My demons.

222 12 3
                                    

'' - J'ai peur. '' murmurai-je dans le silence de la voiture. Il prit ma main et la serra dans la sienne.
'' - Je suis avec toi. '' son regard protecteur me rassura un peu. Je hochai la tête et ouvris maladroitement la portière pour sortir. Il me rejoignit immédiatement, me prit le poignet et m'entraîna jusqu'à l'entrée.

Je ne savais pas à quoi m'attendre. Une partie de moi pensait que tout était déjà foutu, et que je n'avais plus rien à prouver, qu'il ne voudrait plus de moi. Mais l'autre était prête à se prosterner devant lui et avouer à mon âme-sœur d'avoir été conne si longtemps. La porte s'ouvrit sur un long couloir brut, aux couleurs grises et béton ciré. Le long couloir desservait une immense pièce, où des caméras étaient déjà installées, un fond vert, des éclairages, des caissons de basse et bandes de son. Le siège du réalisateur était occupé par un homme d'environ quarante ans, les cheveux ébouriffés et bruns. Devant le fond vert, une charmante jeune femme brune, toute en rondeur, je ne voyais pas qui lui faisait face, étant caché par la caméra de mon angle de vue. Mais je n'avais pas besoin de sa représentation, sa voix m'atteignait déjà en plein cœur.
'' - Ça va aller, Denitsa. Aie confiance. '' me soutint Baptiste.

J'ouvris les yeux et vis qu'il me souriait chaleureusement. Il attrapa une de mes mains et il commença à m'avancer jusque dans un coin de la pièce, à côté d'un éclairage sur un pieds ajustable. Je n'étais pas encore prête à le regarder, alors je me contentais de fixer le sol, pendant que son frère me poussait jusqu'où il l'avait décidé. Ça faisait si longtemps... Et ça faisait aussi longtemps que je n'avais pas entendu sa voix. J'avais l'impression qu'elle entrait en moi et courrait le long de ma colonne vertébrale jusqu'à mes orteils.

Ils entamèrent une première répétition, et ma respiration s'accéléra tandis que je patientais toujours dans mon coin opposé à celui de sa voix. Je regardai l'équipe autour d'eux, et vis à quel point ils étaient concentrés. Je compris que je me trouvais dans une répétition de son long-métrage Tamara. Ses yeux étaient fermés, il n'avait pas encore remarqué que j'étais là. Après être restée sans le voir depuis des mois, j'avais l'impression de devoir le regarder petit bout par petit bout, comme si le voir en entier allait me rendre aveugle. Puis je regardai son t-shirt noir tout simple qui lui allait à la perfection. Ensuite, mes yeux se posèrent sur ses bras délicieusement musclés. Son bras droit était complètement guéri, et ses mains puissantes qui appuyaient nonchalamment sur ses hanches pendant qu'il attendait. Ses cheveux en bataille étaient toujours aussi sexy, un tout petit peu plus longs que dans mon souvenir. Son visage de star de cinéma portait une trace de barbe naissante qui accentuait encore plus la beauté de ses traits. Ses lèvres n'avaient pas la moindre trace du sourire qu'il arborait d'habitude.

Quand je finis par regarder dans son ensemble, je vis que sa perfection était intacte et qu'il ne portait plus la moindre trace de la bagarre. Baptiste m'avait laissé dans mon coin et s'était reculé jusqu'à l'entrée du couloir par lequel nous sommes arrivés. Il avait l'air dévasté, des larmes roulèrent sur mes joues. Les yeux toujours clos, j'aurais voulu lui dire combien je pensais à lui malgré qu'il ne puisse ni me voir ni m'entendre, que j'avais peur de ne jamais le revoir, et de ne jamais plus ressentir la même chose. Je me demandai si les souvenirs des moments passés ensembles défilaient devant ses yeux comme ils le faisaient devant les miens.

J'eus envie de tendre la main, de m'avancer, traverser le plateau pour le toucher, mais il était trop loin. Je ne voyais même pas les autres personnes présentes dans la salle. Je ne savais même pas si quelqu'un m'avait remarqué ou non. Après une autre minute passée à le contempler, c'était à peine si je sentais encore la présence d'autres individus à quelques mètres seulement. Finalement je ne ressentais plus rien. Je me demandai si mon corps avait volontairement décidé de me lâcher.

DemonsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant