Made of gold.

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Après un interrogatoire poussé à l'extrême, Baptiste sembla se résigner à mes réponses froides et sans aucune répartie prometteuse. Je lui fermais mes portes, comme je le fais chaque fois. Comme si bien était mon talent. Après mes films préférés, mes couleurs, les vêtements, les musiques ou pire les styles de danse – qu'il ne pouvait connaître. J'avais la sensation plus que désagréable de passer sur le grill d'un psychopathe qui n'espérait qu'une approche plus approfondie pour se jeter à l'intérieur. Chose minutieusement étudiée par mon subconscient. Il était parfaitement hors-de-question qu'il perçoive le moindre espoir venant de ma part. 

Rayane semblait plus atteint encore par la réserve que je ne l'étais moi-même. Comme si malgré les années à le fréquenter, il ne s'était pourtant jamais habitué à ses tendances à être un lourd. Il était rigide comme la pierre, la pâleur de son visage trahissait un malaise intérieur qu'il arrivait en vain à camoufler. Il ne pouvait pas cacher son dégoût. Il semblait trop honnête pour cela. Cacher ses sentiments ne paraissait pas dans ses cordes lorsqu'il s'agissait des extrêmes. Ce qui me fit doucement sourire. Dire qu'il n'était pas un personnage qui m'intriguait aurait été mentir.

'' - Et donc toi ton truc c'est la danse ? '' je hochais la tête mécaniquement, sans réellement m'en rendre compte. Un sourire glacial étirait mes lèvres, une pure requête de politesse.
'' - Oui voilà.
- Tu en fais depuis combien de temps ? '' je levais les yeux au ciel sans m'y retenir. Quand cesseraient les questions ? Il n'avait donc pas épuiser tout son stock de curiosité mal placée pour aujourd'hui ? Moi mon quota de répartie s'écroulait petit à petit. J'en compris assez vite l'origine mais sa persistance ne fonctionnera pas avec moi parce qu'il ne m'intéresse pas, rien qu'à sa façon de s'exprimer, il parvenait à me taper sur les nerfs.
'' - Depuis que j'ai six ans. '' il valait mieux m'en tenir aux faits sans lui donner l'illusion que j'aurais pu développer davantage. Il applaudissait alors la réponse que je venais de formuler. Un étrange malaise monta à l'intérieur de moi. Être au centre de l'attention de cette façon était une des nombreuses choses que je détestais dans la vie. Être dévouée à quelqu'un en était la première. 

Les grands yeux bleus de Baptiste s'élançaient entre moi et Rayane, comme si soudainement, la conversation devait prendre une toute autre tournure. Il délivra un semblant de message à mon colocataire que je ne compris pas cependant. Rayane fit comme s'il ne saisissait pas et se leva pour se refaire un cinquième café, au rythme répétitif d'un toutes les dix minutes environ. Comme s'il comptait à l'intérieur de sa tête les secondes qui défilaient, comme si comme moi, il avait hâte que Baptiste déguerpisse de chez nous. Prit d'un élan qu'il réservait au départ provisoire de Rayane, son ami se redressa, créant une sorte d'angle droit. Il paraissait aborder – enfin – le sujet qui l'intéressait en entrant dans cet appartement, une heure plus tôt. 

'' - Sinon, tu as quelqu'un en ce moment ? '' je compris alors l'importance capitale d'éloigner instantanément l'homme assit dans mon canapé. Il paraissait plus que certain de la réponse que j'allais lui formuler. Et qu'en soit, toutes lui étaient égales puisqu'il croyait que toutes les femmes dans ce monde voulaient coucher avec lui. Un rictus nerveux sorti de ma gorge sans l'entendre venir. Une tension émanait certainement de moi tellement ma nuque était contractée par les forces décuplées que je contenais. Marc avait commencé de cette façon, celle-là même qui à une époque avait fonctionné sur moi et qui désormais était révolu. Cette époque étant loin, très loin du présent. 
'' - Oui oui je suis avec quelqu'un, et je suis bien avec lui. '' un sourire forcé m'apparut nécessaire pour compléter ma réponse, afin que le message passe à travers ses cheveux jusqu'à son cerveau calciné derrière autant de conneries. J'entendais Rayane s'agiter derrière nous, comme si lui-même n'en revenait pas. Qu'il avait pourtant bien prévenu Baptiste qu'il devait se tenir mais que ce dernier avait trahi à sa parole. 
'' - Je vais y aller. '' je haussais les sourcils faussement étonnée par cette soudaine décision. Il ne comptait pas rester dans la même pièce que la femme qui venait de lui refuser ce qu'il pensait acquis depuis le départ. Rayane conclu en le raccompagnant à la porte, des paroles intelligibles franchissaient ses lèvres, un souffle exaspéré et rapidement la porte claqua installant un silence pesant dans cette pièce. Pourtant il n'était responsable de rien. Il ne fallait pas qu'il s'en veuille. 

DemonsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant