Chapitre 19

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Le soleil me réveille. Alors que je devais monter la garde, je me suis endormie. On aurait pu tous mourir si un infecté était venu nous rendre visite alors que je dormais. Ou encore si un survivants mal intentionné était venu. En même temps, je ne pense pas que je devrais en être blâmée pour autant. Avec l'interminable journée d'hier et ce qu'il s'est passé le soir, je ne pouvais plus résister à l'appel des rêves. J'étais physiquement et psychologiquement épuisée. Ahhh, les rêves... là où rien n'est impossible. Là où je redeviens parfois la Dana que j'étais avant... Mais tout ça, c'est du passé, maintenant. On ne peut pas avancer si on reste bloqué sur le passé. Je dois aller de l'avant, tourner la page. Tout ce que je connaissais a disparu, il n'y a plus que les chasseurs et les chassés. Les morts et les vivants. Si je pense trop au passé, je ne serai jamais totalement apte à survivre ici.

Je m'étire et descends sans bruit les escaliers pour aller voir au premier étage. Ils dorment encore. J'ai faim, mais nous avons perdu les vivres que nous avions trouvé au centre commercial lorsque nous avons dû fuir les infectés qui s'y trouvaient. Pour courir, j'ai moi-même inconsciemment lâché mon sac de vivre. Mon instinct me l'avait dicté. Je savais que je multipliais les risques de mourir en le gardant. Avec mon sac à dos, c'était déjà suffisant.

Je sors dehors après un rapide coup d'œil aux environs pour vérifier que la zone est hors de danger. C'est totalement vide. Et sinistre. Pourtant, avant, il m'arrivait de sortir tôt le matin pour aller en cours et, bien qu'il n'y avait personne, ce n'était pas aussi sinistre que maintenant. Ça ne l'était pas du tout. Mais c'est parce que des morts ne nous épiaient pas. Alors qu'à présents, la rue est vide mais si je sors, des infectés vont me voir et sortir de leur cachette.

J'ai la terrible envie d'aller dans l'immeuble d'en face. J'ai envie d'aller voir Jonathan, mais je ne le dois pas. Je ne dois plus penser à lui, sans quoi je vais devenir folle. C'est arrivé, voilà tout, je n'y peux rien.

"Je suis forte, Jo'. Comme toi. Et, comme toi, je ne pleure plus parce que je n'en ai plus la force. Mais aussi parce que perdre quelqu'un qui nous est cher est de plus en plus fréquent, de nos jours. Excuse-moi."

C'est en quelque sorte un au revoir. J'essaye dès à présent de m'habituer au fait que je ne le reverrai peut être plus jamais. Dans le fond, je sais qu'il y a peu de chance que le remède marche vraiment. Ou qu'il y en ait un tout court, même. Après tout, qu'est ce qui me dit que les gens que nous allons rejoindre ne nous ont pas menti ?

Une sorte de frottement se fait entendre. Je me retourne vivement, le couteau en main. Ce n'est que Nathalie, pas un infecté. Je dois arrêter d'être parano comme ça.

"Ça va ? Me demande-t-elle gentiment.

- T'inquiète pas pour moi. Et c'est pas la peine d'adopter un ton pareil quand tu me parle. Ça ne m'aidera pas face à la perte de Jonathan."

Mon ton a été un peu plus dur que ce que je voulais. Un tant soit peu vexée, la jeune femme retourne à l'intérieur sans ajouter un mot de plus. Encore une fois, j'ai été bien trop brusque.

"Tu vois, Jonathan ? Sans toi, je fais déjà tout de travers. Je dois vraiment arrêter de trop espérer quant à mes chances de te sauver."

Et je dois aussi absolument arrêter de me parler toute seule, ça ne m'avance à rien.

À en juger par la position du soleil, il doit être pas loin de onze heures du matin. C'est l'heure de partir. D'ailleurs, des infectés commencent à affluer dans notre direction. Nous montons vite dans la voiture et Matt démarre.

Nous ne roulons pas longtemps en voiture : le bruit attire les morts aussi loin qu'on nous entend. Mais pendant toute la durée du trajet, Matt m'a jeté des coups d'œil à la dérobée. Comme si je ne m'en apercevais pas.

Après être sortis de l'autoroute, nous nous sommes engagés sur une autre voie rapide. Nous avons finalement atteins une longue route bordée de champs. Ici, nous avons laissé la voiture : nous allons bientôt arriver à la ville proche du centre médical, on ne doit surtout pas alerter les infectés qui y errent.

Nous marchons sous le soleil de plomb. Je tousse de plus en plus. Je suis en sueur, non seulement à cause du soleil, mais aussi parce que le virus se répand dans mon organisme, me rendant plus malade d'heure en heure. Mais, heureusement, personne n'a remarqué que j'étais un peu à la traine. Seul Matt se retourne parfois. Il me surveille, et cette idée me rend folle. Je n'ai plus rien à perdre, donc je n'ai pas peur de mourir quand le temps sera venu d'agir et de me tuer pour la sécurité des autres. Il doit sûrement le savoir, alors pourquoi garder constamment un œil sur moi ?

Il doit penser que j'ai une raison d'hésiter : Jonathan. Mais non, il se trompe. Si mon état vient à compromettre la vie de la seule équipe capable de sauver mon frère, alors je ferai le nécessaire pour y remédier. Jonathan est la dernière personne qu'on peut sauver pour qui je donnerais ma vie. Avec ou sans moi, tout doit être mis en œuvre pour le sauver.

"Attention, y a des infectés en approche, prévient Thomas en regardant anxieusement les champs de part et d'autre de la route de campagne.

- Il va falloir accélérer où ils vont nous rattraper, s'inquiète Nathalie."

Sans nous concerter, l'allure générale augmente.

Les morts arrivent de partout. On doit fuir. Nous nous mettons à courir, mettant mes poumons et mon cœur au supplice à cause de mon état physique. Courir, toujours courir. Pour survivre. Je n'en peux plus de cette vie parmi les morts...

Au bout de quelques minutes à peine, nous arrivons devant un panneau. On est arrivé en ville.

"Je propose qu'on escalade ce muret pour s'y reposer un peu et pour décider de la suite, suggère Thomas. Il est trop haut pour qu'un infecté nous atteigne."

Il parle d'un vieux mur de pierre aux pavés parfois à moitié déchaussés haut d'un peu plus de deux mètres cinquante.

Tout le monde approuve son idée. Lui et Matt l'escaladent en premier pour pouvoir aider les autres.

Quand vient mon tour de monter, Matt m'aide en me tirant, prenant bien garde de ne pas me toucher le poignet gauche, là où il y a ma blessure.

Après nous y être reposé pendant presque une heure, abattant les rares morts qui tentent en vain de nous saisir les jambes, nous reprenons notre chemin, tâchant de trouver une maison où passer la nuit quand elle tombera.

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The Last Survivors T1 (prochainement en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant