[Mohamed Nabil Moustapha Aïdara]
Depuis quelques jours j'ai remarqué le changement de ma femme. Elle se donne à fond, cœur et âme, pour me satisfaire. Je sais bien que le sujet "Retour au village" est délicat pour elle et que c'est en partie pour éviter d'y retourner qu'elle devient soudainement plus docile. J'aime bien.
Quand je suis parti, quelques mois plutôt pour le baptême de mon neveux et homonyme, j'étais drôlement surpris de la revoir. Khadija est d'une beauté insolente, sérieusement. Ses yeux en amande, son petit nez, sa belle bouche rose, son teint... Ses longs cheveux halpulaar ! Ne parlons pas de son physique, qui me rend nerveux quand je l'imagine entourée d'hommes. Dans le mètre soixante sept, elle n'est pas trop élancée mais ça colle exactement avec ses formes. Pas de poitrine débordante, plutôt discrète, des hanches parfaites et des très très belles fesses. Côté physique ? Validé à mille pour cent ! Elle a exactement tout ce que j'aime.
Ce jour là en la voyant revenir du marché habillée d'une robe en wax qui lui moulait le corps et faisait ressortir son teint, j'avais failli lui sauter dessus. Tellement elle était belle que ça m'énervait. Et surtout à ce moment-là je m'en étais voulu de ne pas l'avoir amenée avec moi à Dakar, sa place était avec moi, pas avec mes parents. Et encore elle ne m'avait pas parlé de ce que mon père lui faisait vivre ! J'avais tout de même remarqué qu'elle avait perdu du poids, loin de moi l'idée que c'était en partie à cause de ce qu'elle vivait.
J'avais pu voir de la surprise dans ses yeux quand elle me vit installé au salon. Elle ne pouvait s'attendre à ce que je sois ici. Mais ce qui me laissa perplexe c'était ce masque de rancune sur son visage... C'était à ce moment là que je m'étais rendu compte que je n'avais pas tenue ma promesse, elle m'en voulait et elle en avait plein le droit. Je lui avais promis de revenir la chercher au bout de quelques petites semaines et des mois s'étaient écoulés.Le problème était qu'arrivé à Dakar, j'étais totalement perdu : je ne savais pas si j'avais fait le bon choix en laissant ma femme au village, si elle allait bien se sentir... Mais à chaque fois que je l'appelais sur le téléphone de ma mère, elle me disait que tout allait bien, que ma mère était très attentionnée et que mes sœurs étaient comme les siennes. Elle allait bien, elle s'entendait avec ma famille donc pour moi, si je l'avais directement amenée avec moi, on aurait vécu comme deux parfaits inconnus, des étrangers, des colocataires. J'entendais de sa douce voix que me parler ne lui tenait pas spécialement à cœur. Elle se limitait à répondre à quelques petites questions que je lui posais et jamais elle ne m'avait demandé d'aller la chercher. Oui, j'en étais même déçu. Mais je savais que ce mariage lui avait été imposé depuis sa naissance, elle ne me connaissait pas et peut-être elle me détestait même. Alors j'avais préféré lui laisser son espace pour ne pas la brusquer.
Quand on est arrivés chez nous à Dakar, j'avais découvert une nouvelle Khadija ; celle qui se sentait chez elle. Elle semblait beaucoup plus épanouie, elle vivait... Elle retrouvait sa ville et ça nous était bénéfique puisque ça nous avait permis de nous retrouver tous les deux et d'apprendre à mieux se connaître.
Khadija je la connaissais déjà de vue depuis un moment, il faut donc deviner qu'avant de la marier officiellement, j'avais déjà un aperçu de qui allait partager ma vie.
De mon lieu de travail, j'avais une vue sur son lycée et vers treize heure c'était son heure de pause qui coïncidait quelques fois avec la mienne qui était devenue mon heure de la regarder traîner avec ses camarades de classe, notamment Fatima et Ismaïl. Mes yeux restaient bloqués sur elle, déjà à quinze ans je la trouvais magnifique. Toujours soignée et très bien habillée, la plupart du temps avec ses cheveux détachés et quelques fois avec des tresses qui me rendaient fou. Tout lui allait. Khadija était très souriante avec ses amis, taquine, des fois elle s'énervait mais le lendemain ils étaient de nouveau ensemble. Elle n'était pas rancunière et j'ai su qu'on allait bien s'entendre elle et moi. Je n'avais jamais osé aller lui parler, elle était trop jeune et elle aurait pu me haïr à jamais de m'imposer dans sa vie. Même si ça n'avait pas été une décision que j'avais moi-même prise.