir chez moi ce soir, je ne veux pas que cette chambre devienne une grotte

C'était gentille de leur part mais ça ne suffirait pas. En fait, rien ne fera que ça ira mieux. Lui suffisait. Même lorsqu'on était en guerre, il me suffisait. C'était officiel, je ne serai jamais sa femme, jamais la mère de ses enfants, je ne porterai jamais son nom, rien de tout ça. Tout était fini.

2 ans qu'on essaie de se marier mais 2 ans que mon père nous dit non. J'aurai pu vivre 2 ans à ses côtés si ce n'est pas plus car les événements ne se seraient pas passés de cette manière. Oui, j'aurai pu. On refait le monde avec des « j'aurai pu ».

Les filles sont restées encore un peu puis sont partis, elles parlaient avec un mur. Elle viendra me chercher ou Amine ou Hamid me ramènerait, je ne sais pas et j'avais pas envie de savoir, ce qui devra se passer se passera, j'en ai eu la preuve.

[...]

La journée passe, je ne faisais rien. Ma mère rentrait mais n'arrivait pas à rester longtemps, « ça lui faisait mal de me voir comme ça ». Moi ça me fait mal d'être comme ça, je me tue intérieurement mais je ne contrôle pas. Je prends mon téléphone et vois plein de message, appels. Je ne regarde pas et vais dans mes photos.

Je passe les quelques photos que j'ai, il y en a avec les filles, 2-3 avec mes frères et sœurs et puis il y a celles qui m'ont fait monter les larmes aux yeux et qui ont laissés ces larmes sortir. Celles qui font remonter tous les souvenirs à la surface et les émotions avec. Dans ce genre de moment, on repense au moment même ou ces photo on était prises pour se rassurer soi-même que l'on pas oublier ces souvenirs. Une parole, un geste, une discussion et petit à petit, on se rappelle plus ou moins le contexte dans lequel la photo  a été prise et on se dis qu'on aimerait  bien retourner en arrière pour profiter du moment présent, pour profiter de la personne qui n'est plus là.

Je m'attardais sur chacun d'entre elles et regardait chaque détail, chaque coin de son visage par peur de l'oublier. Je n'avais pas le droit de l'oublier et d'oublier ce visage, c'était interdit et inenvisageable.

Je restais une heure sur chaque photo. Par peur de les perdre, je les mets sur mon ordi et les garde aussi sur mon téléphone.

Mon drap était trempé par les larmes. Je n'aurai jamais pensé que je pouvais pleurer autant et pour un homme surtout.

A l'âge du collège, j'insultais les grandes personnes qui pleuraient pour d'autres personnes. Il faut pas pleurer pour les autres et encore moins devant les autres, c'est signe de faiblesse et il ne faut pas être faible. Il faut montrer qu'on est fort et qu'on encaisse sans montrer nos sentiments. Pleurer pour son gars aussi ce n'était pas normal car lui ne pleura pas pour toi et c'est « fragile », c'est « dégueulasse », c'était mes mots et voilà que je me tuais pour un homme.

Depuis le collège, je m'interdisais de pleurer devant n'importe quelle personne. Toute seule, je peux, personne ne me voit et personne n'est témoin mais jamais devant une personne. C'était une règle et ça l'est toujours. 

La porte s'ouvre, c'est Sou.

Elle ne me parle pas et se dirige directement vers mon placard, sort quelques affaires à moi, mets tout dans un sac, me lance des affaires. Bref, elle fait son bordel.

Sou : Vas-y met ça et on y va. Je t'attends dans le salon.

Pas le choix. Je m'habille et la rejoins dans le salon. Je vois mes parents et ma petite sœur. Je tourne la tête pour ne pas voir le regard de mon père. J'avais de la haine envers lui et lui en voulait. Pour moi, tout ça était de sa faute et je ne voulais pas le voir ni lui parler.

Elle salue mes parents et on va en direction de chez elle. On descend et je vois Réda dans sa voiture, il nous attendait avec leurs deux enfants.

Je dis bonjour à tout le monde et me met entre les deux enfants et jouent avec eux le temps qu'on arrive chez elle.

La soirée passe, aucune larme, j'étais entourée... mais des pensées. Je repensais à tout et à rien en même temps.

Son rire. Je ne l'entendrais plus. Ça aussi avait disparu avec lui. Quand on perd une personne, ce n'est pas juste son corps, c'est un tout, les souvenirs qu'on a de lui, ses gestes, ses habitudes, ses façons de faire et d'agir, son rire, son regard, sa manière de parler, marcher, conduire. Tout

Il me manquait.

Beaucoup.

Ce soir, je ne pourrai pas aller sur le toit, Sou habite en dehors de la cité. J'avais ce besoin d'y aller, de prendre l'air. Tous les soirs, vers les 2h-3h, j'étouffais, ça devenait un rituel.

Je vais à la fenêtre et respire un bon coup et en cherchant mon étoile, celle qui le représentait dans le ciel.

La voilà. La plus brillante. 

Shéhérazade : La patience est une vertuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant