Chapitre 41

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Nous avons très vite constaté qu'il nous serait impossible de repasser par la petite ville. Il y a énormément d'infectés, comme s'ils avaient décidé de s'y installer. Du coup, nous allons passer par le bois qui contourne le ville par la droite. Ici, nous avons nettement moins de risque de rencontrer une menace.

"On dormira dans les bois cette nuit ? demande Dante.

- Faut croire, répond Sasha. Pourquoi ? Ça t'inquiète ?

- Ouais, un peu, avoue l'ado. On verra pas ce qui arrive, j'ai peur qu'on se fasse attaquer en pleine nuit.

- Pour ça, c'est facile, fait Matt en passant à côté de lui pour remonter en tête du groupe. J'ai ma méthode."

Sans rien dire de plus, il nous laisse en plant sans explication.

Tout de suite après nous être installés en forêt dans une petite clairière, Matt me convoque avec Harry, Thomas et Nathalie.

"Venez, on va aller chercher ce dont j'ai besoin pour sécuriser le camps.

- Et pourquoi que nous ? je demande, suspicieuse. Je veux dire, pourquoi aucun membre du centre ne vient ?

- Y a besoin qu'on parle."

J'aime pas trop le ton qu'il a employé.

Quoi qu'il en soit, nous prévenons les autres et retournons sur la route. Matt démonte des jantes de voitures qu'il pose au bord de la route, puis nous allons en ville. Il ne veut pas nous répondre quand nous le questionnons pour savoir pourquoi il a besoin de ça.

Nous allons dans les premières maisons qui arrivent. Après avoir défoncé la porte, Thomas entre avec prudence. Dans la cuisine, nous prenons les casseroles et allons dans la maison suivante, pour la même raison.

"Ils viennent vraiment avec nous ? demande Matt au bout d'un temps.

- Bien sûr, fait Nathalie en haussant les épaules. Ça te dérange ?

- Pour être franc, un peu oui. On ne les connaît pas et ça nous rajoute une dizaines de personnes de plus à nourir.

- Toi non plus, on te connaisait pas, je lui fait remarquer. Et pourtant, on t'as laisser venir avec nous. Et je peux te dire que certains te pensaient dangereux au début.

- Ah bon ? ironise-t-il. Parce que je ne le suis pas, peut être ?

- Suffit de te connaitre un peu pour comprendre que tu n'est pas mauvais.

- Ouais... reprend-il au bout d'un silence. Mais c'est pas la question. On ne sait pas de quoi ils sont réellement capables : on a fait confiance au Dr Daniels et voilà où ça nous a mené ! Et aucun d'eux ne sait vraiment se battre, ce seraient tous des poids morts pour nous.

- On va pas les laisser crever, quand même ! Je m'exclame.

- Dana a raison, reconnaît Thomas à contre-cœur. Ce sont des humains, on a besoin d'eux pour lutter. Pour survivre.

- Alors au moins, on les teste pendant le chemin du retour.

- Marché conclu, acquiesce Nathalie.

- Ça me va, je confirme lorsque Matt se tourne vers moi.

- C'est bon pour moi aussi, fait Thomas.

- T'en pense quoi, l'anglais ? demande Matt alors qu'Harry garde le silence.

- Je les aimes bien, finit-il par déclarer avec son fort accent."

Le reste de l'expédition se déroule en silence. Nous passons de maison en maison sans nous faire remarquer par les infectés.

Au bout d'une heure, alors qu'il commence à pleuvoir, nous faisons demi-tour. Thomas, Nathalie et Harry marchent en tête, suivis par Matt et moi. Je relève la capuche de mon gilet noir alors que les gouttes se font de plus en plus nombreuses. Je me demande vraiment pourquoi Matt a besoin de tout ça. Je finis par lui poser la question pour la énième fois.

"Pour sécuriser le périmètre, répond-t-il en ralentissant pour marcher à côté de moi.

- C'est à dire ?

- On va accrocher tout ça sur des branches et des cordes autour du camp. Quand quelque chose se prendra dedans, comme un infecté par exemple, on sera immédiatement alerté par le bruit.

- Pas bête, je souris. D'où tu sors ça ?

- De quand j'étais sur les routes avant de rejoindre la Base.

- T'allais dans les bois ? je m'étonne.

- Je l'étais parfois obligé. Si je passais à proximité d'une ville et qu'il y avait une forêt pas loin, j'y allais. Y a moins d'infectés dedans parce qu'il y a pas de vivants, pas de bouffe. Tous seul contre un groupe, je m'en serais pas sorti.

- Comment t'as fais pour tenir tout ce temps seul ? je demande soudainement.

- Tu veux vraiment le savoir ? Pour tout te dire, j'en sais strictement rien. Mes journées ne rimaient à rien, j'ai bien cru que j'allais finir par devenir fou à ne parler à personne pendant tout ce temps. D'ailleurs, hésite-t-il, je dois dire que je n'avais pas toujours l'impression d'être seul. Des fois, je voyais mon frère... Mais tout ça, c'est du passé, s'empresse-t-il d'ajouter. Maintenant, c'est différent : j'ai la base, j'ai des gens à mes côtés. C'est tout ce qui compte."

Je lui souris en essuyant la pluie qui commence à sérieusement mouiller mon visage. Nous accélérons le pas pour arriver plus vite. De retour au camps, Matt nous montre comment accrocher les ustensiles à hauteur convenable pour que les infectés ne puissent ni passer par dessus, ni par dessous. On s'y met à cinq ou six à se répartir les zones du périmètre.

Je peux enfin réfléchir, seule, pendant que je fais mon boulot. Est-ce que le remède va marcher sur Jonathan ? J'aurais dû demander au Dr Daniels si ça répare les tissus, la peau, les muscles. Si ça se trouve, il est trop blessé pour que ça ait un quelconque effet sur lui... Mais vaut mieux ne pas penser à ça. Je me fais peut être du souci pour rien. Du moins, je l'espère. Je ne sais pas si je pourrais accepter de vivre sans Jonathan alors qu'il est la dernière personne pour qui je donnerais tout, y compris ma vie.

J'accroche quatre casseroles à une corde que Matt a trouvé dans une maison. Je fais un solide noeud autour d'un tronc d'arbre, puis tends la corde pour la nouer à un arbre un peu plus loin. La pluie est de moins en moins forte. Ça ne m'a jamais vraiment dérangé d'être dehors quand il pleut. Après tout, ce n'est que de l'eau. Les jours de mauvais temps, les profs me voyaient parfois entrer dans la salle de classe les cheveux trempés sans avoir l'air gênée par ça. Je ne comprends vraiment pas pourquoi les gens se cachent de la pluie. Sans eau, la vie ne serait pas. J'aime aussi les orages et les éclaires. C'est d'une puissance rare, je trouve ça beau. Et c'est quelque chose d'incontrôlable, quelque chose qui échappe à toute science. Personne ne peut avoir la main dessus. La plupart des gens me trouvent bizarre quand je leur dis ça. Ils ont peut être raison, après tout...

Après avoir fini de sécuriser ma zone et vérifié que tout était ok, je retourne au campement alors que la pluie s'arrête. Emma m'apprend que certains sont allés explorer les alentours, d'autres ont choisi de s'essayer à la chasse où encore sont partis à la cueillette. Une vraie petite société : il y a des dirigeants, des chasseurs, des cueilleurs, des guerriers. Comme quoi, on ne peut pas échapper à la nature humaine qui nous force à la survie. C'est dans nos gènes, on y peut rien, c'est comme ça.

Je m'assoie sur la terre humide contre un tronc d'arbre renversé et fini par me perdre dans mes pensées.

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The Last Survivors T1 (prochainement en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant