La serveuse nous tourna le dos, tout sourire pour mon divin frère. Ses yeux azurs allaient d'elle à moi sans jamais sourciller.
'' - C'est quoi son problème ?
- Toi, je pense. '' un petit rictus gêné lui échappa. Pavel avait toujours eu horreur d'être au centre de l'attention. Pour une raison encore inconnue il ne savait pas qu'il était un des plus beaux hommes sur terre. Je souriais devant son obstination à soutenir le contraire.
'' - J'ai une sale tête avec ces heures d'avion.
- Qu'est-ce-qui t'amènes à Paris ?
- Toi, petite sœur. '' la question s'arrêtait plutôt à : qu'est-ce-que j'avais – encore – fait ? Rarement l'idée de quitter son havre de paix l'effleurait. Sûrement plus que j'en pensais néanmoins. Quitte à avoir l'air désespérée, autant que ce soit jusqu'au bout. Aucune raison réelle ne l'attirait ici. Sa vie était là-bas, loin, très loin de moi. Alors quoi, c'était peut-être la tour de fer ? Elle de ses trois cent mètres de hauteur, elle divaguait loin des tergiversations inutiles de notre bas-monde.
'' - Comment vas-tu ?
- Très bien. '' très mal. Ma voix mourait à l'intérieur de ma bouche, échappant des mots déjà disparus. Il haussa un sourcil puisqu'il savait parfaitement la réalité.
'' - Et Alexis ?
- A Londres.
- Quand rentre-t-il ?
- Aucune idée. '' je n'avais pas la tête à parler de mon amant résidant à l'étranger. Qu'est-ce-que j'en savais moi quand comptait-il rentrer ? Si au moins il en avait la noble intention. Plusieurs jours déjà qu'il avait cessé de donner signe de vie. Que devais-je en conclure ? Il s'était sûrement lassé d'une paumée comme moi, à croire qu'il ne savait pas à quoi s'attendre. C'est lui qui était venu me chercher, pire encore, qui m'avait supplié de rester.-+-
Mes larmes dégoulinaient en torrent incessant sur mes joues rougies par la tristesse. Il désirait m'aider, m'aimer aussi. J'en croyais encore incapable les hommes. Qui donc dans ce bas monde, désirait rester, me montrer que j'étais pas si terrible ? Que tout ce que j'ai vécu je l'avais peut-être pas mérité ?
'' - Denitsa ? Oh, répond-moi. '' je levais les yeux, tellement faiblement que je doutais qu'il m'ait réellement vu. Ses yeux foncés plongèrent dans les miens, à l'instant même où il comprit ma faiblesse.
'' - Merde. '' il s'accroupissait face à moi, mains tendues comme pour se rendre. Pour rendre les armes qu'il a comme moi, voulu retenir. Je n'étais pas faite pour ça.
Rien en rapport de loin avec une histoire d'amour.
Rien en rapport avec l'attraction d'un physique. Rien.
Je voulais simplement qu'on me laisse tranquille, dépérir, sans aide.
'' - Tu comptes te laisser crever ? '' les larmes doublèrent par la vérité de ses propos. La vérité insoutenable, celle que jamais j'aurais voulu entendre. Il le fallait pourtant.
'' - Denitsa... Ta vie n'est pas finie, elle continue, donne-toi les moyens d'y arriver. '' j'avais envie de hurler. En quoi était-il apte à déterminer plus que moi ce qui était le mieux ?
'' - Comment ?
- En faisant confiance, à nouveau. En croyant en moi. Je serais là, toujours. '' il allumait ce qui semblait être une brindille dans ma poitrine, avec une allumette jusque là restée introuvable.
'' - Vous partez tous, toi aussi tu verras.
- Je suis pas comme les autres.
- Alors prouve-le moi. '' il avait embrassé mes lèvres, de la plus douce des façons. De manière déterminée à me rassurer, pas loin néanmoins de me terrifier.Alors me promettait-il de rester tant que j'accorderais ma confiance ? Loin de moi l'envie qu'une telle responsabilité repose sur mes épaules trop maigres.
L'offre déterminerait sûrement à quel point j'avais besoin de croire en un avenir incertain et inconnu. Mais bien qu'il me terrifie, je me laissais berner et lui rendis son baiser de la force dont j'étais capable.-+-
Et aujourd'hui il est à Londres, sans donner signe de vie. Cela signifiait-il que ma confiance avait déserté ? Non, j'étais parfaitement convaincue qu'il ne me tromperait jamais. Qu'il restera là tant que je l'aurais décidé, que j'aurais envie qu'il le soit. C'était d'un égotisme rare, bien qu'il s'agissait de la seule façon de me rassurer. Qu'à un endroit, quelque part, quelqu'un m'attendait, aussi loin qu'il fusse. J'étais déterminée à le retrouver.
'' - Tu m'écoutes ?
- Bien sûr. '' je n'avais pas perçu un traître mot de son discours. Me racontait-il ses dernières vacances ? Son week-end à la montagne ? Ou encore la croissance accélérée de son fils ? Il remuait sans cesse les mêmes discussions en ajoutant aux fois précédentes de nouvelles anecdotes destinées à me divertir. J'aurais été une horrible sœur d'avouer que cette vie me refoulait plus qu'autre chose. Tant que je n'aurais pas trouvé la personne qui me correspondait, tant qu'elle ne sera pas dans ma vie, je savais que ce genre de projets me fouteraient le bourdon.
'' - Antoine a eu dû mal à supporter les trois points de suture. Il saignait beaucoup, et tu connais Leslie, elle a failli s'évanouir en assistant à ce désastre. '' j'arrivais à comprendre la fin de ses phrases sans parvenir à les assembler en un discours cohérent. Je souriais faiblement pour accoutumer mon manque de réponse par de l'étonnement. Il connaissait ma façon d'être, il savait que je n'assimilais rien, que déjà demain j'aurais oublié. Mais il comblait le vide que je laissais entre nous, comme pour assouvir sa culpabilité d'avoir une vie bien rangée, et moi non.
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Demons
Fanfic« Ses yeux étaient fermés, il n'avait pas encore remarqué que j'étais là. Après être restée sans le voir depuis des mois, j'avais l'impression de devoir le regarder petit bout par petit bout, comme si le voir en entier allait me rendre aveugle. Il...