Chapitre 39 - Naïl

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J'ajuste mon noeud papillon et ma chemise bordeaux. Je n'attends plus que Laïa qui se trouve actuellement dans la salle de bain depuis un long moment maintenant.

— Tu as terminé ? la questionné-je à travers la porte.
— Pas totalement. Laisse-moi encore deux minutes.
— C'est ce que tu m'as dit il y a trois quart d'heures.
— Cette fois-ci c'est vrai. Laisse-moi deux minutes et j'arrive.
— Bon très bien mais seulement deux minutes. Je ne veux pas être en retard.

Je vais m'installer sur le lit en l'attendant. Deux minutes plus tard, j'entends la porte s'ouvrir. Je lève les yeux vers elle et je reste bouche-bée. Elle est tout simplement magnifique dans sa longue robe couleur bordeaux et son maquillage simpliste lui va très bien.

— Alors... qu'en penses-tu ?
— Tu es... resplendissante ! balbutié-je en me levant.
— Merci... répond-elle, en rougissant.
— Tu es prête ?
— Oui.

Je lui tends mon bras qu'elle attrape avec timidité. Ce soir, c'est moi qui aurait la plus belle des cavalières et personne ne pourra rivaliser.

— La décoration est simple, j'aime beaucoup.
— C'est vrai que c'est jolie.

On s'installe sur nos sièges et on attend que tout le monde soit assis à sa place pour commencer.

— Bonjour à tous ! Si nous sommes réunis ici aujourd'hui c'est pour célébrer l'union de nos chers amis et familles : Nans et Angele ! annonce le maire en parlant au micro.

Les lumières se tamisent et la mariée fait son entrée au bras de son père. Tout le monde la regarde émue dont son mari qui se retrouve au bord des larmes, partagé entre le bonheur et la fierté. Elle vient s'installer aux côtés de son futur époux et la cérémonie peut commencer. Le maire leur demande leur consentement et mes deux amis se disent oui pour la vie.

— VIVE LES MARIÉS ! crient les invités, joyeux.

Ils signent les papiers pendant que tout le monde sort dehors pour être prêt à les accueillir. Des pétales de fleurs et des grains de riz volent dans les aires. Je pose mon regard sur Laïa qui est toute émerveillée par ce spectacle, ses yeux pétillent.

— C'est la première fois que tu assistes à un mariage ?
— Oui et je dois dire que c'est un plein d'émotion ! Dire qu'un jour on se mariera, nous aussi.
— Tu aimerais te marier ?
— Plus que tout ! C'est comme un rêve de gamine, pour moi le mariage c'est symbolique.
— Pour moi aussi...

Nans et Angele font le tour de leurs proches avant de venir vers nous. On les félicite en leur souhaitant plein de bonheur dans leur nouvelle vie.

— J'espère que vous êtes prêt à danser ? nous dit Angele. Je veux vous voir sur la piste de danse jusqu'à la fin !
— Peut-être pas jusqu'à la fin, je suis très mauvais danseur.
— Oh arrête ! Tu n'es pas un mauvais danseur ! m'arrête Laïa. C'est toi qui m'a appris à danser.
— Tu t'en rappelle ? demandé-je étonné.

Elle me regarde avec de gros yeux, comme si elle avait eu une révélation.

— Il faut croire que oui.

Je souris face à cette nouvelle. Cela signifie qu'elle ne m'a pas totalement oublié et qu'il lui reste des souvenirs.

— Bon et bien que la fête commence ! dit la mariée en entendant la musique.

Elle attrape son mari par la main et ils vont au milieu de la piste pour nous ouvrir le bal avec un slow.

— Veux-tu bien me faire cette honneur ?
— Avec plaisir !

On rejoint la piste et on se positionne. Cette danse me rappelle un tas de souvenir. Je nous revois avant que tout ça ne soit arrivé et je retrouve la même étincelle dans ses yeux qu'autrefois, à une différence près : aujourd'hui, elle est plus accentuée qu'elle ne l'a jamais été auparavant.

•••

Il est tard et nous commençons à fatiguer. Il est l'heure pour nous de rentrer. On se dirige vers les mariés pour leur souhaiter une bonne fin de soirée et pour les féliciter une nouvelle fois.

— Déjà ?
— Oui nous sommes fatigués.
— Merci d'être venu.
— C'est normal.
— J'espère que le prochain mariage sera le votre.
— Je ne crois pas qu'il aimerait se marier...

Elle tourne la tête dans ma direction et on se regarde un instant. Je réponds tout en la fixant :

— On se mariera un jour, je te le promets.

Elle baisse les yeux et détourne la tête. On retourne à l'hôtel sans prononcer un mot de tout le trajet.

— Change-toi et habille-toi confortablement, je t'emmène quelque part pour la nuit.

Elle part dans la salle de bain sans poser de question et je reste là pour me changer. Je réunis mes affaires et elle fait de même de son côté. On rend notre clé de chambre à l'accueil et je règle le montant pour la nuit avant de quitter les lieux.

— Où sommes-nous ? m'interroge-t-elle en regardant autour d'elle.
— Dans un hôtel pour campeur !
— On va dormir ici, à la belle étoile ?
— Tu n'aimes pas ? Tu préférerais retourner à l'hôtel ?
— Non. Ici c'est très bien.

Je souris. Elle m'a fait peur. J'ai cru qu'elle n'allait pas être d'accord pour dormir ici.

— J'ai réservé spécialement ce coin pour qu'il n'y ait personne.
— C'est une bonne idée. Tu fais souvent du camping ?
— Ça nous arrivait d'en faire lorsqu'on venait ici. Et toi, tu en as déjà fait ?
— Non, c'est la première fois.
— On dirait que tu as plusieurs premières fois avec moi.
— On dirait, oui. Mais je suis contente que ce soit avec toi.

Cette soirée nous permettra sans doute de s'ouvrir l'un à l'autre. Je ne demande que ça : qu'elle se laisse aller et qu'elle arrête de me repousser. Je veux qu'elle laisse son cœur s'exprimer, que son cœur m'avoue tout ce que ses yeux me disent.

— Tu aimerais avoir des enfants ? me questionne-t-elle soudainement.
— Oui. J'aimerais en avoir et toi ?
— Oui. Je veux connaître la joie d'être maman.
— Et tu en veux combien ?
— J'aimerais bien en avoir trois et si c'est possible un quatrième. Bien sûr tout ça dépendra de mon mari, je ne pourrai pas tout décider seule.
— Ça doit être bien d'avoir une grande famille. Avec Nicolas et Alice, tu es servie. Vous êtes six maintenant.
— Je voudrais ne pas l'être...
— Pourquoi ?
— Ils sont tous aussi mauvais les uns que les autres et ma mère est perdue entre les mains de son nouveau chéri. Elle ne sait rien lui refuser...
— Ça s'arrangera avec le temps.
— Si tu le dis.
— Ne te laisse pas abattre.
— Je fais du mieux que je peux.

J'allume un feu et je m'assois sur le tronc d'arbre, face à elle. Nous sommes éclairés par les flammes, les flammes du feu mais aussi celles qui brûlent en nous. On brûle d'envie de se libérer et de s'ouvrir. On brûle d'amour que l'on refoule au fond de nous et on brûle d'irritation et d'impatience.

— Raconte-moi.
— Quoi ?
— Raconte-moi ce que tu veux mais raconte-moi quelque chose. Je veux me souvenir de toi, de nous. Je veux me souvenir de tout.
— Alors ouvre grand tes oreilles et écoute-moi. Souviens-toi...

Cette soirée est très riche en émotions et en révélations. Ce soir, nous rentrons dans notre intimité, dans notre désir de se retrouver. Ce court séjour nous ouvre les yeux sur plein de choses. Elle veut se souvenir ? Elle s'en souviendra ce soir.

[2] Souviens-toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant