Chapitre 6

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Tout est calme. Seul le bruit du vent me parvient. C'est l'un de mes moments favoris : seule, au calme, à l'abris de tout.

Je vois des infectés traîner dans la rue. Le vent me porte l'échos de leurs grognements. C'en est trop. Je me lève et vais m'asseoir de l'autre côté, face à la cour.

J'entend du bruit. Quelqu'un vient d'ouvrir la trappe pour venir sur le toit.

"Dana ?"

C'est Thomas.

"Je savais que je te trouverai là. Ça va ?"

Je n'ai pas envie de répondre. Même si c'est avec lui, Lucie, Mikaël et mon frère que je m'entends le mieux, je n'ai pas envie de parler.

Il s'assoit à côté de moi.

"C'est à cause de Nico ?"

Bien sûr ! Bien sûr que c'est à cause de lui ! J'ai envie de le lui crier, il connaît la raison de mon silence. Pourquoi est-ce qu'il a besoin de me le demander alors qu'il le sait ?

"Oui."

Ma voix est sans émotion. Neutre. Comme à mon habitude. Ça y est, j'ai retrouvé mon légendaire sang froid. Je me lève et retourne à l'intérieur du bâtiment, laissant le jeune homme en plan.

Je vais dans une des salles d'entraînement. J'y entre. Personne.

Il y a une sorte de mannequin fabriqué avec des matelas de gym du gymnase et des pieds de tables matelassés. Je commence à faire des mouvements. D'abords lentement. Je donne un coup de poing en bloquant un pied de table, comme si je bloquais le bras d'un assaillant. Je deviens de plus en plus rapide. Je laisse ma rage prendre le contrôle et mes coups deviennent violents. Rapides. Mais toujours précis. Comme un bon soldat.

Au bout d'un quart d'heure, à bout de souffle, j'arrête.

"Ça va ?"

Je me retourne vivement. C'est Mikaël, appuyé contre l'encadrement de la porte. Je ne l'ai même pas entendu rentrer. Je hoche simplement la tête. Je prends ma bouteille par terre et la vide d'une traite.

"T'as besoin de quelque chose ? insiste l'homme.

- Nan c'est bon. Tout va bien.

- Je te connais depuis le temps. Tes plus bizarre et distante que d'habitude. Tu veux parler ?

- J'ai pas besoin d'un psy, merci bien, je réplique sèchement."

Il continu à me fixer. Je passe la porte et m'en vais. Oui, j'ai effectivement besoin d'une chose : qu'on me laisse tranquille. Je pense que Mikaël et Thomas ont compris, et les autres ne viendront pas vers moi non plus. Ils ne le font généralement pas. J'ai beau faire partie du Conseil, je ne suis pas super sociale pour autant.

Je toque à la porte de la salle radio et entre. Enrico, un espagnol d'une cinquantaine d'années, et mon frère s'y trouvent. La radio est allumée. Sans un bruit, je m'approche d'eux, tire une chaise et m'assois près de la radio.

"Base Une à l'écoute, quelqu'un m'entend ? demande Enrico dans le microphone. À vous."

Tout d'abord, seul un grésillement nous parvient. Puis une voix féminine se fait entendre.

"Base Trois, on vous entend.

- Des nouvelles ?"

Si Enrico demande des nouvelles, c'est parce que la Base Trois est établie dans un centre médical et laboratoire d'analyse médicale en campagne et que ceux qui y sont réfugiés cherchent un remède. Comme s'ils avaient une chance d'en trouver un...

"Pas encore, reprend la voix. Peut être bientôt.

- D'accord, autre chose ?

- Non, tout va bien ici... pour l'instant.

- Parfait, à demain.

- À demain."

Enrico coupe la radio. Voilà à quoi nous avons droit tous les jours. Rien. Aucun espoir. Que dalle. J'en ai marre ! Comment peut-on rester sain d'esprit lorsqu'on est entouré de morts qui essaient de vous dévorer, qu'on a perdu la plupart de nos proches, qu'on lutte chaque jour pour survivre sans savoir si un jour on s'en sortira ?! C'est humainement impossible.

"Pourquoi ils s'entêtent à chercher un remède ? je demande, amère.

- Pour essayer de s'en sortir, me répond mon frère."

Sans un mot, sous son regard incrédule, je m'en vais. Je supporte pas les gens qui me répondent une telle absurdité. Je n'ai qu'une envie : les prendre par les épaules, les secouer bien fort et leur balancer la vérité sur le monde dans lequel nous vivons. Il n'y a aucun espoir, quand vont-ils s'en apercevoir ? Si les plus grands scientifiques du monde ont échoué, pourquoi nous réussirions ?

Je suis seul dans la salle de mon dortoir, assise sur mon matelas. J'essaye de chercher un sens à ma vie. Enfin, 'vie', c'est bien vite dit.

La porte s'ouvre et Nathalie entre.

"Qu'est ce que tu fais ? me demande-t-elle en refermant la porte.

- Je cherche un sens à notre vie actuelle.

- Pourquoi ?"

Pourquoi ? Elle me demande pourquoi ? Vraiment ?

"Parce que j'en vois pas ! Je m'emporte en me levant pour lui faire face. À quoi ça sert de vivre pour survivre jusqu'à ce qu'on se fasse tous bouffer où qu'on crève tous de la faim ?! Hein ?! À quoi ça sert ?! Donne-moi une seule bonne raison de continuer à vivre comme ça, dans la peur et la douleur ! Une seule !"

La jeune femme recule en me fixant comme si j'étais folle. Bien sûr, on commence tous plus ou moins à perdre la tête, et je tiens de moins en moins. Mais au moins, contrairement à la plupart, je suis lucide. Je ne me fais pas d'illusions quant à la vie que nous menons. À quoi ça sert de se battre pour vivre dans un monde qui empire de jour en jour ?

"Pourquoi ne pas choisir la facilité, hein ? Je murmure.

- Quoi ?"

Mince, j'avais dit tout haut ce que je pensais.

"Tu veux dire que... que... Fait Nathalie, ne sachant comment finir sa phrase.

- Que je veux me suicider ? Tout le monde y a déjà songé, ici. Regarde-moi dans les yeux et dis-moi que tu n'y as jamais pensé."

Je me lève sans attendre de réponse et vais à la fenêtre.

"Regarde autour de toi, je soupire en écartant les bras, et dis-moi que ça vaut la peine de continuer à lutter pour se retrouver un jour ou l'autre comme ces... choses. Donne-moi une seule raison valable de continuer comme nous le faisons depuis des mois."

Nathalie me regarde un instant. Elle allait dire quelque chose lorsque Jonathan entre.

"La voilà, ta raison à toi, me dit-elle en me regardant droit dans les yeux. Toi au moins, t'en a une."

Et elle part sans un mot de plus...

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Dana

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The Last Survivors T1 (prochainement en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant