Chapitre 26 - Naïl

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— J'ai reçu les factures, Afrah !
— Elles sont comment ?
— Pas terrible, grimacé-je en ouvrant une enveloppe. Il y a une lettre du propriétaire.
— Qu'est-ce qu'il dit ?

Je déplie la lettre et je la lis, les sourcils froncés. On ne peut pas dire que les nouvelles soient bonnes.

— On a un loyer de retard et pas mal d'impayés.

Je me lève pour prendre l'ordinateur. Je vais vérifier mon compte bancaire.

— Tu as utilisé ma carte ?
— Non pourquoi ?
— Il y a beaucoup de retraits et les sommes sont plutôt élevées.
— C'est sûrement la semaine où tu es partie avec ta famille.
— Je n'ai pas dépensé autant ! Je n'ai presque pas utilisé ma carte, j'avais de l'argent de côté spécialement pour ça.
— Tu ne t'en souviens peut-être plus.

Je regarde plus attentivement.

— Comment se fait-il que le montant du loyer et des charges courantes ont été prélevés si on ne les as pas payés ?
— Je n'en ai aucune idée... dit-elle gênée. Il s'agit sûrement d'une erreur.
— Je vais appeler le propriétaire.
— Je ne sais pas si...

Je ne l'écoute pas et je compose son numéro. Je sais qu'elle ne veut pas que je l'appelle pour je ne sais quelle raison d'ailleurs mais si je la laisse parler, on est partie pour au moins une heure de discussion dans laquelle elle va essayer de me convaincre que c'est une erreur, que ça ne sert à rien. Je la connais bien maintenant.

— Allô monsieur Kalkan ? C'est Naïl Cartez au téléphone, je suis votre locataire.
— Bonjour monsieur Cartez. Avez-vous reçu ma lettre ?
— Oui c'est pour cela que je me permets de vous appeler. Je pense qu'il y a une erreur, monsieur. Dans votre lettre vous dîtes que nous avons un loyer de retard mais je vous ai fait un virement le mois dernier.
— Il n'y a pas d'erreur, monsieur Cartez. Je suis navré de vous dire que je me verrai dans l'obligation de vous expulser si vous ne payer pas le mois dernier et celui qui arrive.
— Avec tout mon respect, monsieur, je ne vois pas comment je pourrai vous payer trois mois de loyer. Je n'ai pas cette somme sur moi.
— Je vais vous faire une faveur, je vous laisse jusqu'au mois prochain pour payer vos dettes. Bonne soirée.

Je raccroche et je retourne auprès d'Afrah.

— Alors ?
— Nous avons deux mois pour payer trois mois de loyer ainsi que les charges.
— Comment allons-nous faire ?
— Je vais me trouver un nouveau travail, je n'ai pas le choix, dis-je en m'asseyant sur le canapé.

Ma petite-amie vient me rejoindre et pose sa main sur ma cuisse.

— On va s'en sortir.

Je bascule ma tête en arrière et je réfléchis. Comment se fait-il qu'on ait un mois de retard ? J'avais demandé à Afrah de faire un virement. Je me redresse et lui demande :

— Tu as fait le virement que je t'avais demandé ?
— Euh... quel virement ?
— Je t'ai passé ma carte pour que tu puisses le faire.
— Tu ne m'as jamais passé ta carte.
— Si je m'en souviens très bien.
— Je t'assure que non.
— Et moi je t'assure que si, Afrah, ne me prends pas pour un con ! Qu'est-ce que tu as fait à la place ?
— Rien...
— T'as été faire les magasins durant mon absence ?
— Oui mais...
— Montre-moi les relevés.
— Naïl...
— Afrah s'il te plaît !

Elle se lève et revient juste après avec la carte bleu que je lui ai passée.

— Tiens, chéri.

Je regarde les tickets et calcule le montant totale.

— C'est tout ?
— Oui.
— Tu n'as pas du tout été excessive... tu as même été très raisonnable.
— C'est ce que j'ai essayé de te dire mais tu ne m'as pas écoutée !
— Je suis désolé, chérie.
— Ce n'est pas grave. Tu es à bout de nerfs ce que je peux comprendre, je ne t'en veux pas.

Elle me prend dans ses bras et me couvre de baisers. Je me détends un peu mais une question trotte dans ma tête : comment se fait-il qu'on soit à découvert si aucun de nous n'a fait d'achat compulsif ?

— Il faut que j'y aille ! dis-je en me levant.
— Où tu vas ?
— Régler quelque chose, je reviens.
— Mais Naïl...
— À toute à l'heure.

Je l'embrasse furtivement et je m'en vais. Je me rends chez Ayden. C'est la première personne à qui je pense dès que ça va ou que ça ne va pas.

— Qui c'est ? demande une voix inconnue à travers l'interphone.
— Naïl Cartez je viens voir Ayden.
— Montez.

Elle m'ouvre la porte de l'immeuble et je monte à toute vitesse. Je toque à la porte. C'est une jeune fille, sûrement leur demi-sœur, qui m'ouvre.

— Je suis Alice.
— Oui on m'a déjà parlé de vous.
— Entrez.

Je la remercie et j'entre. Mahalia vient me saluer et me présente son nouveau compagnon.

— Tu connais Jean Renaud ?
— Non on n'a pas eu l'occasion de se rencontrer mais Laïa et Ayden m'en ont parlé. Enchanté, dis-je en lui serrant la main.
— T'es un ami des jumeaux ?
— C'est ça.

Il commence à rire doucement en acquiescent. Il m'a l'air spéciale ce Jean Renaud.

— Où est Ayden ?
— Il est dans sa chambre.

Je la remercie et je vais toquer à sa porte.

— Frangin ! dit-il joyeusement en me voyant.
— Ça va toi ?
— La belle famille est plus qu'envahissante ce qui est assez pesant sinon je vais bien.
— Courage, ils ne seront là qu'un temps.
— Comment peux-tu le savoir ?
— J'ai un bon pressentiment pour toi.
— Je l'espère.
— Vous ne vous entendez pas ?
— Si ça va mais entre Laïa et Alice c'est compliqué.
— Ce n'est tout de même pas la guerre ?
— Non pour le moment Laïa laisse passer les remarques et ne dit rien.
— Il ne faut pas qu'elle se laisse faire.
— T'en fais pas pour elle, elle n'est plus comme avant à ce niveau là. Enfin bref, tout va bien pour toi ?
— J'ai un problème avec mon compte en banque, je suis dans le rouge et dans la merde.
— Comment ça ?
— J'ai un loyer de retard et il faut que j'en paie deux autres. J'ai eu d'énormes sommes débitées mais ni Afrah ni moi l'avons fait.
— Tu penses qu'on t'a piraté ?
— Je ne sais pas, peut-être. Il faut que j'aille bloquer mes cartes et en demander une nouvelle.
— Tu veux que je t'accompagne ?
— Sans refus. Tu ne connaîtrais pas des personnes qui cherchent des employés ?
— Je peux me renseigner.
— Merci parce que si je ne trouve pas de job,  je suis dans la merde.
— Tu veux que je te prête de l'argent ?
— Non ne t'inquiète pas je vais me débrouiller.
— Tu es sûr ? Ça ne me dérange pas.
— J'en suis certain. Tu as mieux à faire avec ton argent que de me dépanner.
— Dis pas n'importe quoi.
— Je te remercie du fond du cœur mais je refuse que tu paies à ma place. Ce sont mes dettes et non les tiennes.
— Qu'est-ce que je peux faire pour toi alors ?
— Rien. Juste te renseigner sur les jobs et être présent. C'est déjà énorme tout ce que tu fais.
— Tu m'as beaucoup aidé dans le passé et t'es mon frère de cœur, c'est normal de faire tout ça.

Personne ne sait mais Ayden est moi c'est plus que de l'amitié, c'est plus que des liens de cœur et c'est plus que n'importe quoi. C'est bien plus fort, bien plus que tout ça. C'est indescriptible mais on sera toujours là l'un pour l'autre, toujours à se serrer les coudes.

— On passe à la banque et je t'invite à dîner ?
— Ok je suis partant.

[2] Souviens-toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant